Questions de société
2 communiqués de l'UFAL:

2 communiqués de l'UFAL: "Mort douce pour les concours et la recherche" + "Pas de signes religieux dans les salles d'examen !"

Publié le par Marc Escola (Source : UFAL)

Mortdouce pour les concours et la recherche : le nouveau projet deformation des maîtres, Par Jean-Noël Laurenti (UFAL Flash, 1er décembre2009)

Lesministres de l'Éducation nationale et de l'Enseignement supérieur et dela Recherche ont présenté conjointement le 13 novembre un documentintitulé La réforme de la formation et du recrutement des enseignants,présentant leur nouvelle mouture de la réforme de « mastérisation desconcours ».Par rapport aux projets présentés l'an passé, celui-ci semble donnerdes assurances aux partisans d'une formation soucieuse du niveau descandidats dans leur(s) discipline(s) et à ceux qui craignaient leseffets de la création de « masters d'enseignement ».

Lire la suite sur le site de l'UFAL.

Voir aussi: Masterisation: communiqués et motions (màj 03/12/09)

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Campagne nationale: "Pas de signes religieux dans les salles d'examen".

Suite à plusieurs incidents constatés lors de ladernière session du baccalauréat (voir le dossier de l'UFAL et l'article publié en juillet 2009 sur Fabula )l'Union des Familles Laïques (UFAL) lance une campagne nationale sur le thème "Pas de signes religieux dans les salles d'examen".

Un appel à signatures est disponible en ligne. Il fait suite à la lettre ouverte adressée en début de semaine au ministre de l'Education Nationale, Luc Chatel, dont voici le texte :

Monsieur Luc Chatel,
Ministre de l'Éducation nationale
Paris, le 23 novembre 2009

Monsieur le Ministre,

Alors que la place de la laïcité dans l'identité nationale est régulièrement rappelée par le Président de la République lui-même et que la Cour Européenne des Droits de l'Homme vient de juger la présence de crucifix dans les salles de classe italiennes « contraire au droit des parents d'éduquer leurs enfants selon leurs convictions et au droit des enfants à la liberté de religion », nous sommes surpris et choqués de constater que les instances de l'Éducation nationale portent de plus en plus régulièrement atteinte au principe constitutionnel de laïcité dans le cadre de l'organisation des épreuves du baccalauréat.

En effet, depuis quelques années, des établissements privés sous contrat accueillent ces épreuves au même titre que des établissements publics. Des parents d'élèves, des candidats issus de l'enseignement public ont pu s'étonner de recevoir une convocation dans un établissement privé confessionnel pour présenter un examen national, conduisant à un diplôme délivré par la République française laïque. Leur surprise pose un problème digne d'intérêt et engage à elle seule une réflexion de fond. Toutefois, dans la majorité des cas, les centres d'examen du privé garantissent aux candidats un traitement équivalent à celui qu'ils auraient trouvé dans un lycée public, les examinateurs ayant tous passé les mêmes concours nationaux et les contrats de ces établissements leur conférant une mission de service public qu'ils se sont engagés à assurer avec la neutralité et le souci de l'égalité attachés à ses conditions d'exécution. En devenant centres d'examen national, les lycées privés ne devraient donc plus se distinguer des lycées publics pour le temps des épreuves et c'est pourquoi les chefs d'établissements privés confessionnels, devenant chefs de centres, font généralement en sorte d'accueillir les candidats dans des salles d'interrogation neutres sur le plan religieux. Ainsi, c'est une pratique couramment admise que de couvrir ou de décrocher du mur des salles d'examen les symboles religieux les plus visibles.

Or, pendant la session 2009 du baccalauréat, une série d'incidents concernant la neutralité de ces centres a été signalée par plusieurs examinateurs dans différentes académies et les réponses apportées à ce problème par les recteurs ou le Service Interacadémique des Examens et Concours (SIEC) en région parisienne ont été divergentes. Ainsi, lorsque le recteur de l'académie d'Aix-Marseille est intervenu pour que les signes religieux d'un centre d'examen des Bouches du Rhône soient retirés, dans la Drôme, l'Ardèche ou encore le Val-de-Marne, on a préféré remplacer les examinateurs s'inquiétant de ces manquements aux principes de laïcité et d'égalité de traitement des candidats plutôt que de demander aux établissements privés de respecter l'obligation de neutralité dans les salles d'interrogation. Le directeur du SIEC, par exemple, a fait valoir son ignorance de la réglementation en vigueur et s'est refusé à fournir aux examinatrices qui l'alertaient des instructions écrites explicites. Au lieu de trancher, il a contourné la difficulté en leur demandant de partir.

