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Écriture des sexualités de langue française 1990- (Colloque APFUCC, Kingston)

Écriture des sexualités de langue française 1990- (Colloque APFUCC, Kingston)

Publié le par Marc Escola (Source : Francesca Caiazzo)

Dans le cadre du colloque annuel de l'APFUCC (Association des Professeur.e.s de français des universités et collèges canadiens) 2025

Écriture des sexualités de langue française (1990- ) 

L’atelier proposé vise à rendre compte des écritures des sexualités contemporaines de langue française, tant sur le plan de leur potentiel émancipateur que sur celui de l’invention formelle. Longtemps confinée tantôt à la catégorie de l’érotisme, tantôt à celle de la pornographie, avec tous les problèmes théoriques qu’une telle division pose (Lavigne, 2014), l’écriture des sexualités est de plus en plus pratiquée et reconnue comme telle dans le champ littéraire de langue française.

Dans son étude de productions cinématographiques pornographiques, la chercheuse féministe Linda Williams (2008) opère une distinction entre les syntagmes « parler de la sexualité » et « dire la sexualité » : dans le premier cas, « parler de » présuppose un objet d’investigation stable, tandis que dans le deuxième, la sexualité renvoie plutôt à une construction discursive, un objet incertain qui se construit au fur et à mesure qu’on l’écrit. Ainsi, il ne s’agit plus d’étudier simplement la ou les « représentations littéraires » de la sexualité, mais bien de se concentrer sur la dimension productive et volontiers critique de l’« écriture ».

Depuis les années 1990, romans, nouvelles, poésies, autofictions et, plus récemment, témoignages et autothéories (Fournier, 2021), déconstruisent les scripts sexuels (Gagnon et Simon, 1973) préconçus et en imaginent parfois de nouveaux, explorant des territoires inédits. La dernière décennie est marquée par une politisation accrue des discours sur la sexualité, en particulier par une dénonciation sans précédent des violences sexistes et sexuelles emblématisée par le mouvement Me Too. Depuis lors, de nombreuses femmes, écrivaines ou non, ont pris la plume pour révéler les abus qu’elles ont subis ou dont elles ont été témoins, dénonçant parfois nommément un agresseur. Comment ces récits ont-ils été reçus par le public et par la critique universitaire ? Ancrés qu’il sont dans l’actualité socio-politique, quelle littérarité leur est reconnue?

Un tour d’horizon des publications contemporaines montre cependant que des textes publiés au tournant du XXIe siècle, tels que ceux de Virginie Despentes ou de Nelly Arcan, d’Annie Ernaux ou de Marie-Sissi Labrèche, étaient déjà pourvus d’une force critique indéniable, fustigeant les contraintes patriarcales qui régissent les comportements sexuels et façonnent les subjectivités. Comment alors penser cette ère pré-Me Too, et comment l’articuler au contexte post-Me Too d’aujourd’hui, représenté notamment par Giulia Foïs, Marie-Christine Lemieux-Couture et Vanessa Springora ? Entre-t-on désormais dans un âge post-post-Me Too, où les représentations des sexualités seraient bel et bien transformées par les prises de paroles féminines et féministes de ces dernières années? Si, à travers cette trajectoire, ce sont surtout les femmes qui ont à la fois dénoncé (des sexualités violentes) et énoncé (un appel à une paix sexuelle), qu’en est-il des hommes qui écrivent sur la sexualité? Ont-ils entendu le message? Parviennent-ils à reconfigurer les vieux patrons?

Vies affectives, homosexualités, identités et sexualités queer, travail du sexe, traumatismes liés aux violences, pour ne citer que ces quelques enjeux : les contributions pourront témoigner de la richesse des écritures des sexualités et, au-delà d’une analyse des représentations, proposer une réflexion sur les recherches poétiques et les reconfigurations narratives et énonciatives mises en œuvre par les auteurices.

Outre l’attention portée aux récentes évolutions historiques, nous souhaitons que l’atelier embrasse une pluralité d’aires culturelles et géographiques. Dans une perspective comparatiste, les récits de la sexualité chargés de problématiques postcoloniales, pensons par exemple à ceux d’Abdellah Taïa, de Sami Tchak, de Calixthe Beyala ou de Léonora Miano, pourront faire l’objet d’une lecture particulière.

De façon non-restrictive, les contributions pourront s'inscrire dans les axes suivants:

- Représentation des sexualités et reconfigurations narratives et génériques
- Écriture du sexe et engagement littéraire
- Violences sexuelles, répercutions de Me Too dans la production littéraire 
- Identités et sexualités queers et LGBT+
- Sexualités et contexte postcolonial
- Récits du travail sexuel
- Réception des écritures du sexe dans les études littéraires et les études de genre

Orientations bibliographiques:

ALLISON, Dorothy (2015 [1994]), Peau. À propos de sexe, de classe et de littérature, Paris, Cambourakis, 2015.

