Poétiques de la revenance et redéfinition d’une mémoire postcoloniale chez Tierno Monénembo et Abdourahman Waberi
La littérature ne consiste pas à déposer certains thèmes pour les réserver à certains groupes. Quant aux risques : les seuls vrais sont pris par l'artiste dans son œuvre, quand il la pousse aux limites du possible, afin d'augmenter la quantité de ce qu'il est possible de penser. Les livres deviennent bons quand ils vont jusqu'à la limite extrême et qu'ils risquent de basculer au-delà — quand ils mettent l'artiste en danger à cause de ce qu'il a ou n'a pas osé sur le plan artistique.
Salman Rushdie, Patries imaginaires1
1Le Guinéen Tierno Monénembo et le Djiboutien Abdourahman Waberi appartiennent à la génération des « enfants de la postcolonie », dont le surnom, issu d’un article2 signé par Waberi dans Notre Librairie (1998), est inspiré du titre de l’œuvre de Salman Rushdie Les Enfants de minuit. Ce terme d’« enfants » utilisé à leur endroit traduit, pour reprendre Salman Rushdie dans Les Enfants de minuit, un « optimisme », « [l’]optimisme, comme une rose qui pousse sur un tas de fumier »3. Comme Les Enfants de minuit, les enfants de la postcolonie4 ont été engendrés par une histoire pesante dont ils entendent rendre compte. Les indépendances projetaient les pays africains décolonisés dans un régime d’historicité5 moderniste, où le présent s’orientait vers un futur radieux. Ces indépendances se transforment rapidement en expérience de la stagnation, de la reprise des violences, de la domination occidentale et la différence s’est alors estompée entre la période coloniale et la période postcoloniale. Tierno Monénembo et Abdourahman A. Waberi écrivent cet effacement d’une rupture historique entre deux époques. Leurs poétiques participent d’une « démarche historique », elles œuvrent à la reprise du temps, reprise en tant que répétition et raccommodage de ce qui manque à une compréhension du temps présent (les non-dits, les silences et les absences historiques), pour composer une mémoire polyphonique et multiple que j’appelle mémoire postcoloniale6. Dans les deux romans choisis ici parmi leurs œuvres, Bled (2016) de Tierno Monénembo et Passage des larmes (2009) d’Abdourahman A. Waberi, ces auteurs écrivent la hantise postcoloniale, repensent l’histoire coloniale ainsi que leur expérience de l’exil et de l’errance et font de ces thématiques des principes poétiques. Ces deux romans s’inscrivent dans les poétiques que Jean-François Hamel7 nomme « revenance ». Je propose d’interroger cette pratique poétique dans sa manière de renouveler notre rapport au contemporain à travers une prise en charge singulière du passé. En quoi ces poétiques de la revenance dont la mise en œuvre est motivée par une conscience des traces que recèle l’histoire postcoloniale, constituent-elle une esthétisation des traces mémorielles qui participe à redéfinir une mémoire postcoloniale ? J’analyserai dans un premier temps la manière dont la revenance s’illustre comme un outil de mise en relation de traces mémorielles, pour permettre au sujet de l’histoire contemporaine de s’inscrire dans une dialectique de dépassement d’un héritage douloureux. Je montrerai ensuite que cette écriture met en scène la nécessité d’une mémoire élargie, à travers la constitution d’hantologies8 historiques.
