
Jocelyne Dakhlia, Harems et Sultans. Genre et despotisme au Maroc et ailluers, XIVe-XXe siècles
Sitôt prononcé le mot « harem », surgissent des images de femmes lascives, cloîtrées dans la pénombre en attente du bon vouloir du prince. C’est aussi l’expression exemplaire du gouvernement de sultans réputés exercer leur pouvoir sous l’emprise de pulsions quasi pathologiques. Ces poncifs, que l’on pourrait croire éculés, entrent aujourd’hui encore en résonance avec la conception d’un monde islamique figé et politiquement inepte, fatalement voué au despotisme et à l’oppression des femmes.
Jocelyne Dakhlia entreprend dans cet ouvrage une archéologie de ces motifs à partir de l’histoire du Maroc, de la fin du Moyen Âge au XXe siècle. Il s’agit ici de mobiliser à nouveaux frais l’ensemble de la documentation disponible, tant picturale que textuelle, afin de procéder à une histoire fine du genre et du politique en Islam, de remettre en mouvement des logiques historiques là où l’historiographie se faisait plus sommairement culturaliste.
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On peut lire sur en-attendant-nadeau.fr un article sur cet ouvrage :
"Une « contre-histoire » du monde musulman", par M'hamed Oualdi (en ligne le 12 novembre 2024)
Dans cette œuvre majeure et magistrale, l’historienne et anthropologue Jocelyne Dakhlia va à l’encontre des stéréotypes de « harem » et de « despotisme oriental » pour démontrer, en trois volumes, comment jusqu’à la fin de l’époque moderne les pouvoirs en Islam, et notamment le sultanat du Maroc, étaient façonnés par de multiples acteurs, y compris par des femmes des sérails. Cette œuvre invite à une lecture plus dynamique de cette histoire, qui prêterait attention notamment à la grande fluidité de genre entre le masculin et le féminin jusqu’à l’imposition d’une hétéronormativité à l’époque coloniale.