
Offre de Contrat doctoral 2025-2029
École doctorale Sciences du Langage (ED 622), Université Paris Cité
Titre
L’enseignement de Gaston Paris : genèse et circulation des savoirs philologiques
Contexte institutionnel
La thèse s’inscrit dans le projet « PARES : Gaston Paris, des archives aux réseaux », projet de recherche binational franco-suisse, co-financé par l’ANR (ANR-24-CE93-0001) et le FNS (10002130) et dirigé conjointement par Muriel Jorge (Maîtresse de conférences en sciences du langage, Université Paris Cité) et Ursula Bähler (Professeure en littérature française et histoire de la philologie romane, Université de Zurich).
Fondé sur la coopération entre universités et institutions patrimoniales (École pratique des hautes études, Humathèque – Campus Condorcet, Bibliothèque nationale de France, Institut de France, Collège de France, Centre culturel international de Cerisy-la-Salle), PARES a pour objectif de réunir l’ensemble des archives du philologue Gaston Paris (1839-1903) – papiers scientifiques, correspondance, documents administratifs et personnels – dans un portail numérique, de manière centralisée et en respectant les principes FAIR. Il vise à donner ainsi une nouvelle impulsion à la recherche sur l’histoire de la philologie romane en étudiant la contribution de réseaux personnels, institutionnels et notionnels encore inconnus à la genèse et à la circulation des savoirs philologiques au XIXe siècle.
Contexte scientifique
Gaston Paris (1839-1903) fut l’un des promoteurs les plus importants de la philologie romane au XIXe siècle en France, selon une conception à l’allemande de la discipline, qui inclut la linguistique historique, l’histoire de la littérature (médiévale) et l’édition de textes (médiévaux). Son influence se mesure à l’aune de ses multiples activités : auteur prolifique (Bédier/Roques 1904 ; Bähler 2004, 813-4), directeur et fondateur de revues importantes, dont la Romania (1872-), enseignant à l’École pratique des Hautes Études (EPHE) et au Collège de France (CdF) où il a formé de nombreux philologues, membre de diverses académies et sociétés savantes, dont l’Académie des Inscriptions et Belles-Lettres et l’Académie française, intellectuel engagé dans l’Affaire Dreyfus (Bähler 1999) et homme du monde, fréquentant les salons et en tenant un lui-même (Kim 2012). Son œuvre et, plus largement, la philologie romane en France dans la deuxième moitié du XIXe siècle font l’objet d’études approfondies depuis une quarantaine d’années, avec une intensification depuis le milieu des années 1990.
Projet doctoral
Les connaissances sont cependant assez limitées concernant les cours que G. Paris a dispensés pendant plus de trente-cinq ans dans « [s]a grande église et [s]a petite chapelle » (Paris 1894), comme il désignait les institutions où il a exercé de la fin des années 1860 à 1903 : le Collège de France, où il était professeur de Langue et littérature françaises du Moyen Âge, et l’École pratique des hautes études, dont il dirigeait la Conférence des langues romanes (Bähler 2020).
Que sait-on vraiment de ces enseignements ? On connaît les intitulés des postes, mais peuvent-ils suffire à décrire une carrière entière de cours, dont ceux du CdF doivent être renouvelés chaque année ? Les sujets annoncés sur les affiches, que ce soit celles de l’EPHE ou du CdF, n’ont jamais fait l’objet d’un travail systématique comme Bergounioux (1990) l’a fait pour l’ensemble des cours des Facultés des Lettres (1845-1897). L’EPHE a très tôt commencé à publier des rapports sur ses conférences dans ses Annuaires, tandis que le CdF ne l’a fait qu’à partir de 1901, soit peu avant le décès de G. Paris. Quoi qu’il en soit, quelques lignes de résumé épuisent-elles les savoirs philologiques enseignés ?
