Compte rendu publié dans Acta fabula :
"La littérature mise en demeure (un cours de yoga wittgensteinien)" par Laurence Giavarini.
—
Florent Coste, Explore. Investigations littéraires
Paris : Questions théoriques, collection "Forbidden Beach", 2017.
EAN 9782917131480.
Quelle urgence pourrait-il y avoir, dans la conjoncture qui est la nôtre, à se lancer dans une entreprise de théorie littéraire ? Et ne se prendrait-on pas un peu trop au sérieux à prétendre en renouveler les conditions ? À de telles questions, Explore répond en enrichissant l’approche de la littérature par des croisements avec Wittgenstein, l’anthropologie et, plus largement, en n’ayant de cesse de la resituer sur les terrains des sciences humaines.
Explore se livre à une critique approfondie des théories littéraires qui séparent les textes des formes de vie dans lesquels ils s’inscrivent. Les études littéraires peinent en effet à se soustraire à des mythologies essentialistes et séparatistes qui en limitent considérablement l’efficacité sociale et la portée politique. Ce sont précisément ces soupçons, en partie fondés, d’irresponsabilité et de bavardage scolastique, que ce livre entend lever. Il s’exerce pour cela à se munir d’une conception du langage qui soit conséquente et gage d’émancipation.
Investir le langage, ce n’est peut-être pas déserter le réel, ni renoncer à l’action. Pour peu qu’on se tienne à une philosophie pragmatique des jeux de langage, c’est au contraire reprendre la main sur ce qui structure nos problèmes, définit nos agenda, distribue nos places, organise notre vie, engage nos possibilités d’action.
Ce livre soutient donc : 1o qu’il n’y a pas de différence essentielle entre le langage ordinaire et le langage littéraire ; 2o que la question de l’action est sans doute la plus négligée des études littéraires ; 3o qu’au lieu de commenter les textes, nous ferions bien d’en comprendre les sens en menant une enquête sur leurs usages dans des contextes d’action déterminés ; 4o que la littérature, par l’usage intensif et réflexif qu’elle fait du langage, pourrait être un instrument d’exploration des formes de vie qui nous entourent et un outil d’investigation de nos problèmes publics.
Florent Coste est agrégé de lettres modernes, docteur en lettres modernes et chercheur membre de l’École française de Rome depuis septembre 2015. À la croisée des études littéraires, de l’histoire et de la sociolinguistique, ses recherches visent notamment à déjouer l’explication trop aisée du « génie de la langue ». Il a par ailleurs été membre du comité de rédaction de la revue Tracés. Revue de sciences humaines, publiée par les Éditions de l’ENS (Lyon).
—
Sommaire
Préface de Christophe Hanna
« Comment se mobilisent les publics (L’écriture comme écosystème) » p. VII
Intro. Crampes et étirements p. 3
La littérature après Wittgenstein. La littérature en climat néolibéral. Quel rôle la théorie littéraire doit-elle jouer ? La crampe de l’essentialisme littéraire. Devons-nous construire le concept de littérature ? Séances d’étirements
Exercice 1. Portrait du lecteur en ethnographe 27
[1] Risquons une comparaison. [2] D’emblée une objection. [3] L’hypothèse herméneutique. [4] Les dérives de l’herméneutique. [5] Le problème des catégories littéraires. [6] La mythologie de la propriété comme ingrédient. [7] Contre l’intentionnalisme, repeuplons les études littéraires ! [8] Moins d’auteurs ! Plus d’acteurs ! [9] Moins d’auctorialité ! Plus d’agentivité ! [10] Peut-on se passer de l’intention ? [11] L’impératif de la description. [12] Ajuster le champ de vision. [13] Critique du jugement esthétique. [14] Premières apparitions du mythe de l’intériorité. [15] Critique du close reading. [16] Une anthropologie de la littérature. [17] L’anthropologie est-elle un modèle recommandable ? [18] Sens d’une anthropologie de la littérature. [19] Un miroir peu complaisant. [20] Une anthropologie pragmatique. [21] Instrumentalisme. [22] Transitivité et usages. [23] Usages et volonté d’agir.
