
Séance 3 – 10 avril 2025 – 17h-19h : Périodiques, mystère et polar
Séance en ligne :
https://u-paris.zoom.us/j/87580817799?pwd=RRaBRRduQz4oo3TzphTSPaIDlvdfH9.1
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Marc Vervel (Université Paris Cité, CERILAC) :
Le « roman de mystère » dans la presse du début du 20e siècle, une formule catégorisante en trompe-l’œil ?
Le « mystère » est un drôle de terme dans la littérature du 19e et du 20e siècles : à la fois vide et plein, issu de traditions assignables sans se voir pour autant stabilisé sur un horizon de sens précis, le « mystère » est chargé d’harmoniques historiques et littéraires qui le rendent apte à susciter la curiosité pour l’inconnu en convoquant un imaginaire de la menace, de l’aventure ou du crime à résoudre. Il peut ainsi intervenir dans toutes sortes de contextes littéraires pour dire les pouvoirs du jeu fictionnel. Il hérite aussi à la fin du 19e siècle, par l’entremise du gothique et des mystères urbains, d’une aptitude à faire signe vers un horizon générique reposant sur la mise en place de pactes de lecture aux contours vagues mais renvoyant au caractère inquiétant d’univers diégétiques d’allure archaïsante se déployant sur la scène de la modernité. C’est tout l’enjeu notamment du « mystery novel » emblématisé en contexte anglo-saxon par Le Chien des Baskerville, et qui mène de manière plus ou moins erratique à l’apparition en contexte français de la formule « roman de mystère ». Cette expression, parfois présente dans les sous-titres d’ouvrages au statut à préciser, se retrouve surtout dans la presse de la première moitié du vingtième siècle, où elle sert des objectifs ambivalents, bien en lien avec le statut incertain d’appellations génériques poreuses ou faussement catégorisantes. Sur la base d’un corpus d’occurrences publiées dans la presse d’époque, on se propose d’analyser la manière dont la formule peut notamment servir un discours à visée publicitaire ouvrant à toutes sortes de combinaisons mobilisant à plein les effets polysémiques associés au terme pour susciter la curiosité du lecteur, en même temps qu’elle peut à l’occasion intégrer des discours cherchant à stabiliser leur objet. Le « roman de mystère » pourrait alors renvoyer à sa manière au caractère ambigu dont peuvent se parer les appellations d’allure générique dans le contexte des discursivités journalistiques.
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Annabelle Marion (Université de Limoge, LPCM) :
« Le réseau des magazines de polar en France (1945-1989) : médiation et structuration d’une communauté culturelle »
La seconde moitié du XXe siècle est marquée par le développement en France de périodiques spécialisés dans le récit policier, depuis les revues de nouvelles de l’après-guerre, qui adaptent ou imitent des modèles éditoriaux américains, jusqu’aux fanzines et aux magazines présentant davantage de contenus critiques qui voient le jour à partir des années 1970, dans le sillage des contre-cultures. Cette présentation se propose d’examiner le rôle de médiateurs joué par ces magazines spécialisés, dans la lignée des travaux qui ont appréhendé les périodiques à partir de la notion de réseau. Véritables plateformes d’informations et de discours, les magazines spécialisés, en donnant une forme et une visibilité médiatique aux événements, aux sociabilités et aux instances du « petit monde du polar », reflète et accompagne sa structuration. Leur fonctionnement réticulaire, qui se mesure à l’aune de la circulation de leurs acteurs comme de leurs discours, contribue à brouiller les frontières entre magazines professionnels et fanzines : tous tendent à former une presse alternative qui se pense comme l’envers de la « grande presse ». Ouvrant des espaces d’échanges et de sociabilités, les périodiques spécialisés participent en outre à la structuration de communautés d’amateurs qui se déploient aussi bien à l’intérieur qu’en dehors de leurs pages.
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Organisation :
Alexia Kalantzis (Université Paris Cité, CERILAC)
Le séminaire PéLiAS (Périodiques, Littérature, Arts et Sciences) se propose d’étudier les périodiques artistiques, littéraires et scientifiques du xviiie siècle au xxie siècle en tant que médiateurs culturels. Il s’agit d’analyser les périodiques en tant que constructions sociales, matérielles et entrepreneuriales, faisant intervenir de multiples acteurs : écrivains, artistes, typographes, graveurs, imprimeurs, éditeurs, ou lecteurs… et touchant des milieux socio-professionnels variés (milieux artistiques et littéraires, scientifiques, universitaires, théâtres, galeries, maisons d’édition…).
L’approche adoptée est double : les périodiques sont interrogés en tant que support de communication appartenant à la culture de l’imprimé et en tant qu’objet culturel pluridisciplinaire. La notion de médiateur permet également d’insister sur la circulation des idées, des textes, des images et des rédacteurs. Les périodiques sont pensés en termes de « réseau » : un dialogue s’établit entre les différents périodiques, au-delà des catégories traditionnelles qui opposent grande et petite presse, revues et livres, revues artistiques et littéraires et revues scientifiques. Enfin, les périodiques sont étudiés dans leur dimension de vulgarisation et dans leur rapport au livre et aux différents publics.
La thématique de l’année 2024-2025, « Middlebrow Culture », permettra d’approfondir le rôle de médiateur des périodiques à partir de supports intermédiaires qui permettent de faire le lien entre une culture populaire et une culture plus élitiste.
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Comité scientifique :
Jean-Charles Geslot (UVSQ, CHCSC)
Axel Hohnsbein (Université de Bordeaux, SPH)
Alexia Kalantzis (Université Paris Cité, CERILAC)
Catherine Radtka (CNAM PARIS, HT2S)
Viera Rebolledo-Dhuin (UPEC, CRHEC)
Évanghelia Stead (UVSQ, CHCSC)
Hélène Védrine (Paris-Sorbonne, CELLF 19-21)
Norbert Verdier (GHDSO/EST)
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Contacts :