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Prestiges de la laideur. Peindre et penser la laideur, de l'Antiquité au romantisme

Prestiges de la laideur. Peindre et penser la laideur, de l'Antiquité au romantisme

Publié le par Eloïse Bidegorry (Source : Emmanuelle Hénin)

« Prestiges de la laideur.

Peindre et penser la laideur de l’Antiquité au romantisme »

 

Colloque international, Sorbonne Université (Centre de Recherches en Littérature Comparée)/ Université de Lorraine (Littérature, Imaginaire, Sociétés)

 

Maison de la Recherche de Sorbonne-Université,

27 et 28 novembre 2025

 

Présentation 

 

Dans son essai Fascination de la laideur (1978), Murielle Gagnebin ouvrait son chapitre consacré à « l’histoire du laid » en faisant remarquer que « les traités d’esthétique abordent la philosophie de l’art par le biais exclusivement – ou presque ! – de la beauté[1] ». On pourrait certes nuancer ce constat, quelque peu oublieux de l’Esthétique du laid de Karl Rosenkranz (1853) et des pages consacrées à la laideur par Theodor Adorno dans sa Théorie esthétique (1970). Il est toutefois un fait que la laideur a longtemps occupé une place marginale dans l’histoire de l’esthétique, qui préfère centrer son propos sur le beau, reléguant ainsi le traitement de la question du laid dans des parenthèses et ne l’évoquant souvent que de manière incidente. En effet, « le problème du laid semble […] ne pas faire problème[2] » dès lors qu’on admet l’idée qu’on ne saurait penser la laideur autrement qu’ex oppositione à partir d’une théorie du beau qu’il suffirait de renverser.

Toutefois, dès avant le romantisme et la réflexion hugolienne sur le grotesque, qui entendent libérer la laideur de la tutelle de la beauté, philosophes et esthéticiens n’ont jamais occulté la question du laid et en ont proposé, au cours des siècles, différentes définitions. Les pensées antique et médiévale ont ainsi souvent opposé le laid au beau selon une série de dichotomies se déployant sur les plans ontologique (l’être vs. le non-être), logique (le vrai vs. le faux), moral (le bien vs. le mal), formel (l’harmonie vs. la dysharmonie), esthésique (le plaisant vs. le déplaisant) et anthropologique (l’identité vs. l’altérité). Mais la figure platonicienne de Socrate-Silène ou le paradoxe de la représentation exposé dans la Poétique aristotélicienne montrent qu’elles ont aussi su penser l’articulation paradoxale de ces deux notions a priori antithétiques. C’est d’ailleurs en faisant fond sur cet héritage antique et médiéval que les théoriciens de l’art italiens parviennent, aux XVIe et XVIIe siècles, à rendre compte de la « belle laideur », d’abord sur le mode du paradoxe (une laideur peut être belle en dépit de sa laideur), puis, avec l’avènement de l’esthétique baroque, sur celui de l’oxymore (une laideur peut être perçue comme belle en vertu de sa laideur même), voire de la coïncidence des contraires dans le cadre de la théorisation de la laideur idéale et de la caricature. 

À ce stade, le visage de la laideur a résolument changé : celle-ci se présente alors non plus comme le contraire de la beauté, mais comme son envers ; et l’alliage du beau et du laid ne relève plus de l’antithèse, ou du paradoxe, ni même de l’oxymore, mais d’une évidence qui voudrait que l’un et l’autre constituent les deux faces d’une même médaille. Mais l’esthétique de l’ « automne de la Renaissance » et de l’époque baroque ne met pas un point final – loin s’en faut – à la réflexion autour de la laideur, puisqu’elle ne la considère toujours pas comme une catégorie esthétique à part entière jouissant d’une réelle autonomie, c’est-à-dire comme un concept que l’on parviendrait à penser indépendamment du beau. Pour assister à une première tentative de déliaison de ces deux notions, il faudra en effet attendre le XVIIIe siècle, où la laideur commence partiellement à s’émanciper de la beauté à travers le rôle que Burke (et d’autres) lui feront jouer dans le sublime.

Ce colloque entend donc revenir sur cette histoire de la conceptualisation et de la représentation de la laideur, en art et en littérature, de l’Antiquité au romantisme, époque qui voit une première « libération de cette catégorie[3] » avant les avant-gardes des XIXe et XXe siècle.

 

 

Modalités

 

Ce colloque interdisciplinaire s’adresse aux universitaires, chercheurs, docteurs et doctorants en littérature comparée, littérature française, littératures étrangères, histoire de l’art et esthétique. 

Il se déroulera à la Maison de recherche, 28 rue Serpente, les jeudi 27 et vendredi 28 novembre 2025.

Les propositions de communication, de 300 mots maximum et rédigées en français, en anglais ou en italien, seront accompagnées d’une brève notice bio-bibliographique et envoyées au plus tard le 30 avril 2025 aux adresses suivantes : henin.emmanuelle@gmail.com et olivier.chiquet@univ-lorraine.fr.

Il est prévu une publication des Actes du colloque.

 

 

Pour toute question ou information complémentaire, n’hésitez pas à contacter les organisateurs : 

Emmanuelle Hénin, Professeur de littérature comparée (Sorbonne Université) : henin.emmanuelle@gmail.com ;

Olivier Chiquet, Maître de conférences en études italiennes (Université de Lorraine) : olivier.chiquet@univ-lorraine.fr


 
[1] Murielle Gagnebin, Fascination de la laideur. L’en-deçà psychanalytique du laid, Paris, Champ Vallon, 1994, p. 77.
[2] Ibid., p. 79.
[3] Ibid., p. 96.