Palimpseste mémoriel : constitution de traces vivantes
2L’écriture de Monénembo et Waberi se situe entre un champ d’expérience, les legs du passé colonial qui habitent le présent à travers des stigmates matériels (à l’exemple des génocides, des guerres…) ou incorporés (à l’exemple de la mémoire) et un horizon d’attente qui tarde à se réaliser et demeure constamment « inachevé et fuyant »9. Ils écrivent ce qui du passé colonial continue d’habiter et de structurer le monde présent et révèlent des retours du fait colonial à travers ses traces laissées dans le présent comme la mémoire traumatique. Dans les romans, les traces du fait colonial sont incorporées par les individus postcoloniaux dans une mémoire qui les contraint à un entre-deux physique et psychique comme on peut le lire dans Bled de Monénembo. Dans ce roman, l’action se situe dans l’Algérie du début des années 1980. Zoubida, une jeune femme algérienne, fuit son village d’où elle est rejetée avec son « Bébé » né hors mariage. Au cours de son errance, elle revient sur l’histoire de l’origine de son père et révèle des séquelles liées aux événements coloniaux, séquelles entretenant aussi un fort lien avec sa propre expérience du temps présent. Elle a appris que Papa Hassan, son père né sous la domination coloniale, était le fils naturel de M. Terrier, un colon installé en Algérie et d’une de ses domestiques algériennes. À son tour, Zoubida aura un enfant non reconnu avec Loïc, un descendant de pied-noir. Cette répétition de l’histoire fait éclater la famille de Zoubida. Sa mère en perd la raison, la communauté d’Aïn Guesma la chasse et parce qu’il revit les humiliations passées, Papa Hassan bannit Zoubida de son village. Zoubida et son Bébé sont contraints à l’exil.
C’est bon d’apprendre qu’on ne descend pas d’un monstre. Papa Hassan me faisait peur […] J’avais beaucoup de mal à l’approcher, beaucoup de mal à lui parler. Pourtant, non, il n’était pas la brute que je croyais. Ce fut un juste, un enfant mal aimé qui a passé sa vie à batailler : contre la ville, contre le sort, contre les fantômes du passé. Il a grandi dans un milieu hostile, pétri de souffrance et de honte. […] Je pouvais maintenant jeter un regard en arrière et lire comme sur une carte les lignes déconcertantes du passé. […] Je savais tout, presque tout, les massacres d’Aïn Guesma, l’assassinat de M. Terrier, le suicide de Grand-Mère... Il ne me restait plus qu’à assener au vieux Krim la question qui tue : « Si j’ai bien compris je suis la petite-fille de M. Terrier, n’est-ce pas ? »10
3Dans cet extrait de Bled la revenance est double. Elle met à la fois en scène la hantise coloniale et l’introjection de cette hantise. Catherine Coquio définit la hantise coloniale comme un « retour symptomatique […] du fait colonial lui-même, […] qui fait parler de hantise ou de revenance comme si l’espace-temps de la colonie revenait hanter le présent »11. Par ailleurs, l’introjection est désignée par les psychanalystes Nicolas Abraham et Maria Torok comme le résultat d’un « long travail »12 de remémoration du passé qui permet, malgré les pires traumatismes, de se « trouver, de se renouveler. Le travail d’introjection n’a pas forcément à devenir conscient pour être efficace. Le plus souvent il se produit à notre insu »13.
Hantise coloniale et incorporation
4Les poétiques de la revenance permettent de mettre en scène cet inconscient dans le récit. Dans cet extrait, les répétitions organisées en groupes ternaires des énoncés « contre la ville, contre le sort, contre les fantômes du passé » et « les massacres d’Aïn Guesma, l’assassinat de M. Terrier, le suicide de grand-mère… » produisent des chaînes signifiantes qui entremêlent l’expérience passée de Papa Hassan à la répétition de cette expérience par Zoubida. Dans l’énoncé « contre la ville, contre le sort, contre les fantômes du passé », la répétition rythmique en gradation ascendante illustre cette relation de contiguïté. L’expérience de Zoubida se révèle dans l’anaphore textuelle qui implique une mémoire discursive du lecteur. En lisant les épreuves de Papa Hassan, le lecteur sait déjà que comme lui, Zoubida a un rapport particulier avec sa ville, comme lui encore, elle a subi un viol et comme lui elle est poursuivie par les « fantômes du passé ». Mais cet entrelacement des trajectoires qui mime la répétition de l’histoire met aussi en évidence des différences. La continuité répétitive subit alors une asymétrie. Si l’imbrication des temps permet au passé de Papa Hassan de revenir dans le récit du périple de sa fille, la revenance mémorielle permet à Zoubida d’éviter la répétition des expériences de son père.
