éditoriaux

Justice et vérité

Justice et vérité

Alfred Dreyfus adopta l’écriture comme un principe de survie et un acte de vérité, soucieux de léguer à la postérité l’histoire vraie d’un homme et d’une humanité espérant dans la justice. À la dernière humiliation d’une réhabilitation complète qui lui était refusée, il opposa l’exactitude de sa parole et la langue de la vérité. Une large part de ses écrits demeurait jusqu'ici inconnue, tandis que ses livres et articles publiés semblaient définitivement perdus dans le passé. Un volume établi par Vincent Duclert et Philippe Oriol pour les Belles Lettres vient rendre justice à l'œuvre, en réunissant notamment les Lettres d’un innocent, son journal de l’île du Diable, Cinq années de ma vie. Fabula vous invite à lire un extrait de l'ouvrage… Vincent Duclert donne dans le même temps une nouvelle édition de son essai sur L'Affaire Dreyfus (La Découverte).

Pour accompagner l'exposition qui se tient à dater du 13 mars au Musée d'Art et d'Histoire du Judaïsme à Paris, le catalogue préparé par Isabelle Cahn et Philippe Oriol réunit des documents d’archives, des reproductions d'objets personnels et des témoignages, pour retracer le parcours d’Alfred Dreyfus, depuis son enfance dans une famille juive alsacienne jusqu’à sa réhabilitation en 1906.

Le capitaine Dreyfus hante également la littérature : on pourra également retrouver dans Acta fabula le compte rendu donné par Guy Jacoby de l'ouvrage d'Antoine Compagnon, Proust du côté juif (1922), ou la recension proposée par Frédérique Giraud des Lettres à Alexandrine (1876-1901) d'Émile Zola, ou encore l'article consacré par Cyril Barde à l'essai de Sophie Basch, Rastaquarium, Marcel Proust et le "modern style" : "Proust en eaux troubles"

Pendant que les champs brûlent

Pendant que les champs brûlent

Les quatre cents coups de Lorenza Mazzetti

Les quatre cents coups de Lorenza Mazzetti

Les éditions La Baconnière et Lise Chapuis poursuivent leur entreprise de traduction des œuvres de Lorenza Mazzetti. Après Le Ciel tombe, que Michaux regardait comme un livre féroce, paraissent les Carnets de Londres, un journal qui traite avec sincérité et humour des détails tragi-comiques de sa vie et ses relations avec la première avant-garde européenne du cinéma, et de ses initiatives pour filmer une adaptation de La Métamorphose de Kafka. Fabula vous invite à découvrir un extrait de l'ouvrage…

Retraduire les classiques français en italien

Retraduire les classiques français en italien

En janvier dernier, Acta fabula invitait à explorer la manière dont la traduction façonne la langue et ses usages à travers divers contextes historiques, culturels et géographiques ; pour son nouveau dossier critique, la revue des parutions de Fabula s'intéresse à la retraduction des classiques français en italien. Préparé par Francesca Lorandini et Ornella Tajani, le sommaire réunit des comptes rendus mais aussi des entretiens sur de nouvelles traductions publiées ces dernières années : de La Fontaine à Sade, de Balzac à Flaubert, de Baudelaire à Rimbaud et Apollinaire, de Camus à Céline, de Glissant à Ernaux. Comment la retraduction d'une œuvre s'intègre-t-elle dans une culture étrangère ? Quels sont les éléments stylistiques, linguistiques et rhétoriques mis en valeur ou, au contraire, délaissés ? Que nous apprend cette pratique sur la perception d'un auteur à un moment donné et son évolution au fil du temps ? Les raisons qui motivent la retraduction touchent à des domaines variés – de la philologie à la linguistique, de la sociologie de la littérature à l’histoire des idées, de l’histoire de la langue à celle de l’édition – et leur analyse met en évidence l’activité créatrice et de médiation des différents acteurs du champ littéraire. Si, comme le soulignait Antoine Berman, la traductologie doit "faire scintiller la dimension de la traduction dans toute sa multiplicité, sa profondeur et son obscurité", l’analyse des retraductions offre également un éclairage inédit sur l’histoire littéraire, permettant de réfléchir à l’évolution du canon littéraire français ainsi qu’à son rayonnement à l’étranger.