Dans ce contexte institutionnel, la circulation des savoirs est aussi une inconnue : dans le prolongement du questionnement initié par Jorge (2022), on peut se demander dans quelle mesure elle a contribué à leur disciplinarisation (Chiss/Savatovsky/Candel/Léon 2012). Outre les contenus, on ignore aussi quel était le public de ces cours. Au-delà des élèves les plus prestigieux, comme J. Bédier, A. Jeanroy, E. Langlois, A. Piaget, A. Thomas, M. Roques et J. Gilliéron, d’où venaient les auditeurs et les auditrices ? Quel fut leur parcours par la suite ? Combien sont restés en contact avec G. Paris ? Le cas échéant, quelle fut la nature de leurs relations ? Les auditrices de l’EPHE sont particulièrement mal connues, bien qu’elles aient commencé à susciter l’intérêt des chercheurs et des chercheuses (Graceffa 2016, Bähler 2018, Genin 2023).
La thèse a pour objectif d’apporter des réponses à ces questions en s’appuyant sur plusieurs types de sources, numérisées, rassemblées et traitées grâce aux technologies numériques dans le cadre du projet PARES : les notes de cours manuscrites de G. Paris, sa correspondance, ainsi que les archives institutionnelles de l’EPHE et du Collège de France. Elle relèvera du champ des sciences du langage de façon générale et, plus particulièrement, de celui de l’histoire des idées linguistiques, avec une perspective interdisciplinaire (histoire de l’enseignement supérieur – français et international –, histoire sociale et culturelle des savoirs, didactique). Elle comprendra l’édition scientifique numérique d’une partie des notes de cours, qui pourra se fonder sur les outils de la génétique textuelle.
Compétences
L’offre s’adresse aux titulaires d’un master en sciences du langage, en philologie ou en histoire des sciences humaines. Sont souhaitées :
- de solides connaissances en ancien français ou en linguistique romane, étant donné l’objet des enseignements dispensés par G. Paris ;
- une expérience de recherche à partir de documents écrits anciens (archives, manuscrits) ;
- une première familiarisation avec les méthodes et les enjeux de l’histoire des savoirs.
Par ailleurs, une excellente maîtrise de la langue française, en particulier écrite, et une bonne connaissance de l’anglais sont attendues. La connaissance d’autres langues vivantes étrangères (allemand, italien, espagnol ou autre) ou de langues anciennes (latin, grec ancien, sanskrit) serait un atout supplémentaire.
Un intérêt avéré pour les humanités numériques (philologie numérique, bases de données) serait apprécié.
Financement
Contrat doctoral de 3 ans, suivi de 4 mois de contrat sous le statut d’ingénieur d’étude.
Début du contrat : 1er octobre 2025
Direction
La thèse sera dirigée par Muriel Jorge, maitresse de conférences (HTL, Université Paris Cité), co-directrice du projet PARES.
Elle sera co-encadrée par Pierre-Yves Testenoire, maitre de conférences HDR (HTL, Université Paris Cité).
École doctorale et équipe de rattachement
La thèse s’effectuera au sein de l’unité de recherche « Histoire des Théories Linguistiques » (HTL, UMR 7597) et sera inscrite à l’École doctorale « Sciences du langage » (ED 622), Université Paris Cité.
Lieu et conditions d’exercice
La thèse s’effectuera en collaboration avec l’ensemble de l’équipe du projet PARES, en France et en Suisse. Le doctorant ou la doctorante participera aux réunions d’équipe, aux manifestations scientifiques, à l’animation du carnet de recherche et, plus généralement, à l’ensemble des actions de recherche menées dans le cadre du projet.
La thèse sera effectuée dans les locaux du laboratoire d’Histoire des Théories Linguistiques (HTL, UMR 7597).
Université Paris Cité
Bâtiment Olympe de Gouges
place Paul Ricœur
75013 Paris
Des déplacements occasionnels à Zurich sont prévus et financés.
Le doctorant ou la doctorante bénéficiera d’un ordinateur portable et d’un écran supplémentaire.
À sa demande et en fonction des besoins de recrutement de l’Université, il ou elle pourra éventuellement se voir confier des tâches d’enseignement, rémunérées au titre de vacations.