Notes de l’exercice 1 p. 66
Exercice 2. Interpréter ou décrire p. 77
[1] Qu’est-ce que suivre une règle ? [2] (Con)texte. [3] Régulisme et mentalisme. [4] Règle esthétique. [5] Jeux de langage littéraires. [6] La littérature au grand air. [7] Le contexte, c’est toujours pour les autres. [8] Totalité. [9] Terrain vague. [10] Terrains de rencontre. [11] Terrain de jeux. [12] Terrain et conjoncture. [13] Pour remettre les pieds sur terre. [14] Le littéraire dans son fauteuil. [15] Feue la poétique. [16] La fiction théorique du Texte. [17] La Littérature empêche les études littéraires (un exemple). [18] Un ordre intentionnel. [19] Curiosité et émerveillement. [20] La description pour apéritif catégorique. [21] Feue l’explication de texte. [22] Évasion herméneutique et métaphysique du lever de rideau. [23] Vers la traduction. [24] Première objection contre la description. [25] Principe d’indifférence ? [26] Deuxième objection : perte de l’aura et lecture actualisante. [27] Troisième objection : la description et le macro. [28] La littérature comme enquête. [29] Enquête, dispositif et représentation. [30] Montage ethnographique et littérature d’investigation. [31] Compréhension anthropologique et compréhension esthétique. [32] Changer le goût. [33] Il faut sortir.
Notes de l’exercice 2 p. 132
Exercice 3. Formes de vie p. 147
[1] Ni Emma, ni Nathanaël. [2] Les études littéraires, sciences camérales et claustrophiles. [3] Le mythe de l’intériorité littéraire. [4] Langage et forme de vie. [5] Une forme de vie est plus qu’un contexte. [6] Littérature et science studies. [7] Littérature et philosophie antique. [8] La grammaire des formes de vie. [9] L’exploration littéraire. [10] Redimensionner les études littéraires. [11] Forme de vie, perte de l’aura et théorie de l’action. [12] Formes de vie : par-delà nature et culture. [13] Comment suit-on une règle ? [14] Le dit et le dire. [15] Le monde social est plat. [16] Contrat ou accord ? [17] Formes de vie et actions possibles. [18] Le monde social n’est en réalité pas tout à fait plat. [19] Que faire sur ce sol ? Le parcourir et courir. [20] Ni opacité, ni transparence. [21] Forme de vie et institution. [22] Littérature et vie du langage. [23] La littérature au milieu du langage. [24] Décrire ou prescrire des formes de vie. [25] La littérature est-elle une affaire politique ? [26] Contre l’herméneutique derechef.
Notes de l’exercice 3 p. 178
Exercice 4. Que peut la littérature ? p. 193
[1] Ce livre s’intitule Explore. Et non Déplore. [2] Formes de vie et gouvernement. [3] Démocratie et forme de vie. [4] Anarchisme et dévastation des formes de vie. [5] Forme de vie planétaire, utopie et histoire naturelle. [6] Les formes de vie monastiques. [7] La culture comme observance. [8] Le droit et les formes de vie. [9] Formes de vie et formes littéraires. [10] Fantasmes littéraires et fantasmes linguistiques. [11] Développement personnel ? [12] Aporie du dandysme ? [13] Émancipation ou gouvernement de soi. [14] La littérature peut-elle nous émanciper ? [15] S’émanciper ou enquêter ? [16] Entre enquête et critique : la contre-culture. [17] Changer la vie ? [18] Techniques, dysfonctionnements, réglages. [19] Les mots de la tribu sont-ils des maux ou des tributs ? [20] Une politique des formes de vie peut-elle être radicale ? [21] Le langage ordinaire pour terrain. [22] Littérature et travail. [23] Deux régimes de l’attention. [24] « La poésie, et après ? »
Notes de l’exercice 4 p. 226
Exercice 5. Le front et la forme p. 243
[1] Front (national) contre front (exploratoire). [2] Une politique des formes de vie peut-elle être critique ? [3] Littérature et politique étrangère. [4] Littérature et vie en commun. [5] Immanence et exploration. [6] Universalisme, relativisme et pluralisme. [7] Forme de vie et incommensurabilité. [8] Pluralité et critique des formes de vie. [9] Institution, forme de vie et critique. [10] Littérature et critique. [11] L’ontologie est le cadet de nos soucis. [12] Singularité ou régularité. [13] Modélisation et modalisation. [14] Pluralité des formes de vie. [15] Quels honneurs rendre à une singularité ? [16] Singularité et singularisme. [17] Relativisme, libéralisme et agir social. [18] Reconnaissances. [19] Pauvreté de l’expérience, indifférence ou cécité à l’aspect. [20] Littérature de bunker et littérature de réserve. [21] La poésie peut-elle nous faire vivre des expériences communes ? [22] Responsabilité poétique et responsabilité politique. [23] Littérature d’indignation. [24] Littérature de coopération.