Revenance mémorielle : un travail d’introjection
5On peut par exemple observer la séparation de l’expérience de Zoubida et de son père dans la mise en jeu des temporalités passées. La revenance hiérarchise les temps verbaux, faisant ainsi ressortir le travail d’introjection qui permet à Zoubida d’échapper au continuum de l’histoire. Deux des temporalités qui se côtoient dans cet extrait mettent au premier plan et en relief le vécu de Papa Hassan : le passé simple, pour exprimer la vie de Papa Hassan avant la naissance de sa fille et le passé composé, pour mettre en scène l’antériorité au présent de l’écriture. En faisant revenir ces temporalités passées dans le présent de Zoubida, la revenance soutient la persistance des traces des disparus dans le contemporain. Cependant, l’imparfait indique ce qui se joue réellement au présent et permet de figurer l’expérience en cours vécue par Zoubida. « Je pouvais maintenant jeter un regard en arrière et lire comme sur une carte les lignes déconcertantes du passé ». Cet énoncé à l’imparfait surgit dans le récit de l’expérience vécue de Papa Hassan comme pour imposer la séparation entre l’expérience de Zoubida et de son père. Interrogé sur les sources mémorielles qu’il utilise pour écrire sur la Guinée, Tierno Monénembo répond ceci :
Ma mémoire, beaucoup plus que la mémoire officielle. Il y a une distance à prendre quand on veut écrire sur l’histoire. Il faut faire en sorte que l’histoire ne devienne plus qu’un vieux souvenir, certes douloureux, mais vivace. […] Moi, j’ai 70 ans. Au moment de l’indépendance, j’avais 11 ans. Parfois, la mémoire se brouille. Je suis parti, je suis revenu, et puis j’ai traversé tellement de mémoires, de pays, différents, et douloureux, au moins aussi douloureux que la Guinée. L’Algérie, par exemple, est douloureuse. […] Les Algériens […] ont été trompés, comme en Guinée. Tout cela enrichit la mémoire, permet d’aboutir à quelque chose. Toutes ces mémoires forment une mer collective. « La mer des contes », disait Salman Rushdie : là où tous les contes se rassemblent, comme une mémoire collective. Il faut qu’un jour on en vienne à la mémoire collective, où la haine ne peut pas tout prendre. […] On a donc toute cette Histoire qui pèse aujourd’hui et il faut la « rendre conte » comme disait Sony Labou Tansi. Il faut faire de l’histoire un conte de Noël.14
6Cette « traversée de mémoires » dont parle Monénembo se retrouve dans l’expérience de ses personnages comme nous venons de l’illustrer avec Zoubida. La « traversée de mémoires » se fait aussi littéralement jour dans les démarches poétiques des écrivains. Ces auteurs concourent à l’élaboration d’une mémoire collective à travers ce que Jacques Derrida nomme hantologie15, c’est-à-dire l’intervention dans le texte principal de textes passés qui interpellent le lecteur afin de faire saisir la mémoire postcoloniale toujours dans un lien à d’autres temps de l’histoire.
Hantologie historique ou archives littéraires
7Dans un dispositif intertextuel, l’hantologie met en scène plus qu’une simple répétition de références littéraires. Les œuvres reprises se dérobent16 en effet à leur répétition. Elles constituent des intertextes qui s’illustrent comme des « besoin[s] de fiction pour dire quelque chose17 » sur l’histoire comme patrimoine commun, ou pour permettre de saisir la mémoire postcoloniale dans sa complexité.
