Compte rendu publié sur Acta fabula (mai 2024, vol. 25, n° 5) : "Écrire et méditer le voyage à l’étranger : le cas Maurice Barrès" par Julie Moucheron
Reposant sur l’exploitation du riche fonds de la BnF, cette étude rouvre le dossier de Maurice Barrès (1862-1923), écrivain aujourd’hui relativement tombé dans l’oubli. Les écrits de voyage, articles, essais, romans ou nouvelles, permettent d’aborder l’auteur dans toute sa complexité et ses contradictions, ainsi que de le replacer dans une histoire littéraire allant de Chateaubriand à Gide et incluant bien des journalistes contemporains peu connus.
À partir du cas de Barrès, il s’agit d’interroger ce qu’est le voyage pour un homme de lettres de la Belle Époque qui, après l’ère des Romantiques, en pleine époque symboliste, défend une esthétique des « yeux clos » en réaction au naturalisme et s’oppose au pittoresque des images, puis qui devient l’une des voix majeures du nationalisme. Comment dès lors comprendre la sortie de l’écrivain de son cabinet de travail, le fait d’arpenter le monde muni de carnets ?
Le volume tend ainsi à saisir la manière dont un lettré fait du voyage non seulement un des moyens réguliers de remettre en mouvement ses idées et ses images, mais aussi un élément central de sa scénographie auctoriale et de sa relation à la société de son temps.
TABLE DES MATIÈRES
Remerciements
Remarques sur les éditions et les transcriptions de manuscrits
Introduction :
« Quand Barrès s’éloigne… »
PREMIÈRE PARTIE.
ÉCRIRE EN VOYAGE. LE PÈLERIN D’ART COSMOPOLITE
Introduction de la première partie. « Les bénéfices du voyage »
Chapitre premier :
Voyager pour écrire ? Faire carrière dans les lettres dans les années 1880
La bibliothèque contre le voyage. Le modèle des parnassiens
Nouvelles figures de l’écrivain voyageur : le reporter colonial et l’esthète anglophile
Des bourses de voyage pour les littérateurs !
L'essai de psychologie de Bourget : Stendhal ou du cosmopolitisme
Chapitre II :
La renaissance par l’Italie (1887). De la culture de voyage
La culture salvatrice
La société des cosmopolites
La bibliothèque de voyage – le rayon des guides artistiques
Écrire en voyage. De l’atelier portatif et des genres littéraires
Chapitre III :
Venise, un lieu d’écriture
Le second voyage en Italie (1888) ou la création d’une ville manifeste
Un lieu de signature
Poétique de la variation : mémoire et sensations
Chapitre IV :
Dans les brumes du Nord. Les formes brèves de l’écriture
de voyage
Des pèlerinages artistiques en Allemagne : 1887, 1890, 1891,
1892
Un homme de lettres, conférencier en Belgique
Journalisme et commande éditoriale
Chapitre V :
L’Espagne de 1892. Un renouveau de l’esthétique
Dans les pas des mystiques espagnols
De l’art métaphysique et de l’expérience sensible
Des taches d’encre aux taches de sang. La fin de la carte
du tendre
Réécrire Gautier. Contre « le superficiel du romantisme »
Chapitre VI :
Des guides de pèlerinages égotistes
Guide et roman
Le recueil, un guide égotiste
Créer de nouveaux pèlerinages ou le contre Taine de Barrès
La littérature et la vie. Une communauté amicale
Chapitre VII :
Du cosmopolitisme
« Vengo adesso di Cosmopoli ». De la société cosmopolite
Le roman ou l’art poétique du transfert culturel
Frontières du cosmopolitisme barrésien
Un cosmopolitisme hors du monde ?
DEUXIÈME PARTIE.
ÉCRIRE LE VOYAGE AU TEMPS DU RÉCIT NATIONAL
Introduction de la deuxième partie. « Heureux qui comme Ulysse… »
Chapitre VIII :
Inachèvement et hiérarchie. Le voyage en Espagne de 1895
La circulation des idées politiques : l’enquête sur les tendances fédéralistes
Les cahiers d’écolier
La hiérarchie des chantiers littéraires
Un voyage à longue portée. Le Greco
Chapitre IX :
Jeux de réécriture. Voyage et cosmopolitisme dans « Le Roman de l’énergie nationale »
Une écriture genrée du déracinement
De la valeur structurante des voyages. « L’Appel au soldat »
De la force polémique des images. « Leurs figures »
Chapitre X :
Reprendre ses notes. De « La Mort de Venise » au « Greco »
(1896-1912)
Critique littéraire et création. « Sur la mort de Venise »
(1896-1899)
« L’aile du Non-Écrire ». Le temps des abandons (1900-1901)
Un monde en perpétuel mouvement. « Ça [re]prend »
Chapitre XI :
Un « Chateaubriand pince-sans-rire »
Ériger des lieux de mémoire
Le « pince-sans-rire »
De l’ethos à la posture
Chateaubriand contre Maurras
Une structure courtoise de la création « D’un couple à l’autre »
Voyageur romantique versus voyageur classique
Chapitre XII :
De l’âme et du corps. En Égypte (1907-1908)
Promouvoir Héliopolis
« Le jeu de saute-mouton »
« Découvrir le divin dans le monde ». La leçon de Renan
Du corps de l’écrivain
Des contrats d’édition
Les gestes de la création. Des cahiers au dossier
Un « pendant » inachevé au « Voyage de Sparte »
Chapitre XIII :
D’un Orient l’autre. Enquête et rêverie musicale, le rythme
de l’atelier
Le voyageur en enquêteur
Jeux de lignée. Vers l’Orient spirituel des romantiques
Parole agissante ou littérature hors du monde
Être de son temps ou antérieur ? Temps politique et
histoire littéraire
Éditer les voyages. Le livre illustré à l’heure de l’enquête
Conclusion. La littérature de voyage, pour quoi faire ?
Chronologies :
Chronologie 1. Les voyages
Chronologie 2. « Pour paraître prochainement »
Bibliographie sélective
Index des noms de personnes
Table des illustrations