BLIDON, Marianne, Sébastien ROUX (2011), « L’ordre sexuel du monde », L’Espace Politique [En ligne], 13 | 2011-1, mis en ligne le 06 mai 2011, consulté le 08 octobre 2024. URL : http://journals.openedition.org/espacepolitique/1813 ; DOI : https://doi.org/10.4000/espacepolitique.1813

BOISCLAIR, Isabelle, Francesca CAIAZZO (2023), « Écritures des sexualités : avant- propos », Genre, sexualité & société [En ligne], 29 | Printemps 2023, mis en ligne le 26 juin 2023, consulté le 08 octobre 2024. URL : http://journals.openedition.org/ gss/8080 ; DOI : https://doi.org/10.4000/gss.8080

BOISCLAIR, Isabelle, Catherine DUSSAULT-FRENETTE (dir.) (2013), Femmes désirantes : art, littérature, représentations, Montréal, Remue-Ménage.

DAVID, Claire, « Les traces de la colère : la culture du viol en procès dans la littérature québécoise », Revue critique de fixxion française contemporaine [En ligne], 26 | 2023, mis en ligne le 15 juin 2023, consulté le 09 octobre 2024. URL : http://journals.openedition.org/fixxion/10750 ; DOI : https://doi.org/10.4000/fixxion.10750

DESPENTES, Virginie (2006), King Kong Théorie, Paris, Grasset.

DETREZ, Christine et Anne SIMON (2006), À leur corps défendant : les femmes à l’épreuve du nouvel ordre moral, Paris, Seuil.

DUBOIS, Jacques (dir.) (2015), Sexe et pouvoir dans la prose française contemporaine, Liège, Presses universitaires de Liège.

FOUCAULT, Michel (1976), Histoire de la sexualité I : La volonté de savoir, Paris, Gallimard.

FOURNIER, Lauren (2021), Autotheory as Feminist Practice in Art, Writing and Criticism, Cambridge, MIT Press.

GAGNON, John, William SIMON (1973), Sexual Conduct. The Social Sources of Human Sexuality, Chicago, Aldine.

HEKMA, Gert, Alain GIAMI (dir.) (2015), Révolutions sexuelles, Paris, La Musardine.

LAVIGNE, Julie (2014), La traversée de la pornographie : politique et érotisme dans l'art féministe, Montréal, Remue-Ménage.

MERLIN-KAJMAN, Hélène, La Littérature à l’heure de #MeToo, Paris, Éditions d’Ithaque, 2020.

SAINT-AMAND, Denis, Mathilde ZBAEREN, dir, « Violences sexuelles et reprises de pouvoir », Revue critique de fixxion française contemporaine [En ligne], 24 | 2022, mis en ligne le 15 juin 2022, consulté le 08 octobre 2024. URL : http://journals.openedition.org/fixxion/2548 ; DOI : https://doi.org/10.4000/fixxion.2548

SAINT-MARTIN, Lori, Rosemarie FOURNIER-GUILLEMETTE et Marie-Noëlle HUET (dir.) (2012), Entre plaisir et pouvoir : lectures contemporaines de l’érotisme, Montréal, Nota bene.

WILLIAMS, Linda (2014 [2008]), Screening sex. Une histoire de la sexualité sur les écrans américains, Nantes, Capricci.

ZENETTI, Marie-Jeanne (2022), « Que fait #MeToo à la littérature ? », Revue critique de fixxion française contemporaine [En ligne], 24 | 2022, mis en ligne le 15 juin 2022, consulté le 08 octobre 2024. URL : http://journals.openedition.org/fixxion/2148 ; DOI : https://doi.org/10.4000/fixxion.2148

Informations pratiques

Le colloque annuel 2025 de l’APFUCC se tiendra en personne. Les communications devront être en français.

L’adhésion à l’APFUCC est requise pour participer au colloque. Il faut également régler les frais de conférence de l’APFUCC. De plus amples informations seront envoyées à ce sujet.

Vous ne pouvez soumettre qu’une seule proposition de communication au colloque, sauf si vous soumettez également pour un atelier conjoint en tant que membre d'une autre association, ou si vous soumettez une proposition pour l'atelier de développement professionnel (atelier 1).

Veuillez soumettre votre proposition (titre, résumé de 250-300 mots, adresse, affiliation et notice bio-bibliographique de 150 mots) directement sur le site Fourwaves avant le 15 décembre 2024.

Pour soumettre sur le site, rendez vous sur la page principale (https://event.fourwaves.com/fr/colloque2025apfucc/pages) puis cliquez sur "soumission".