Constituer une « mémoire collective »
8C’est ce que l’on peut par exemple lire dans Passage des larmes18. La pensée du philosophe allemand Walter Benjamin irrigue ce roman qui met en intrigue un fratricide sur fond de géopolitique actuelle, entre islamisme et continuation de la prédation coloniale. Passage des larmes raconte l’histoire disjointe de deux frères jumeaux originaires de Djibouti. Djibril, vingt-neuf ans, est employé par une agence américaine de renseignement pour une mission de quelques jours qu’il revient effectuer à Djibouti, après quinze ans d’absence. Au même moment, son frère Djamal, un djihadiste enfermé dans une prison au large de Djibouti, suit Djibril par la pensée. Djamal, qui suit l’investigation de son frère, orchestre des rencontres entre Djibril et des « mouchards » à la solde de son organisation djihadiste. Ces informateurs mèneront Djibril aux mains d’un assassin chargé de le tuer.
9Le titre du roman Passage des larmes évoque l’ouvrage inachevé de Benjamin Le Livre des passages19, écrit durant son exil en France dans les années 1930 et publié en 1982 à titre posthume. Le Livre des passages illustre le Paris des temps modernes dans sa course déraisonnée vers le progrès. Les « passages » désignent une pensée qui part de la « première mise en œuvre de la construction en fer [aux] expositions universelles, [en passant par] l’expérience du flâneur qui s’abandonne aux fantasmagories du marché »20. La reprise du Livre des passages agit dans Passage des larmes comme une archive dont Waberi se sert pour éclairer notre présent ; l’œuvre de Benjamin constitue un « discours savant »21 qui permet de « penser dans la fiction [et] par la fiction »22. Son utilisation dans Passage des larmes agit sur la compréhension du réel postcolonial et invite le lecteur à saisir au plus près ce qui s’y joue. Dans Passage des larmes, le terme « passage » fait aussi référence à l’endroit par lequel est permis l’approvisionnement énergétique des pays occidentaux. Sur la carte placée en ouverture du roman de Waberi, c’est le détroit de Bab-el Manded que l’on peut traduire de l’arabe par « La porte des lamentations », ou encore Le passage des larmes. La notion de « Passage » fait alors entendre qu’il s’agit pour Passage des larmes de procéder en quelque sorte, comme Benjamin l’a fait pour Paris, à une topographie de Djibouti qui fasse mieux saisir au lecteur cette région de la Corne de l’Afrique où se jouent encore aujourd’hui, comme le soulève Waberi, « les excès du capitalisme tardif […] des relents nauséabonds de la Françafrique, […] des questions démocratiques »23. Un texte accompagne et complète cette carte. Ces lignes en paratexte sur « Les Îlots du diable » conduisent le lecteur du constat de la continuation de la prédation coloniale aux effets de cette prédation sur les vies des sujets de l’histoire postcoloniale puisque le Golfe du Goubbet al-Kharab se situe au centre de la République de Djibouti où les sujets de l’histoire postcoloniale, comme les personnages de Djibril et Djamal, subissent les répercussions de cette situation géopolitique et stratégique. En faisant de l’espace fictionnel un espace habité par ces documents (Le Livre des passages, la carte d’ouverture…), l’hantologie agit comme un révélateur qui contribue à lier le contexte historique dont traite Passage des larmes à l’époque décrite dans l’œuvre de Benjamin.
10Par ce mode de revenance, les écrivains actualisent les références historiques et littéraires hors d’usage courant — Waberi convoque l’œuvre de Benjamin pour souligner le néocolonialisme — qui viennent combler les non-dits, les manques et les absences historiques. Une articulation entre le passé, le présent et l’avenir se fait alors jour pour permettre au sujet de l’histoire postcoloniale de réfléchir à sa propre expérience de l’Histoire. Constituer une hantologie permet aussi de modifier le cours de l’histoire postcoloniale. C’est l’usage que Monénembo fait de l’œuvre Nedjma de Kateb Yacine dans son roman Bled.
