éditoriaux

Les nouveaux fakirs

Les nouveaux fakirs

Après Voir l’invisible. Histoire visuelle du mouvement merveilleux-scientifique 1909-1930 (Champ Vallon, 2023), couronné par le Grand Prix Jules Verne et dont Christophe Becker a rendu compte pour Acta Fabula dans un article intitulé "Invisible Spectrum", Fleur Hopkins-Loféron publie Les nouveaux fakirs (PUF). À Paris à la fin des années 1920, le spectacle et l’extraordinaire sont à l’honneur : entre les corps frénétiques de la Revue Nègre et les corps hachés menus du Grand-Guignol, ceux des fakirs, qui se multiplient, misent sur l’érotisme d’une enveloppe invincible et incorruptible. Dans les salles de music-hall, envahies de vapeurs d’encens et d’éther, les uns s’enterrent vivants tandis que les autres se percent les joues ou s’allongent sur des sabres. La foule accourt pour assister à ces scènes de douleur… À travers la figure quasi légendaire de Tahra Bey, "homme aux yeux étranges" à la source du Ragdalam de Hergé, c’est tout un pan oublié de l’histoire des spectacles, de la starification et de l’occultisme qui se donne à voir : ce "fakir-docteur" se fait le prosélyte d’une nouvelle pseudo-science et singe bien volontiers la Passion du Christ. C’est sans compter sur un irréductible cercle anti-fakir, mené par Paul Heuzé, qui se lance dans une guerre sans merci contre l’obscurantisme. Abus de la crédulité publique, escroqueries et fausses sciences marquent le parcours de ces nouveaux fakirs, qui n’ont rien à envier à nos gourous contemporains. Fabula vous invite à lire un extrait de l'ouvrage…

L'humeur révolutionnaire

L'humeur révolutionnaire

Les ouvrages sur la Révolution française partent généralement de juillet 1789 pour désigner dans les décennies précédentes les événements qui conduisirent à la prise de la Bastille. Dans L'humeur révolutionnaire. Paris, 1748-1789 (Gallimard), Robert Darnton arrive à juillet 1789 en partant de la multitude d’agitations, de troubles, d’insurrections qui parcoururent le royaume, et Paris tout particulièrement. Pourquoi aucun de ces moments ne donna-t-il lieu à l’équivalent de la prise de la Bastille ? Darnton, à travers le système d’information si particulier au petit peuple du XVIIIᵉ siècle — rumeurs, nouvelles orales ou à la main, épigrammes et chansons pornographiques contre la Cour, gazettes venues de l’étranger ou tracts parisiens —, reconstitue les cycles de violence du XVIIIᵉ s. L’humeur révolutionnaire : c’est-à-dire la haine du despotisme, la résistance face à l’inégalité devant l’impôt, et la confiance dans les pouvoirs de la raison et des Lumières. Fabula vous invite à feuilleter l'ouvrage…

Paraît dans le même temps un essai de Jean-Jacques Tatin-Gourier, Le complot en partage (Hermann), qui s'attache à montrer comment certains révolutionnaires –  de Camille Desmoulins à Robespierre et son entourage  – ont envisagé l’élaboration d’une histoire de la Révolution comme continuum de complots. Dans quelle mesure le contre-révolutionnaire Barruel s’est-il inscrit –  avec les redéfinitions qui lui sont propres  – dans le sillage de cette promesse montagnarde d’une histoire de la Révolution française conçue comme chaîne monstrueuse de complots  ?

Les éditions Amsterdam rééditent de leur côté Les Jacobins noirs de C. L. R. James, qui raconte la seule révolte d’esclaves qui ait réussi, la première lutte anticoloniale de l’histoire et les obstacles immenses dont elle a dû triompher.

Traversées de Paris

Traversées de Paris

Paris est un labyrinthe littéraire dans lequel il fait bon se perdre aux côtés des plus grands écrivains. Le ventre de Paris, les galeries, les rues et les cafés, la Seine et les bouquinistes, et puis Notre-Dame, qu'on croyait éternelle… Saurions-nous pour autant situer Zola, Céline, Aragon dans la Ville Lumière si nous ne disposions de leurs écrits et de la collection si particulière de l’agence Roger-Viollet ? Dans Un abécédaire littéraire parisien, d’Aragon à Zola, préfacé par Antoine Compagnon, Jean-Noël Mouret nous invite à partir dans un Paris tout en entier pavé de mots. Fabula donne à lire un extrait de l'ouvrage…