(Illustr. : La Tour de Babel, Pieter Brueghel l'Ancien, ca. 1563, Kunsthistorisches Museum, Vienne)

Nos institutions intérieures

Nos institutions intérieures

De la conversation

De la conversation

À l'initiative de Florence Dumora et Mireille Ruppli, la revue Savoirs en Prisme affiche une série de "Variations sur la conversation du XVIe au XXIe siècle en Occident", en invitant à un mouvement de réflexions sur la conversation, entendue comme échange vivant de la parole, plus ou moins codifié, à l’heure où cet acte puissamment réel, interagissant dans son principe même, s’est transformé fondamentalement. Les contributions visent à établir la nécessité de la conversation, ou au contraire son caractère dispensable, ou encore, et plus justement, les conditions et limites dans lesquelles la conversation peut être substituée, robotisée et soustraite à la construction du tissu social. Le sommaire est accessible en ligne…

Paraît dans le même temps un essai de Swann Spies, Poétique et poésie conversationnelles. Landor, Leopardi, Valéry, Claudel (Hermann), qui montre combient le dialogue littéraire, envisagé sous son mode conversationnel, est resté bien vivant dans toute l'Europe durant le premier XXe siècle. Walter Savage Landor, Giacomo Leopardi, Paul Valéry, Paul Claudel s'en emparent et y expérimentent leurs propres théories poétiques, en font le lieu d'une parole libre, rieuse, digressive et palinodique. Le dialogue littéraire opère progressivement un renouveau de sa forme et de ses fonctions afin de se reformuler soi-même comme un lieu d'instabilité et de liberté fondamentales de la prose, où la confrontation à l’autre (envisagé comme un autre soi-même) par le langage redéfinit les modalités d’une médiation dialectique de la parole, propice à l’émergence épiphanique d’une poésie conversationnelle. Fabula donne à lire l'introduction de l'ouvrage…

Consonances d'Edith Bruck

Consonances d'Edith Bruck

René de Ceccatty poursuit la traduction des œuvres d'Edith Bruck en faisant paraître Contrechamp dans la collection "Cadre vert" des éditions du Seuil : lors du tournage d’un film de fiction sur la Shoah, Linda, ancienne déportée juive hongroise, est censée aider les deux protagonistes à rendre crédibles leurs souffrances à l’écran. Parallèlement, un incident qui aurait pu n’être qu’une altercation avec un commerçant vire à la tragédie. La fable est aussi l’occasion pour la narratrice de réfléchir aux limites de la littérature, du cinéma et de la fiction en général pour décrire l’impensable. Fabula vous invite à feuilleter le livre sur le site de l'éditeur… Le recueil Les dissonances est à lire aux éditions Rivages, conçu comme une chambre d’échos où les réminiscences se répondent et se confrontent au mal qui est fait aux innocents, qu’il s’agisse de juifs, de jeunes femmes, d’enfants ou de vieillards. Les éditions Points publient de leur côté Je te laisse dormir, témoignage bouleversant d'une histoire d'amour, à travers lequel Edith Bruck évoque sa dévotion poignante à l'égard de son mari, Nelo Risi, atteint de la maladie d'Alzheimer. Entre journal et autobiographie, l'auteure replonge dans leur histoire, reconstitue le passé – notamment l’œuvre de son époux, poète et cinéaste, leur vie commune ; elle se remémore également sa propre jeunesse hongroise, sa déportation et son retour des camps.

Lire aussi les éditos de la rubrique Questions de société…

Et les éditos de la rubrique Web littéraire…

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