éditoriaux

Musique et réflexivité de la littérature

Musique et réflexivité de la littérature

Peut-on imaginer que la musique serve à la littérature de miroir ? Sous la baguette d'Alain Corbellari et Augustin Voegele, les deux revues de Fabula font paraître un double numéro sur les modalités de ce face-à-face entre littérature et musique. Du côté de Fabula-LhT, le dossier interroge les comparaisons de la littérature avec la musique proposées depuis le Romantisme, mais aussi les espaces communs aux deux arts, des pantomimes de Diderot à des pratiques actuelles. Du côté d'Acta fabula, un dossier critique vient présenter six essais récents qui mettent en lumière l'usage "autoréflexif" de la musique par des œuvres littéraires.

Le sommaire de Fabula-LhT accueille deux articles en varia : l'un sur la relation que Roland Barthes entretenait avec le surréalisme, l'autre sur la récriture des mythes par Christine de Pizan et Monique Wittig.

Résistance de Romain Gary

Résistance de Romain Gary

Comme Stendhal, Romain Gary s'est longtemps voulu dramaturge. Maxime Decout s'emploie à faire redécouvrir son théâtre : après La Bonne Moitié. Comédie dramatique en deux actes (1979), la collection Folio accueille Johnnie Cœur (1961) : le héros éponyme, jeune Texan ayant fui sa région natale, mène une vie misérable à New York. Cet idéaliste désenchanté décide d’entamer une fausse grève de la faim et de la médiatiser. Le succès ne se fait pas attendre : des foules fanatisées se pressent pour acclamer ce nouveau Gandhi qui s’oppose au matérialisme de la société de consommation et à toute forme de discrimination dans le monde. Fabula vous invite à lire un extrait de la pièce sur le site de l'éditeur… Paraît dans le même temps, toujours chez Gallimard, un essai inattendu d'Igor Krtolica, Romain Gary. De l'humanisme à l'écologie, qui revient aux Racines du ciel (Prix Goncourt 1956), dont le héros, Morel, se bat contre l’extermination des éléphants dans une Afrique en lutte pour son indépendance. Romain Gary le présentait comme "le premier roman écologique". On voit mieux aujourd'hui que ce roman anticipait les controverses qui animent la pensée écologique contemporaine, où l’humain n’est qu’une partie de la nature mais où la nature devient elle-même inséparable de l’histoire, de la société et de la politique. Fabula donne également à lire un extrait de l'ouvrage…. Igor Krtolica accompagne cet essai d'une édition commentée du chapitre XXVIII des Racines du ciel sous le titre Antifascisme, humanisme et écologie (Presses Universitaires de France), dont on peut aussi découvrir un extrait…

Florides helvètes

Florides helvètes

Inaugurée à Lausanne en 1978, douze ans après la création des Éditions L’Âge d’Homme par Vladimir Dimitrijević, la collection "Poche Suisse" a accueilli plus de trois cents titres dévoilant le riche héritage du patrimoine littéraire suisse. La majorité des titres étant épuisés depuis longtemps, l'Association Florides helvètes, qui prend son nom d’un recueil de Charles-Albert Cingria – a racheté ce riche catalogue en novembre 2021, avec l'ambition de valoriser et de promouvoir ce patrimoine littéraire, notamment par l’édition en français d’ouvrages des quatre littératures suisses. Plusieurs volumes paraissent depuis lors tous les ans, dans des textes revus et enrichis de préfaces inédites pour les volumes les plus anciens, la collection s’ouvrant aussi à d’autres textes d’auteurs marquants du paysage littéraire et intellectuel suisse. Parmi les derniers titres parus, signalons L'après-midi à la campagne et autres textes sur l'art et le théâtre de Fernand Chavannes, dans une édition établie par Joël Aguet, et Ma vie de Thomas Platter, l’une des autobiographies les plus accomplies d’un humaniste de la Renaissance, qui nous plonge dans l’époque bouillonnante d’Érasme et de Holbein, au fil d’une existence aventureuse régie par l’amour de la connaissance, préfacée par Pierre-Olivier Walzer.

Claude Simon tient la corde

Claude Simon tient la corde

Mireille Calle-Gruber fait paraître aux éditions de Minuit les deux premiers livres de Claude Simon Le Tricheur et La Corde raide, publiés au Sagittaire en 1945 et 1947, soit une dizaine d’années avant Le Vent qu’il considérait comme sa véritable entrée en littérature. On y découvre, déjà en place, les grands motifs de l’œuvre à venir. Dans Le Tricheur : une fugue tragique et sans issue, celle de deux amants à travers la France. Dans La Corde raide : l’enfance, Barcelone pendant la guerre d’Espagne, la débâcle de 1940, restitués sous forme fragmentaire et puissamment réflexive. Saluons aussi la parution, toujours par les soins de Mireille Calle-Gruber de la Lettre de Claude Simon à Federico Mayor sous le titre Mon travail d'écrivain n'autorise à mes yeux aucune concession (éd. Le Chemin de fer), où le romancier proclame sa foi en la puissance de la littérature lorsque l'écrivain se tient tout entier à son métier d'écrire qui est avant tout une éthique. Une foi en une littérature sans concession et sans condition, capable de changer la vie.