Une encyclopédie du livre illustré

Une encyclopédie du livre illustré

Depuis les publications fondatrices de Michel Melot, Ségolène Le Men ou Philippe Kaenel dans le domaine francophone, les travaux sur le livre illustré n’ont cessé de se développer, soulevant tant des questions historiques et esthétiques que des questions intermédiales qu’exemplifie cet objet réalisant la coprésence du texte et de l’image. L’essor des recherches sur l’illustration et l’édition, l’accessibilité numérique des corpus, l’impact de l’histoire culturelle et de la culture visuelle, de l’histoire sociale ou de l’anthropologie visuelle ont étendu le périmètre de ce champ. En un millier de pages et deux cent trente notices rédigées par plus de vingt spécialistes, le Dictionnaire encyclopédique du livre illustré (France, XIXe-XXIe siècle) supervisé par Philippe Kaenel et Hélène Védrine pour les Classiques Garnier permet de cerner les concepts et les termes spécifiques propres à la notion de "livre illustré", dans le cadre de l’histoire matérielle et culturelle de l’édition. Fabula vous invite à découvrir la Table des notices…

(Illustration : William Nicholson, Almanach de douze sports,1898. ©BCU Lausanne)

On n'oublie pas Jérôme

On n'oublie pas Jérôme

On n'est pas prêt d'oublier le dernier Masque de Jérôme Garcin, dont on peut réécouter l'enregistrement sur l'application de Radio France, ou relire le récit qu'en a donné Pierre Assouline sur son blog La République des livres. Ce départ s'était accompagné d'un livre sobrement intitulé Écrire et dire (Éditions des Équateurs), où l'irremplaçable animateur raconte son histoire familiale, les drames qui l'ont frappé depuis l’enfance, sa passion presque thérapeutique pour les chevaux et l’écriture, le lien mystérieux entre les deux. Il nous parle des personnages intimes ou mal connus, aux vies souvent trop brèves, qui peuplent ses livres. Et revient sur les grands moments de sa vie publique, d’homme de radio, de télévision et de journaux. Jérôme Garcin fait aujourd'hui paraître un essai Des mots et des actes. Les belles-lettres sous l’Occupation (Gallimard) : une revue d’effectifs qui s’appuie sur une connaissance fine des sources de l’histoire littéraire, où il s'agit pour celui qui a grandi dans ce théâtre de signes d'ajuster son regard et le nôtre sur une époque en clair-obscur. Car on a beau se garder de vouloir porter des jugements après coup, se répéter que le dossier est documenté depuis longtemps, on ne peut s’empêcher d’éprouver un persistant malaise à l’évocation de cette arrière-cour des catalogues et à l’égard de cette ignorance feinte, voire d’une certaine complaisance, sur laquelle ont pu et pourraient encore reposer certaines de nos passions littéraires… Fabula donne à lire un extrait de l'ouvrage…

L'histoire littéraire selon Gilson

L'histoire littéraire selon Gilson

On ne le lit plus guère, pour ne pas dire pas du tout, et on va peut-être le découvrir : le troisième volume des Œuvres complètes d'Étienne Gilson (1884-1978) vient regrouper ses essais de Littérature et philosophie (Vrin), à la croisée de l’histoire de la philosophie et les études littéraires. Si l’écriture historienne évoque les trajectoires intellectuelles d’Héloïse, Dante, Rabelais, Du Bellay, Ronsard ou encore Pascal en mettant en évidence les motifs philosophiques lovés au cœur de leurs œuvres littéraires, le travail de critique littéraire prolonge ce mouvement et considère des œuvres plus récentes, celles de Charles Baudelaire, Joris-Karl Huysmans, Paul Claudel, Charles Du Bos, Charles Ferdinand Ramuz ou encore François Mauriac. Outre une trentaine d'articles, le sommaire offre quatre monographies parues entre 1923 et 1974 : Les Idées et les Lettres (1932), qui réunit les premières recherches menées dans le domaine de l’histoire littéraire ; Héloïse et Abélard (1938), livre issu d’un cours professé en 1936-1937 au Collège de France ; Dante et la philosophie (1939) première incursion dans les études dantesques, qui sera prolongé bien des années plus tard par l’ouvrage Dante et Béatrice (1974) ; enfin, L’école des muses (1951), ouvrage qui mène une réflexion singulière sur la genèse des œuvres littéraires.

Autobiographie de la bibliothèque

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