Acta fabula
ISSN 2115-8037

2006
Juin-Juillet 2006 (volume 7, numéro 3)
Mélanie Potevin

Étrangère en son oeuvre

Porfirio Mamani Macedo, Flora Tristan : La paria et la femme étrangère dans son œuvre, de, L’Harmattan, coll. « Approches Littéraires », 2003, 69 p.

1Fille naturelle d’un noble péruvien et d’une française de la bourgeoisie parisienne, Flora Tristan (1803-1844) fut l'une des figures majeures du débat social dans les années 1840, et participa aux premiers pas de l'internationalisme. Malgré quelques ouvrages critiques, elle reste cependant assez méconnue des français. On ne peut donc que saluer l’ouvrage de Porfirio Mamani Macedo. Né à Arequipa (Pérou) en 1963, Mamani Macedo a soutenu une thèse de doctorat à l’université de Paris III en littérature latino-américaine. Dans son essai, il met en valeur l’élément majeur de la vie de Tristan : le combat social. Le livre s’articule autour de trois axes, qui s’appuient principalement sur trois textes publiés par  Flora Tristan de son vivant : Nécessité de faire bon accueil aux femmes étrangères (1835), Pérégrinations d’une paria (1838) et Promenades dans Londres (1840).

2Dans un premier temps, Mamani rappelle les éléments qui ont amené Flora Tristan à se définir comme une paria et à le revendiquer afin de faire valoir ses droits. Cette partie s’appuie principalement sur des remarques d’ordre biographique : l’échec de son mariage, la difficulté à se trouver une identité française ou péruvienne, le voyage entrepris au Pérou, qui se solde par le rejet de la famille paternelle. C’est ce qu’elle relate dans Pérégrinations d’une paria, publié en 1838.

3Dans un deuxième temps, Mamani analyse l’importance des voyages dans la vie de Tristan à commencer par son voyage au Pérou. Il parle alors de Flora Tristan comme d’une véritable enquêtrice sociale lorsqu’il s’agit d’observer l’accueil réservé aux étrangers, et plus particulièrement aux femmes, que ce soit au Pérou et même, par la suite, en Angleterre. (Promenades dans Londres, 1840).

4Enfin, le texte se clôt par une dernière partie sur la conversion de Flora Tristan en véritable militante, (Nécessité de faire bon accueil aux femmes étrangères).

5Le principal intérêt de l’ouvrage de Mamani est d’avoir révélé une femme aux idées très progressistes pour l’époque qui a donné sa vie pour une évolution de la société. Soulignons également une très bonne connaissance de l’œuvre de Flora Tristan : Mamani part vraiment des textes et des éléments biographiques pour faire son analyse.

6Cependant, ce texte mérite quelques critiques de caractère méthodologique. On regrettera tout d’abord l’absence de références au contexte de l’époque alors que Flora Tristan a été au contact de personnalités comme George Sand, Pauline Rolan ou Victor Hugo. Ensuite, Mamani cite beaucoup les textes de Flora Tristan mais ne s’en détache pas vraiment. Les remarques tombent donc souvent dans la paraphrase et dans la répétition ou bien restent trop anecdotiques. Enfin, le plan choisit n’amène pas de réflexion sur l’impact effectif de Tristan après sa mort prématurée. Certes, Mamani a fait le choix, dès le départ, d’arrêter son analyse à l’œuvre elle-même, mais étant donné l’importance biographique dans les choix de Tristan, on en attendrait une plus grande mise en valeur.

7Ainsi, cet ouvrage révèle certes de manière concise quelques traits de la vie et de l’œuvre de Flora Tristan mais l’ensemble reste trop confus et ne permet pas au lecteur – averti ou non – de contempler la tâche entreprise par cette femme hors du commun.