Candidature
Le dossier est à envoyer à muriel.jorge@cnrs.fr, avant le 02 juin 2025. Il comprendra les éléments suivants :
- Une lettre de motivation détaillant la manière dont le candidat ou la candidate envisage le sujet proposé et les modalités d’insertion dans l’équipe du projet PARES ;
- Un CV, incluant les expériences de recherche ;
- Le relevé des notes de Master ;
- Si possible, le mémoire de M2 en version numérique ou, à défaut, une attestation du directeur ou de la directrice confirmant qu’une soutenance est prévue avant le 30 juin 2025 ;
- Éventuellement, des lettres de recommandation (deux maximum).
Des auditions seront organisées entre le 24 et le 27 juin 2025.
Bibliographie
Bähler, Ursula. 1999. Gaston Paris dreyfusard. Le savant dans la cité. Paris : Éditions du CNRS.
Bähler, Ursula. 2004. Gaston Paris et la philologie romane. Genève : Droz.
Bähler, Ursula. 2018. « Être femme et philologue il y a cent ans : Maria Johanna Minckwitz écrit à Gaston Paris et à Paul Meyer », in Wolfgang Asholt, Ursula Bähler, Bernhard Hurch, Henning Krauss & Kai Nonnenmacher (éd.), Archiv und Engagement : eine bestimmte Idee der Romanistik, Frank-Rutger Hausmann zum 75. Geburtstag. Romanische Studien, Beihefte 4, 47-97. https://www.romanischestudien.de/index.php/rst/article/view/584
Bähler, Ursula. 2020. « Le Collège de France et l’École pratique des Hautes Études », in Jean-Luc Fournet (éd.), Ma grande Église et ma petite chapelle : 150 ans d’affinités électives entre le Collège de France et l’École pratique des hautes études (EPHE). Paris : Éditions du Collège de France, 57-81.
Bédier, Joseph & Roques, Mario (éd.). 1904. Bibliographie des travaux de Gaston Paris. Mâcon : Protat.
Bergounioux, Gabriel. 1990. « L’enseignement de la linguistique et la philologie en France au XIXe siècle d’après les affiches de cours des facultés de lettres (1845-1897) », Archives et documents de la Société d’histoire et d’épistémologie des sciences du langage, N. 2 (1), 1‑105.
Chiss, Jean-Louis, Savatovsky, Dan, Candel, Danielle & Léon, Jacqueline (éd). 2012. « La disciplinarisation des savoirs linguistiques. Histoire et épistémologie », Les dossiers d’Histoire Épistémologie Langage, N. 5. https://shesl.org/dossiers5-disciplinarisation
Genin, Vincent. 2023. « Les premières auditrices de l’École pratique des hautes études, 1886-1893. Laïcisation et féminisation d’un lieu de savoir : les cas des IVe et Ve sections », Les Études Sociales, N. 177, 59-91. DOI : https://doi.org/10.3917/etsoc.177.0059
Graceffa, Agnès. 2016. « Médiévistes, femmes et étrangères : des pionnières de l'EPHE. Gertrude Schoepperle, Olga Dobiache-Rojdestvensky et Rita Lejeune », in Rebecca Rogers & Pascale Molinier (éd.) Les femmes dans le monde académique : perspectives comparatives. Rennes : PUR, 19-29.
Jorge, Muriel. 2022. « Trois carrières, un savoir ? Circulations, rivalités et filiations autour de la langue française dans l’enseignement supérieur parisien (années 1860-1920) », in Didier Samain & Pierre-Yves Testenoire (éd.), La linguistique et ses formes historiques d’organisation et de production. Paris : HEL Livres.
Kim, Ji-Hyun Philippa. 2012. Pour une littérature médiévale moderne. Gaston Paris, l’amour courtois et les enjeux de la modernité. Paris : Champion.
Paris, Gaston. 1894. Le haut enseignement historique et philologique en France. Paris : H. Welter.