Notes de l’exercice 5 p. 278
Exercice 6. Les couleurs de la littérature p. 293
[1] Conservateurs et explorateurs. [2] Une requête : la définition de la Littérature. [3] La perplexité des définitions. [4] De quoi la demande définitionnelle est-elle le symptôme ? [5] La littérature à l’état liquide. [6] A-t-on besoin de définition(s) de la littérature ? [7] Concepts non circonscriptibles et créativité. [8] Qu’est-ce qu’une fiction théorique ? [9] Fiction théorique, envoûtement et fétichisme. [10] Caprice fondationnaliste et enquête anthropologique. [11] Critères embarrassants et airs de famille. [12] Des chiffres et des lettres. [13] « Le concert de techno, c’est par là ! » [14] Concepts vagues et ouverts. [15] Misère de l’historicisme. [16] Un concept vague n’est pas un concept hors d’usage. [17] Tout et n’importe quoi. [18] Définition, identification et reconnaissance. [19] Lire-comme et reconnaissance d’aspect. [20] Comment étendre notre sens de la littérature ? [21] Définitions philosophiques et déformations professionnelles. [22] Controverses, homologations et reconnaissance publique. [23] Définitions philosophiques et définitions pratiques. [24] Concepts vagues, ouverts et contestés. [25] Objet représenté et moyen de représentation. [26] L’efficacité d’un moyen de représentation. [27] Grammaire des couleurs. [28] Vie et mort des usages. [29] Définitions et modèles. [30] Musique noire, essentialisme et scepticisme radical. [31] Détroit, fin des années 1970. [32] Débarquer dans le club. [33] Un strong program pour les études littéraires.
Notes de l’exercice 6 p. 340
Exercice 7. La littérature pour de vrai p. 351
[1] Littérature, vérité et hygiénisme. [2] Nos attentes. [3] Le livre comme équipement. [4] Littérature et athlétisme. [5] Désintérêt et des intérêts de la littérature. [6] Éloge de la sortie. [7] Expérience, essai, effort. [8] Marche et course. [9] Littérature, culture de soi et culturisme. [10] La littérature pour entraînement. [11] Plaisir, satisfaction et justesse. [12] Relecture et réitération. [13] Apprendre et comprendre. [14] Apprendre et enseigner. [15] Expérience de pensée et expérience de la pensée. [16] Retour sur le terrain. [17] Exercices spirituels. [18] La famille des exercices. [19] La littérature de fiction. [20] La littérature doit nous faire suer. [21] Exercice, mise en jeu et engagement. [22] La littérature comme embrayeur. [23] Le jeu et l’art comme modalisations. [24] Divertissement, distraction et attention. [25] Expériences à la première personne du singulier et du pluriel. [26] Expérience commune et forme de vie. [27] Derechef, le fantasme des pouvoirs de la littérature. [28] Apprendre à lire. [29] L’enseignement comme question pragmatique. [30] Que nous apprend la littérature ? [31] Apprentissage, ostension et recontextualisation. [32] Un anthropologue et ses étudiants. [33] Que fait-on de la littérature, quand on l’étudie ? [34] On a trop transmis la littérature sans vraiment l’effectuer. [35] Cloisonnements et mutilations de la littérature. [36] Locomotion, exploration et critique des fondationnalismes. [37] Exercice, enquête et exploration. [38] Explore.
Notes de l’exercice 7 p. 395
Outro. La littérature, et après ? p. 405
Éloge de l’exploration. La littérature, le langage et la vie. Le rôle de la théorie littéraire. Remanier les corpus littéraires. Anthropologie politique de la littérature
Bibliographie p. 421
*
On peut lire sur laviedesidees.fr un article sur cet ouvrage :