Compte rendu publié dans Acta fabula (décembre 2017, vol. 18, n°10) :
Stéphane Massonet, "Paul Celan, poétique de la cendre & de la survivance"
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Europe n°1049-1050, « Paul Celan », 2016.
« Paul Celan représente la réalisation de ce qui ne semblait pas possible : non seulement écrire de la poésie après Auschwitz, mais écrire “dans” ces cendres, parvenir à une autre poésie en fléchissant cet anéantissement tout en se maintenant en quelque sorte dans l’anéantissement », écrivait naguère Andrea Zanzotto. « La parole poétique est une parole prononcée contre la mort. C’est là son essentielle raison d’être », rappelle José Ángel Valente dans un texte publié dans ce numéro d’Europe. « La voix de Paul Celan est descendue jusqu’à la nuit, elle a suivi les échelles infinies de l’ombre, occulte ou muette, et elle y a engendré une parole nouvelle, une nouvelle manifestation. Une naissance terrible, une naissance laborieuse. Un message crypté qui retient en lui-même toute sa lumière. Une bouteille à la mer. Jusqu’à ce qu’une autre main, un autre regard, une écoute différente, l’accueillent, le reçoivent, et que la transformation ait lieu précisément par cet acte-là. Parole, Verbe. Pour habiter de nouveau parmi nous. Une langue qui a été dépouillée, interdite, par ceux qui imposaient, qui fixaient, qui paralysaient le flux du sens, de la parole, si longtemps prisonnière, menottée — cette langue-là ne vient pas se manifester dans le poème pour être à nouveau prisonnière du sens, mais pour le dire en l’ouvrant à des résonances imprévisibles, imprévues, qui permettent sa dérégulation continuelle, l’invention ou la rencontre de nouveaux horizons plus libres. » Il y a quinze ans, Europe avait consacré un premier numéro à Paul Celan, plusieurs fois réimprimé. Celui qui paraît aujourd’hui est entièrement nouveau et réunit quelques-uns des meilleurs critiques engagés depuis des années dans un travail de fond sur son œuvre.
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Sommaire
PAUL CELAN
Danielle COHEN-LEVINAS : Au nom du poème
John E. JACKSON : Paul Celan, poète (en) français ?
Paul AUDI : Le chemin de l’impossible
Bernhard BÖSCHENSTEIN : Le Méridien et ses matériaux. Le centre de la poétique de Paul Celan
José Ángel VALENTE : Sous un ciel sombre
Esther TELLERMANN : Cristal exact
Jean-Pierre LEFEBVRE : Jazz avec Paul Celan
Martine BRODA : Rien n’illumine, sinon la rencontre
Denis THOUARD : La politique du poète
Peter TRAWNY : Celan et Heidegger, une fois de plus
Danielle COHEN-LEVINAS : Où est le ciel ?
Bertrand BADIOU : L’« estrangement » du poème
Andrea LAUTERWEIN : Poésie contre argument. Paul Celan et René Char
André du BOUCHET : « Todtnauberg »
Clément LAYET : « Le poème — la survie insensée »
Jean-Pierre LEFEBVRE : « Tübingen, Jänner »
Barbara WIEDEMANN : « Un œil, ouvert »
Arnau PONS : D’une lignée d’abolis
Clément FRADIN : Ce que lire veut dire
LONGÉVITÉ
Lucien GIRAUDO : En traversant les frontières avec Michel Butor
Michel BUTOR : Longévité.
J.M.G. LE CLÉZIO : Une maison, pour voir passer le temps
Bernard NOËL : Poème du Je et du Tu
John KEATS : Pourquoi ai-je ri ce soir ?
Giacomo LEOPARDI : Chant nocturne d’un berger nomade d’Asie
Vahé GODEL : « Dürftige Zeit »
Jean ROUDAUT : Les prisons et le regard
Frédéric-Yves JEANNET : Deuxième lettre anthume
Michel BUTOR : Miquel Barceló, la bibliothèque
CHRONIQUES
Sylwia CHROSTOWSKA : Allumettes
Henri BÉHAR : Dada, un centenaire heureux
Claude MINIÈRE : Peinture, musique, langage
La machine à écrire
Jacques LÈBRE : Politique de l’amitié
Les 4 vents de la poésie
Olivier BARBARANT : Dénouer le mystère
Le théâtre
Karim HAOUADEG : Le saint de la justice
Le cinéma
Raphaël BASSAN : Interrogations sur le devenir du Brésil
La musique
Béatrice DIDIER : Boulez est mort, vive Boulez
Les arts
Jean-Baptiste PARA : Le magicien à la manche vide
NOTES DE LECTURE
POÉSIE
Frédéric MISTRAL : Le Poème du Rhône, par Philippe Gardy.
Dino CAMPANA : Chants orphiques et autres poèmes, par Jean-Baptiste Para.
Wulf KIRSTEN : Images filantes, par Jacques Lèbre.
NIMROD : Sur les berges du Chari, district nord de la beauté, par Michel Ménaché.
Françoise ASCAL : Noir-racine précédé de Le Fil de l’oubli, par Pierre Lecoeur.
Emmanuel HOCQUARD : Les Élégies, par Didier Cahen.
Sabine HUYNH : Kvar lo, par Pascal Boulanger.
Jean-Luc STEINMETZ : Vies en vues, par Marc Kober.
Yann MIRALLES : Des terrains vagues. Variations, par Serge Martin.
Richard BLIN : Jean-Paul Michel, par Karim Haouadeg.
Michaël BATALLA : Poésie possible, par Vincent Metzger.
Didier CAHEN : Le peu des hommes, par Olivier Goujat.
Max ALHAU : Si loin qu’on aille, par Michel Lamart.
ROMANS, NOUVELLES, RÉCITS
Georges PEREC : L’Attentat de Sarajevo, par Maxime Decout.
Jean-Louis JACQUIER-ROUX : Ombrie. La terre d’en bas, par Michel Ménaché.
Gabriel JOSIPOVICI : Infini, l’histoire d’un moment, par Matthieu Gosztola.
Jean-Louis GIOVANNONI : Sous le seuil, par Joël-Claude Meffre.
Bernhard SCHLINK : La Femme sur l’escalier, par Max Alhau.
Jānis JOŅEVS : Metal, par Jean Guégan.
François BON : Fictions du corps, par Thierry Romagné.
CORRESPONDANCES
Dominique MASSONNAUD : Correspondance Aragon-Romain Rolland, par Sophie Dessen.
Corinna BILLE, Maurice CHAPPAZ : Jours fastes. Correspondance 1942-1979, par Noël Cordonier.
ESSAIS, DIVERS
Alain CORBIN : Histoire du silence. De la Renaissance à nos jours, par Michel Delon.
Eric A. FREEDMAN et Richard H. WEISBERG : Deux avocats dans la France occupée.
Les archives de Joseph Haennig et Léon-Maurice Nordmann, par Jean-Kély Paulhan.
Hanns ZISCHLER : Berlin est trop grand pour Berlin, par Jean-B. Deloutre.
Yves BONNEFOY : Entretien avec Natacha Lafond et Mathieu Hilfiger sur la question du livre, précédé de Yves Bonnefoy et la responsabilité poétique, par Isabelle Lévesque.
Bernard FOURNIER : Histoire de l’Académie Mallarmé, par Marie-Louise Audiberti.
Frédérique DEVAUX YAHI : De la naissance du cinéma kabyle au cinéma amazigh, par Hervé Sanson.
Stéphane MOSÈS : Approches de Paul Celan, par Karim Haouadeg.