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Littératurophobie, littératurophilie ou littératurolâtrie ? Le procès de l’écriture, de la conscience et de la solitude dans les littératures africaines (revue Paradigmes)

Littératurophobie, littératurophilie ou littératurolâtrie ? Le procès de l’écriture, de la conscience et de la solitude dans les littératures africaines (revue Paradigmes)

Publié le par Marc Escola (Source : Pr. Foudil Dahou)

Appel à contribution pour la revue Paradigmes vol. VIII, n° 2 – mai 2025 

Éditeurs : 
Dre Louiza HACHANI (Université de Ouargla, Algérie) 
Laboratoire Le Français des Écrits Universitaires – LeFEU
Dr Sami CHAÏB (ENS de Ouargla, Algérie)
Pr. Foudil DAHOU (Université de Ouargla, Algérie)
Laboratoire Le Français des Écrits Universitaires – LeFEU

Date limite : 15 avril 2025 

Littératurophobie, littératurophilie ou littératurolâtrie ?

Le procès de l’écriture, de la conscience et de la solitude dans les littératures africaines

« [...] L’usage de l’aliénation culturelle comme arme de domination est vieux comme le monde ; chaque fois qu’un peuple a conquis un autre, il l’a utilisée. [...] On saisit le danger qu’il y a à s’instruire de notre passé, de notre société, de notre pensée, sans esprit critique, à travers les ouvrages occidentaux » (Cheikh Anta Diop).

Perdus au milieu du silence assourdissant de la diversité des doctrines et de la multitude des tendances idéologiques contemporaines qui traversent en permanence les sociétés – traditionnellement – de l’oral, les lecteurs africains des jeunes générations, conquis par l’écriture, subissent les effets de rênes des contradictions auctoriales qui dénigrent la véritable Parole africaine ancestrale – combien présente mais paradoxalement méconnue – Cheikh Anta Diop le regrettait déjà : « La facilité avec laquelle nous renonçons, souvent, à notre culture ne s’explique que par notre ignorance de celle-ci, et non par une attitude progressiste adoptée en connaissance de cause ». Des voix lucides s’élèvent, expressions joyeuses d’une singularité africaine que tente d’étouffer une dérégulation culturelle soutenue par une double tyrannie de l’imagination et de la sensibilité ambiantes – dont encore une fois, Cheikh Anta Diop avait une pleine conscience : « Le poison culturel savamment inoculé dès la plus tendre enfance, est devenu partie intégrante de notre substance et se manifeste dans tous nos jugements ». Si les ambitions auctoriales sont légitimes, les ambitions lectoriales le sont tout autant à une époque de ruptures où la révolution des idées, trop souvent intransigeante, emporte les mentalités « primitives » séduites par les chimères et conditionnées par les idéaux – pour Cheikh Anta Diop le remède est entre nos mains : « Il devient donc indispensable que les africains se penchent sur leur propre histoire et leur civilisation et étudient celles-ci pour mieux se connaitre : arriver ainsi par la véritable connaissance de leur passé, à rendre périmées, grotesques et désormais inoffensives ces armes culturelles ». 

Refusant de se laisser distancer, les littératures africaines renouvellent leur vocation commune dont le caractère écologique fondamental est de s’inscrire dans la vaste étendue et la durée infinie. Soucieuses de s’imprégner des principes de la sociologie de l’action et de la sociologie de l’évolution – « […] l’une portant sur les effets voulus par les auteurs des messages, l’autre réfléchissant sur les effets à long terme, généralement imprévus » (Dumesnil, 1962, p. 108), les littératures africaines se dévisagent et se contemplent dans les miroirs de leurs sociétés respectives subjuguées par les voix de l’émancipation. Elles savent depuis les temps immémoriaux qu’« […] une société est […] un être vivant, mais qui se distingue des autres en ce qu’il est avant tout constitué par une conscience. Une société est une conscience vivante, ou un organisme d’idées » (Espinas, 1877, p. 361). 