Réorienter le cours de l’histoire postcoloniale
11Nedjma est paru en 195624. Dans ce roman, Kateb Yacine met en scène la figure de quatre jeunes hommes séduits et rabroués par la même femme, Nedjma. Ils sont en errance et hantés par les injonctions de fidélité et de vengeance des « pères », c’est-à-dire d’un passé ancestral et de ses traditions, un passé qui fait retour dans leur présent et duquel ils essayent de se libérer. Dans l’incipit de Bled, Monénembo indique d’emblée une filiation avec cette œuvre majeure qu’est Nedjma. On peut ainsi lire :
Y a-t-il dans cette contrée une dénommée Zoubida ? – Des Zoubida, y’en a partout même au sommet de la tour Eiffel. – Celle-là ne ressemble à aucune autre Zoubida, elle est née avec un stigmate au front, un stigmate en forme d’étoile. – Nedjma ou Zoubida ? –Zoubida ! – Dans ce cas je ne peux rien pour toi, étranger. Je n’ai jamais vu une Zoubida avec une étoile au front. – Ce n’est pas grave, je reviendrai.25
12« Le stigmate en forme d’étoile » prêté dans cet extrait aux deux personnages signale que les romans abordent les mêmes caractéristiques : les questions de l’héritage et celles de la répétition tragique de l’Histoire. Toutefois, la revenance distingue Bled de Nedjma. Le jeu sur la répétition de « Zoubida » signale d’emblée, par la redondance, une ironie. Ce trope est renforcé par les modalisateurs typographiques (points d’exclamation et d’interrogation) qui soulignent les contradictions et ambiguïtés de cet échange. De plus, le déictique de l’énoncé « Celle-là ne ressemble à aucune autre » et sa sémantique insistent sur une différenciation avec l’œuvre de Kateb Yacine. Aussi, dans la mise en miroir des deux œuvres, l’écriture indique que c’est par réflexivité et non dans la répétition en tant que redite que Nedjma ressurgit dans Bled. La « réflexivité se situerait non pas au niveau de la narration, ou des déclarations des personnages, mais au niveau du symbolisme général et d’un projet de l’auteur de reconstruire ce qui ne se rencontre pas dans tous les textes »26.
13C’est ce que nous pouvons voir dans cet extrait de Nejdma placé à l’ouverture de Bled de Monénembo :
Comprends-tu ? Des hommes comme ton père et le mien… Des hommes dont le sang déborde et menace de nous emporter dans leur existence révolue, ainsi que des esquifs désemparés, tout juste capables de flotter sur les lieux de la noyade, sans pouvoir couler avec leurs occupants : ce sont des âmes d’ancêtres qui nous occupent, substituant leur drame éternisé à notre juvénile attente…27
14Il s’agit d’arracher les générations présentes à la répétition de l’histoire de leurs « pères », à « leur drame éternisé ». Aussi, à la fin du roman s’accomplit la « juvénile attente » formulée par cette injonction en paratexte de Bled. La revenance s’illustre comme un raccommodement de la trajectoire tragique attendue, en bouleversant la fin (de l’histoire) transformée en « conte ». Alors qu’elle est en prison, la narratrice rencontre un bel et riche homme avec qui elle se marie et fonde une famille, échappant ainsi au déterminisme attendu des dégâts causés par l’inexorable « roue de l’histoire »28.
À présent, les barreaux qui m’entourent sont d’une tout autre nature : juste des palmiers, des acacias et des dunes. […] Lors de ma condamnation non plus, je n’avais rien compris. Et j’avais été en prison. Cette fois-ci, me voilà dans une oasis sans savoir le désert.29
15Pour Tierno Monénembo et Abdourahman Waberi, la littérature semble d’abord être un engagement orienté vers la mémoire silencieuse. Leurs poétiques de la revenance sont inspirées par l’Histoire postcoloniale qu’elles modélisent dans un discours de la répétition, du retour et d’une mémoire enfouie qui agit comme un révélateur de paroles inédites et de compréhensions non encore écloses. Dans Bled et Passage des larmes, ces revenances qui se traduisent par une reviviscence d’archives matérielles inattendues et de mise en relation de traces mémorielles apparaissent comme des procédés qui permettent aux auteurs de joindre leur démarche littéraire à une démarche historique.