(Illustr. : Claude Simon entouré de ses peintures, vers 1941 ©Musée de La Piscine)

L'homme qui aimait les lettres

L'homme qui aimait les lettres

"Tout au long de notre vie, écrivait François Truffaut, nous devenons des personnes différentes et successives, et c’est ce qui rend tellement étranges les livres de souvenirs. Une personne ultime s’efforce d’unifier tous ces personnages antérieurs". Les recueils de lettres se dispensent d'un tel effort. Nous avions pu découvrir voici trois ans sa Correspondance avec des écrivains, depuis sa première lettre de jeune cinéphile à Jean Cocteau, en 1948, jusqu’à sa disparition prématurée en 1984. Paraît aujourd'hui sa Correspondance avec des cinéastes. Ce sont ici trente années d’échanges avec les grands anciens (Ophuls, Clouzot…), ses confrères de la Nouvelle Vague (Rivette, Rohmer, Godard…), ses contemporains (de Paula Delsol à Bertrand Tavernier, de Kubrick à Wenders, d’Agnès Varda à Marcel Ophuls…) et ces jeunes talents qu’il prend le temps de conseiller entre les voyages et les tournages. Autant d’éclats sur cette passion vive qui anime Truffaut depuis l’enfance et ses Quatre Cents Coups, les coulisses de la création et de toute une époque, les amitiés et les filiations. Fabula donne à lire un extrait du volume…

Rappelons l'édition de la correspondance de Truffaut avec Helen Scott sous le titre "Mon petit Truffe, ma grande Scottie" (Denoël), ainsi que la Lettre ouverte à François Truffaut signée par Éric Neuhoff (Albin Michel) et la réédition de La leçon de cinéma dans la collection Champs de Flammarion, mais aussi, dans la seconde livraison de Fabula-LhT, "Ce que le cinéma fait à la littérature (et réciproquement)", de l'essai de Tom Conley traduit par Audrey Evrard "Aux sources de la Nouvelle Vague : Lecture des Mistons", le court métrage (1956) de Truffaut adaptée de la nouvelle de Maurice Pons.

L'art est dans la rue

L'art est dans la rue

Le Musée d'Orsay donne à voir jusqu'au 6 juillet un ensemble exceptionnel de près de 230 affiches illustrées. Co-organisée avec la Bibliothèque nationale de France, l'exposition "L’art est dans la rue" interroge l’essor spectaculaire de l’affiche illustrée à Paris, dans la seconde moitié du XIXe siècle, et réunit tous les "maîtres de l’affiche" : Bonnard, Chéret, Grasset, Mucha, Steinlen, Toulouse-Lautrec… Conçu comme une plongée saisissante dans l’univers visuel de la ville du XIXe siècle, le parcours retrace l’âge d’or de l’affiche artistique en analysant les mutations sociales et culturelles qui ont favorisé son développement, dialoguant avec un ensemble unique d’affiches, peintures, photographies, costumes, sculptures et objets d’art décoratif qui évoquent l’univers effervescent de la rue au tournant du siècle. Le catalogue en est établi par Élise Dubreuil et Clémence Raynaud. Le fonds d’affiches du département des Estampes et de la photographie de la BnF comptant environ 300 000 pièces, on peut aussi découvrir sur Gallica une sélection des œuvres des grands maîtres de l'affiche, où l'on retrouvera l'affiche de Jules Chéret "Aux Buttes Chaumont. Jouets et objets pour étrennes", placardée sur les murs de Paris à la fin du XIXe s., avant d'être accrochée dans le salon de Rachel et Monica, et de devenir l'un des accessoires cultes de la série Friends.

Solitaire Louise

Solitaire Louise

Louise Ackermann (1813-1890) fut, pour ses contemporains, une autrice d’une originalité déconcertante : loin des thèmes sentimentaux qui, au XIXᵉ siècle, échoient aux poétesses, elle a forgé une œuvre à la croisée de la poésie, de la philosophie et de la science, dont le lyrisme exprime une quête ardente de vérité. En résulte une voix unique qui dialogue avec Blaise Pascal et Auguste Comte, refuse les consolations religieuses et pose frontalement la question de l’absurdité de l’existence. Yohann Ringuedé édite pour la collection GF-Flammarion le recueil Poésies philosophiques (1871), ainsi que deux textes autobiographiques, Ma vie et Pensées d’une solitaire, le recueil de jeunesse Premières poésies, ainsi que de nombreux comptes-rendus critiques d’époque. Fabula vous propose de feuilleter le volume…

Lire aussi les éditos de la rubrique Questions de société…

Et les éditos de la rubrique Web littéraire…

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