Les peuples africains, riche de leurs diversités constitutives et de leurs mentalités essentielles, ont besoin, dans un esprit de solidarité, de réhabiliter et de revenir humblement, selon le mot succulent de Birago Diop, à la sagesse des « Gardien[s] de mémoire et berger[s] de souvenirs » (1963) que la Littérature a toujours su rassembler, à la suite de la Parole fondamentale, autour du « feu sacré » pour avoir compris depuis la Nuit des temps que « […] derrière toutes les différences et les nuances individuelles il subsiste une sorte de résidu psychologique stable, fait de jugements, de concepts et de croyances auxquels adhèrent au fond tous les individus d’une même société. Cet ensemble constitue la structure mentale spécifique de chaque civilisation » (Bouthoul, 1970, p. 30).   

Il faut, dans une juste mesure, reconnaître que Descartes avait somme toute probablement raison : « […] la diversité de nos opinions ne vient pas de ce que les uns sont plus raisonnables que les autres, mais seulement de ce que nous conduisons nos pensées par diverses voies, et ne considérons pas les mêmes choses » (1860, p. 2-3). Il est vrai que les passions des Anciens ont éternellement été modérées, faisant preuve de cet équilibre nécessaire à toute écologie culturelle – en dépit du point de vue et de l’opinion d’un Chateaubriand quelque peu conciliant : « On ne peut guère supposer que des hommes aussi sensibles que les anciens eussent manqués d’yeux pour voir la nature et de talent pour la peindre, si quelque cause puissante ne les avait aveuglés. Or cette cause était la mythologie, qui, peuplant l’univers d’élégants fantômes, ôtait à la création sa gravité, sa grandeur et sa solitude » (1802, p. 221).  

Aujourd’hui, les esprits chagrins, de tous bords, font le procès d’une écriture, d’une conscience et d’une solitude que les littératures africaines revendiquent dans leur singularité – pourtant, « il n’est pas défendu au poète et au philosophe d’essayer sur les faits sociaux ce que le naturaliste essaye sur les faits zoologiques, la reconstruction du monstre d’après l’empreinte de l’ongle ou l’alvéole de la dent » (Hugo, 1859, p. 15-16) ; les littératures africaines possèdent aussi leurs « monstres sacrés ». On aurait assurément tort de l’oublier. Surtout pas d’oubli ; car « tandis que la lointaine civilisation chinoise retarde l’heure de sa mort en se tournant vers son propre passé, tandis que l’Inde répand, pour soulager sa fièvre, une religion sur l’Asie, l’ombre noie peu à peu les rivages où s’est écoulée l’éclatante et virile jeunesse du monde occidental » (Faure, 1921, p. I). Et l’Afrique ? … tout le reste ne serait-il réellement et finalement que… littérature ?

Axes de réflexion et de perspective (liste indicative)

  • Les manifestations de la Parole africaine ancestrale dans les littératures africaines contemporaines.  
  • La prise de conscience et la solitude des femmes de lettres dans les littératures africaines contemporaines. 
  • Le regard de l’Occident sur l’Afrique dans les littératures africaines contemporaines.
  • Le regard de l’Africain sur l’Afrique dans les littératures africaines contemporaines.
  • La symbolique du génie africain.
  • L’écriture autobiographique africaine : entre conscience et solitude.

Objectifs

  •  « Faire la lumière sur le rôle civilisateur des Africains dans l’histoire » (Ch. A. Diop) et la littérature.
  • Redécouvrir la culture africaine primordiale à travers les grandes œuvres de la littérature.
  • « Révéler » ce que l’africanité primordiale a toujours attendu de la négritude et de la maghrébinité. 

Bibliographie indicative

BOUAMAMA, Saïd (2016). Figures de la révolution africaine de Kenyatta à Sankara. La Découverte. BOURGEOIS, Léon (1896). Solidarité. Paris : Armand Colin et Cie, Éditeurs. BOUTHOUL, Gaston (1970). Les mentalités. Paris : PUF (5e édition). CHARLE, Christophe (1990). Naissance des « intellectuels » (1880-1900). Paris : Éditions de Minuit, Collection « Le sens commun ». CHARLE, Christophe (2015). La dérégulation culturelle : essai d’histoire des cultures en Europe au XIXe siècle. Paris : PUF. CHATEAUBRIAND, François René de (1802). Génie du christianisme, ou Beautés de la religion chrétienne. Tome second. Paris : Chez Migneret, Imprimeur. CHATEAUBRIAND, François René de (1850). Mémoires d’outre-tombe. Tome neuvième. Paris : Eugène et Victor Penaud Frères, Éditeurs. DESCARTES, René (1860). