
Traduit de l’italien par Lise Chapuis
«Bruits d’hommes, grincements, enfants, poulies, tout cela interrompu par la sirène sourde des bateaux qui passent et des péniches qui envahissent le fleuve, chargées de marchandise. Je m’appuie sur le muret et je vois les grues à l’œuvre tandis qu’elles prennent les sacs sur les péniches et les portent à l’intérieur des maisons numérotées qui m’avaient effrayée la veille au soir. C’est un concert magnifique de sons et de cris. Mes deux acteurs, sourds et muets, ne l’entendront pas et le monde bruyant se taira devant leurs regards. Qu’est-ce que je veux dire avec tout ça?»
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Née à Rome le 26 juillet 1927 et morte dans la même ville le 4 janvier 2020, Lorenza Mazzetti était écrivaine, réalisatrice et peintre.
Jeune adulte, elle émigre à Londres où elle fréquente la Slade School of Fine Art. En volant du matériel à l’école, elle réalise son premier film, K, d’après La Métamorphose de Franz Kafka. Lorenza Mazzetti cofonde le Free Cinema au milieu des années 1950 aux côtés de Lindsay Anderson, Tony Richardson et Karel Reisz. Son film Together sera projeté lors du premier événement du mouvement.
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Revue de presse
Carnet de Londres, fragments de vies dans L’Italie à Paris…
«Finalement, cet ouvrage est une ode au cinéma, une ode à l’amour mais, surtout, une ode à la vie. Ode au cinéma, car il nous fait témoins de l’évolution du cinéma anglais d’après-guerre. Ode à l’amour, car il ne cesse de rappeler qu’“il est important d’avoir un amour pour être vivant” (p.49). Ode à la vie, car malgré les épreuves, l’espoir renaît toujours. Le Carnet de Londres de Lorenza Mazzetti n’est pas un simple récit autobiographique, il est le récit de plusieurs vies; la sienne, la nôtre, celle de toutes celles et ceux qui luttent et rêvent les yeux grand ouverts.» – Colleen Guérinet
Carnet de Londres dans La viduité…
«La découverte éperdue du cinéma dans les années 1950 par une jeune femme d’une enthousiaste tristesse, d’une apparente naïveté qui pudiquement masque les traumas, les solitudes et le besoin de les compenser par cette urgence d’appartenance et de liberté qui participera à la création du Free Cinema. On retrouve ici la plume sautillante de Lorenza Mazzetti, sa si grave désinvolture où si bien s’entend l’énergie désespérée, le dur désir de dire l’angoisse, la spectrale absence de place trouvée quand elle adapte Kafka ou quand, sans issu, elle se laisse à nouveau porter par les douloureux délices de l’enfance. Bien plus que l’évocation sensible d’une époque, Carnets de Londres cerne et construit la sensibilité d’une autrice hantée, joueuse et tragique.»
Une magnifique chronique à lire dans son intégralité sur le site de La viduité (lien ci-dessus).
Lorenza Mazzetti, débuts anglais d’une effrontée dans Libération…
«Elle exige de voir le directeur d’une prestigieuse école d’art. Il la reçoit. Pourquoi la prendrait-il comme élève? “parce-que je suis un génie.” [...] À leurs débuts, dans la marge, ces réalisateurs qui seront mondialement célèbres montrent la vie quotidienne, les ouvrier, les travailleurs exclus du cinéma commercial.» – Claire Devarrieux