éditoriaux

Intempestif XIXe siècle

Intempestif XIXe siècle

Enseigner la littérature du XIXe siècle, mission impossible ? Ce siècle qu’on associait, il y a peu encore, à la modernité des révolutions (politique, sociale, esthétique), et donc à un socle de valeurs dont notre société serait l’héritière, s’éloignerait de nous non véritablement en raison du temps qui passe, mais parce qu’il incorporerait des contenus, des pratiques et des discours subitement devenus inconcevables pour les mentalités contemporaines– et à ce titre il serait devenu fatalement réfractaire à toute pédagogie. La nouvelle collection "Le fond de l'air" des Colloques en ligne de Fabula accueille les actes d'un colloque tenu à l'Université de Strasbourg en novembre 2023, réunis par Victoire Feuillebois et Bertrand Marquer sous le titre Le XIXe siècle : actuel ou intempestif ? Comprendre, enseigner, transmettre la littérature du XIXe siècle. Ce recueil de textes a pour objectif de regarder en face les "difficultés" que posent le XIXe siècle et de faire un bilan des approches critiques et herméneutiques qui permettent d’y répondre en contexte pédagogique. Il cherche moins à relancer une polémique qu’à considérer ces débats comme une opportunité de réfléchir aux héritages et aux partages possibles autour de cette littérature parfois perçue comme intempestive et qui reste néanmoins cardinale dans les pratiques de lecture et d’enseignement.

(Illustr. : The White Rabbit, Alice’s Adventures in Wonderland (1865) de Sir John Tenniel)

Monter avec Tram

Monter avec Tram

Disparu en août 2023, Pierre Alferi nous revient avec un récit inédit que publie son fidèle éditeur POL sous le titre L'imprudent. Une succession de brefs chapitres évoque l’existence d’un personnage troublant, ses métamorphoses étranges comme sa vie la plus familière, jusqu’à l’obscénité parfois : Tram, enfant abandonné, n’a pas de visage. Né d’inconnus, à peine a-t-il un nom. Parfois à une voyelle près, Tram ou Trom. Pourtant Tram est un personnage, il affirme, par défaut ou par inadvertance, ce qu’on peut appeler son caractère, en dépit d’incroyables mutations, performances, mutilations, transplantations dans l’espace et le temps. Dans un récit qui n’est pas sans rappeler le roman anglais du XIXe siècle, ou encore la littérature jeunesse, le récit surréaliste, ou les "aventures" sadiennes, Pierre Alferi multiplie les épreuves de son personnage, rencontres, travaux, expériences. Tram est tour à tour inquiet, morose, crédule, timide, poli, sujet à de violents accès de compassion, tendre et docile à l’excès. Fabula vous invite à découvrir quelques pages du livre… Les mêmes éditions POL rééditent au format de poche Chercher une phrase, un essai initialement en 1991 dans la collection “Détroits” chez Christian Bourgois, alors dirigée par Jean-Christophe Bailly, Michel Deutsch, et Philippe Lacoue-Labarthe), et très vite devenu un classique de la pensée de l'écriture. Acta fabula avait rendu compte d'une précédente réédition dans le numéro anniversaire de sa première décennie : "Petit traité de l'écrire. Une théorie de la phrase", par Marc Escola… Rappelons que la revue Catastrophes a consacré l'une de ses livraisons à l'œuvre poétique de Pierre Alferi, au sein d'un sommaire qui offre aussi un long poème collectif et transnational, "Le peuple du Rhône", et une partie magazine avec inédits et traductions. Et saluons encore le volume initié par Jeff Barda et Philippe Charron, Pierre Alferi. Une Pratique Monstre (Les Presses du Réel).

(Illustr. : Pierre Alferi, Fanny de Chaillé dans Répète, Festival Faits d’hiver, 2015, photo ©Delphine Micheli)

Mythistoire barragouyne

Mythistoire barragouyne

On dirait un titre forgé par quelque membre de l'Oulipo, mais le livre nous vient de la fin de la Renaissance : la Mythistoire Barragouyne de Fanfreluche et Gaudichon de Guillaume Des Autels que rééditent Michèle Clément et Jean-Charles Monferran pour l'indispensable Société des Textes Français Modernes, est un court roman d’inspiration rabelaisienne, à la fois parodie de récit d’initiation et parodie de roman sentimental. Ce récit comique, aussi trivial que savant ouvre une fantaisiste fenêtre sur les débats d’idées de la France humaniste. Sa singularité ? Raconter d’abord l’histoire de Fanfreluche, dame de la Creuse, fortement déterminée par l’usage sexuel de ses "fanfreluches", puis l’histoire de Gaudichon, le jeune héros itinérant et étudiant en droit ; les deux personnages se rencontrent à la toute fin du récit et leur histoire d’amour, qui était le sujet annoncé du roman, nous est alors promise "au second livre", qu’on ne verra jamais. Le récit est mis dans la bouche de Songecreux, serviteur des deux héros et narrateur impertinent. La matière est comique, souvent triviale, parfois savante quand le roman devient un campus novel, décrivant la vie universitaire de Gaudichon… La matière est hétéroclite, le réalisme alterne avec la mythologie mais tout est vrai car "celuy qui se veut mesler d’escrire une histoire, doit sur tout avoir devant les yeux, qu’il n’escrive rien qui ne soit vray"… Fabula donne à lire un chapitre de l'ouvrage avec l'amicale autorisation des éditeurs.

(Illustr. : page de titre de l'édition de 1572)

Valéry reste au Collège

Valéry reste au Collège

Deux nouvelles terres dans Archipel Essais

Deux nouvelles terres dans Archipel Essais

Riche de plus de trente titres, la collection Archipel Essais permet chaque année aux meilleurs mémoires de Master soutenus à l'Université de Lausanne de devenir de véritables essais. Elle accueille ce mois-ci deux nouveaux titres : Se faire témoin. Une lecture pragmatique de Primo Levi et Charlotte Delbo, signé par Diane Kalms et préfacé par Gilles Philippe, qui interroge les choix stylistiques divergents des deux survivants pour poser cette question délicate : la mission du témoin est-elle la même lorsque l’on a été déporté pour ses origines juives ou pour son engagement politique ? Fabula vous invite à découvrir sa Table des matières et à lire la Postface de Gilles Philippe, "Se taire avec des mots"… Dans Poétique de la bestialité, sous-titré Une esquisse littéraire des marges érotiques et ontologiques, de Sade à Rachilde, Aimé Guex se demande ce qu'est la bestialité : un synonyme de l’animalité ? L’abandon de nos qualités humaines pour embrasser une nature bestiale ? Pendant des siècles, ce mot définissait toutefois un autre rapprochement, bien plus troublant, entre l’humain et l’animal : la relation sexuelle interespèce, dénommée aujourd’hui zoophilie. À travers les époques, les sciences théologiques, juridiques et médicales ont successivement étudié cette relation au summum de l’immoral. À l’aune de ces domaines, la bestialité est aussi devenue un objet littéraire et esthétique, dans une période qui touche la fin de l’Ancien Régime à celle du XIXe siècle. Fabula donne à lire la Postface de Dominique Kunz Westerhoff.

La traduction du monde

La traduction du monde

Destination Ruritanie

Destination Ruritanie
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