Ce type d'incident révèle un dysfonctionnement de l'institution. Pour le régler, il convient tout d'abord de ne pas se tromper de débat. D'aucuns ont fait valoir que, dans la mesure où des élèves étaient autorisés à se présenter au baccalauréat en portant des signes religieux le problème du marquage confessionnel des centres d'examen ne se posait pas. C'est introduire une confusion dangereuse entre deux régimes juridiques très différents. Certes, si la liberté d'expression des élèves est limitée par la loi du 15 mars 2004, il n'en va pas de même de celle des candidats. En revanche, l'obligation absolue de neutralité religieuse et d'égalité de traitement entre toutes les convictions, y compris l'incroyance, s'impose aux autorités publiques durant l'année scolaire comme en période d'examens : c'est en France une obligation constitutionnelle. La Cour européenne des droits de l'Homme en rappelant cet impératif aux pouvoirs publics italiens dans l'arrêt du 3 novembre cité, vient de juger qu'il était précisément méconnu par l'apposition de crucifix dans des lieux où « /les personnes sont dépendantes de l'Etat/ », et dont « /elles ne peuvent se dégager, ou seulement en consentant des efforts et un sacrifice disproportionnés/ ». Tel est le cas des candidats incroyants, ou pratiquant des religions autres que le christianisme, dans les salles d'examen en question.
Précisons également que la réaction des examinateurs confrontés à cette situation n'a rien d'antireligieuse. Les convictions personnelles des enseignants en matière de religion n'entrent pas en ligne de compte lorsqu'il s'agit de veiller au bon déroulement des épreuves. On peut très bien être croyant, pratiquant et demander à ce que les signes de sa propre religion ne soient pas présents dans la salle où l'on interroge des candidats. Il est à cet égard scandaleux qu'on ait pu reprocher aux professeurs qui ont signalé ces incidents de ne pas avoir demandé un changement d'affectation lorsqu'ils ont constaté qu'ils étaient nommés dans un établissement privé confessionnel : faudrait-il en conclure que tous les centres d'examen nationaux ne sont pas régis par les mêmes règles et qu'il conviendrait donc que les enseignants fassent un choix en fonction du traitement accordé aux candidats qui leur paraît être le plus en accord avec leurs propres convictions ? Si l'on en venait à établir une carte différenciée des centres d'examen, qu'en serait-il de ce diplôme prétendument national, prétendument respectueux de l'égalité des candidats ?
Car, en l'espèce, telle est bien la question : l'égalité de traitement des candidats, sans considération de leur conviction personnelle. Il s'agit en France d'une règle constitutionnelle, largement déclinée par le Code de l'éducation et les textes réglementaires en vigueur. Ainsi, une note de service de la direction des Affaires Juridiques adressée aux Recteurs le 6 juin 2005 indique bien que tous les candidats, venant du privé comme du public, « /doivent (…) respecter à la fois le cadre laïque dans lequel se déroulent les épreuves et les règles propres à l'organisation des examens/ ». Ce texte n'envisage que le cas des établissements publics accueillant des élèves du privé. Pourtant, à cette date, des établissements privés participaient déjà à l'organisation du baccalauréat et il n'est – évidemment – pas fait mention de règles différentes pour ces centres d'examen. En effet, comment pourrait-on justifier une différence de règlement en fonction des centres, puisque tous doivent remplir la même mission de service public, dans les mêmes conditions d'exécution, pour un même examen national ?
 On ne saurait minorer ce problème en arguant du fait que la présence de signes religieux dans une salle d'examen ne gêne en rien les candidats. Le respect de la laïcité est une question de principe. On peut douter, par ailleurs, du bien-fondé d'un tel argument. N'est-il pas gênant en effet que des élèves du public à qui on a expliqué tout au long de leur scolarité que l'État qui allait leur délivrer le baccalauréat était un État laïque en passent les épreuves dans des salles d'examen ornées de signes religieux ? N'est-il pas gênant d'interroger des candidats sur les Lumières sous le signe de la croix ? N'est-il pas gênant que des professeurs de Lettres, de Philosophie ou de Sciences de la Vie et de la Terre renoncent à des questions qu'ils auraient posées dans un contexte neutre, de crainte que le candidat n'adapte sa réponse à ce qu'il peut croire être les convictions confessionnelles de son examinateur ?
 Peut-être pourrait-on retourner la question : est-ce si gênant, lorsqu'on organise des épreuves du baccalauréat, de retirer temporairement les signes religieux des salles d'examen ?
 C'est pourquoi, Monsieur le Ministre, nous vous demandons de veiller à ce que, dès la prochaine session du baccalauréat, les locaux des établissements centres d'examen soient conformes à l'obligation de neutralité religieuse et d'égalité de traitement des candidats, et de donner toutes instructions en ce sens aux responsables des services d'examen. Nous voulons croire que vous mesurez les risques juridiques qui ne manqueraient pas de découler de toute situation contraire.
 Veuillez agréer, Monsieur le Ministre, l'expression de notre considération distinguée.

Monique Vézinet
 Présidente nationale de l'UFAL

Marie Perret
 Responsable du secteur Ecole de l'UFAL

Claire Bottineau-Sicard et Orane Wyplosz
 Professeurs de lettres, auteurs de la tribune « «Passer le bac sous des crucifix » : Libération, le 17 juillet2009