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Le vers libre

Le vers libre

Publié le par Bérenger Boulay (Source : CATHERINE BOSCHIAN)

« Le vers libre, de 1886 à 1914 : naissance, discours et réception »

En mars 2008, se déroulera à l'université Paul Verlaine de Metz un colloque intitulé
« Le vers libre, de 1886 à 1914 : naissance, discours et réception », organisé par le centre
de recherches « Écritures ».

Comité scientifique : Catherine Boschian-Campaner, HDR (Université de Metz) et
Laurent Mattiussi, Professeur (Université de Lyon III).
- Date : 20 et 21 mars 2008
- Durée : 2 jours
- Lieu : université Paul Verlaine.

Date limite d'envoi des propositions : 2 septembre 2007.

La possibilité qui s'offre aux poètes contemporains de choisir d'écrire en vers libres ou réguliers résulte d'une remise en question des règles poétiques héritées de la
tradition. Si la transgression des codes a toujours fait l'objet de tentatives individuelles, le champ temporel que nous circonscrivons, de 1886 à 1914, présente un
exemple sans précédent de réflexion sur l'outil poétique, qui radicalise une entreprise devenue un phénomène littéraire. La partition chronologique adoptée se réfère à
l'époque décrite par Michel Décaudin dans La Crise des valeurs symbolistes, 1895- 1914, mais commence neuf ans plus tôt, en 1886, année où La Vogue publie les
premiers vers libres. Une primeur revendiquée qui n'ira pas sans contestations, tant la
définition de cette forme, longuement évoquée par Jacques Roubaud dans La Vieillesse d'Alexandre, pose question. Le vers libre provoque un débat qui couvre la période
symboliste et post-symboliste et fait l'objet, en 1914, d'un bilan de La Terre latine. Des critiques y prédisent sa disparition prochaine alors que s'affirme la liberté éthique du poète, lequel, s'il a définitivement conquis le droit de choisir son mode d'expression, se trouve désormais placé devant l'obligation de réfléchir au bien-fondé de la forme utilisée. Une liberté qui, selon Francis Vielé-Griffin (1863-1937), dessert les poètes médiocres ; ce précurseur résumera les acquis d'une cause pour laquelle il a oeuvré en une formule : « le vers libre est une conquête morale ». L'objectif de ce colloque sera de décrire cette étape clé de l'histoire de la poésie et de rendre compte d'une réflexion qui implique des enjeux de nature poétique, éthique et culturelle.
La révolution du vers libre est indissociable de discours qui prônent la transgression systématique ou l'abandon de la prosodie traditionnelle et qui invitent à
repenser l'articulation entre le dit et le dire. Ce sont ces déclarations qui fondent la légitimité de la libération du vers que nous nous proposerons d'étudier. Un discours qui a bénéficié, quant à sa médiatisation, de l'essor des revues ; relayées par les lieux
de sociabilité où le débat se poursuit, celles-ci ont joué dans cette conquête un rôle de premier plan. Il conviendrait donc de considérer ces éléments contextuels, qui ont nourri la réflexion en cours.
Pour décrire ce tournant, il serait bon de prendre d'abord en compte la position de Verlaine et de Mallarmé, très réticents face au vers libre, et d'évoquer le problème
posé par Rimbaud, qui, avec « Marine » et « Mouvement » fut, à tort ou à raison, considéré comme l'auteur des premiers vers libres. Il s'agirait ensuite d'étudier les
textes légitimateurs de pionniers comme Gustave Kahn, Francis Vielé-Griffin, Edouard Dujardin, Moréas, Verhaeren, Marie Krysinska, mais aussi les déclarations de
prosélytes tels qu'Henri Ghéon et Georges Périn. Il serait judicieux de considérer également la position qu'adopte sur la question Paul Claudel, dont les versets
partagent plus d'un trait avec le vers libre, sans pouvoir pour autant lui être assimilés.
Il s'avère que le jeune Vielé-Griffin des Entretiens Politiques et Littéraires
associe dans un même vivat le vers libre et l'anarchie. Est-ce le fruit d'une réflexion
concertée ou l'expression d'un désir de provocation ? D'autres verslibristes ont-ils
tenu ce discours, qui lie révolution poétique et révolte contre les systèmes politiques ?
A quelles valeurs touchent alors la libération du vers ? L'interrogation pourrait
constituer un axe de réflexion supplémentaire.
Les déclarations des verslibristes suscitent la controverse. Selon Remy de
Gourmont, le vers libre fait l'objet d'un découpage arbitraire, selon d'autres, c'est un
vers amorphe introduit par des étrangers qui ne maîtrisent pas le français. Gide, quant
à lui, redoute qu'il ne conduise à la fusion des genres, au profit de la prose. Des
réserves et des critiques tranchées qu'il faudrait confronter aux textes fondateurs de la
notion et aux oeuvres produites afin d'en évaluer la pertinence.
L'étude des textes portant sur la question, publiés dans des revues ou des
préfaces, à moins qu'il ne soient intégrés à des lettres, devrait permettre d'établir une
typologie des traits descriptibles du vers libre et de restituer le contexte historicolittéraire
où cette libération acquiert tout son sens.
Par les études suggérées notre colloque vise à montrer la spécificité française -
ce qui n'exclut pas l'influence des Belges francophones dans ce débat – de la
révolution du vers libre symboliste. Ce que les anglophones soulignent en évoquant le
vers libre en français dans le texte. Sans dériver de l'objectif principal, on pourrait
s'intéresser au fait que celui-ci passe la Manche avec Ezra Pound et les Imagistes
(Manifeste de mars 1913 dans la revue Poetry) en 1913.
Suivre ces différentes pistes devrait permettre de mettre en valeur l'importance
d'une révolution, inséparable de la rigueur de la prosodie française et peu
compréhensible sans la prise en compte du contexte où elle surgit, qui ne se propose
pas moins que de repenser radicalement les relations du poète avec l'instrument de son
art. Par delà l'enracinement historique des réflexions sur le vers libre, nous souhaitons que les propositions de communications puissent mettre l'accent sur les
enjeux théoriques de ces discours et les questions soulevées par leur réception, en France et au-delà.
- Adressez votre proposition de communication, accompagnée d'une brève notice biobibliographique,
par courrier électronique avant le 2 septembre 2007 à Catherine Boschian-Campaner :
catherine.boschian@univ-metz.fr