Sade en jeu
Actes du Colloque international organisé par
Jean-Christophe Abramovici (Sorbonne Université),
Florence Lotterie et Eric Marty (Paris-Diderot)
du 25 au 27 septembre 2014 à Paris.
Voilà maintenant plus de trente-cinq ans que, dans l’un des premiers ouvrages collectifs académiques consacrés à l’œuvre du marquis de Sade à l’issue d’un Colloque de Cerisy (Sade : écrire la crise, dir. Michel Camus et Philippe Roger, Paris, Belfond, 1983), Pierre Frantz interrogeait déjà non pas seulement la place du théâtre dans l’œuvre de Sade, mais la théâtralité de l’œuvre de Sade. Ce sont les enjeux de cette distinction, dont nous continuons à parier qu’elle est productive, que nous avons souhaité élargir et rouvrir à discussion collectivement en 2014, à l’occasion d’un colloque tenu à Paris-Diderot et en Sorbonne et qui a réuni des chercheurs, confirmés ou débutants, venus de divers horizons géographiques (France, Russie, Brésil, Croatie, États-Unis) et disciplinaires (littérature, histoire, arts visuels, philosophie, psychanalyse).
Englobant l’idée de théâtralité dans le renouveau des études sadiennes, la notion de mise en jeu nous a semblé opportune pour interroger la présence de Sade aujourd’hui dans d’autres aires culturelles (depuis 2014, la Chine est ainsi devenue « sadienne ») et dans d’autres langages médiatiques ; de confronter les différents modes de réception de son œuvre (poétique, historique, idéologique ou médicale) ; enfin, d’interroger les reconfigurations de l’œuvre sadienne, trop souvent confondue avec sa seule partie clandestine et violente.
Que faire, aujourd’hui, des catégories naguère proposées par Michel Delon pour appréhender l’œuvre depuis sa répartition entre territoires « ésotérique » et « exotérique » ? Le colloque fut en particulier l’occasion d’interroger sa part comique, que venaient de remettre en lumière les éditions des Contes libertins (éd. Stéphanie Genand, GF-Flammarion, fév. 2014) et des Contes étranges (éd. Michel Delon, « Folio classique », juin 2014). Mais il revint aussi, et sans doute pas sans que cette seconde réévaluation ne soit liée à la première, sur le temps de la psychiatrisation, l’insistante hypothèque du « sadisme » et la légende noire où se mêlent, dans un imaginaire indéfiniment reconvoqué, la part de la cruauté, l’ombre de la Bastille, l’insurrection révolutionnaire et le cri silencieux de la folie.
Que ces fétiches de la mémoire sadienne aient contribué à l’effacement de l’œuvre, de ses complexités, de ses secrètes ambiguïtés, rien de plus sûr. Les actes du colloque ne prétendent à rien d’autre qu’à une contribution parmi d’autres* à leur remise en jeu.
Les communications que l’on trouvera ci-dessous ont été regroupées en quatre temps : « En scène(s) » rassemble quatre études qui réexaminent la question du théâtre et de l’œuvre de Sade ; « Autres scènes », quatre regards décentrés disciplinairement et chronologiquement portés sur ses écrits. Trois études posent l’iconoclaste question de savoir si Sade peut être considéré comme un « auteur comique » ; enfin, trois regards étrangers, venus du Sud et de l’Est, nous invitent à considérer, peut-être, un autre Sade.
Jean-Christophe Abramovici et Florence Lotterie
*Signalons à cet égard la parution toute récente de la biographie proposée par
Stéphanie Genand, Sade, Gallimard, Folio, « Biographies », 2018.
Nous remercions, pour leur soutien, le laboratoire CERILAC de Paris-Diderot (EA 4410),
le CELLF de Sorbonne Université, Éric Marty et l’Institut Universitaire de France.
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Textes réunis par
Jean-Christophe Abramovici (Sorbonne Université)
et Florence Lotterie (Paris Diderot),
et mis en ligne par Aurélien Maignant,
avec le soutien de l'Université de Lausanne.
Textes réunis par Jean-Christophe Abramovici, Florence Lotterie et Eric Marty
mis en ligne avec le soutien de l'Université de Lausanne.
- Mimesis dramatique, mimesis romanesque chez Sade : une œuvre à deux faces ?
Catherine Ramond - Fiction et théâtralité dans l’œuvre de Sade
Norbert Sclippa - Sade, des tréteaux aux barricades : vie et mort d’un personnage
Philippe Roger - Foucault et la folie sadienne. Retour sur une relation énigmatique (Sade à Charenton)
Éric Marty - Chimie et physique chez Sade : Le cas de la Durand et de l’âme ignée
Clara Carnicero De Castro - Le vice au pouvoir. Critiques de la prison dans les lettres de Sade
Marc Buffat - Sade et Proust : éléments pour une histoire du roman allégorique moderne
Guillaume PERRIER - Du marquis de Sade au sadisme : de l’antonomase aux définitions médicales en France et en Allemagne autour de 1900
Pascal Pierlot - L’inspiration médiévale de Sade dans Le Président Mystifié (1787) : un texte charivarique ?
Dominique Hölzle - Les Cent Vingt Journées de Sodome lues au miroir des Historiettes
Vincent Berthelier - La lectrice de Sade : une femme qui rit ?
Isabelle Goncalves - Tourner en cercles. Les 120 journées de Sodome, La grande bouffe, Salò
Alberto Brodesco - Éditer et lire Sade en Russie
Véronika Altachina - Sade dans la poudrière balkanique. Le cas d’Ivo Bresan
Maja Vukušić Zorica - Nouvelles réflexions sur les traductions et la réception des œuvres de Sade en Espagne
Irene Aguilà-Solana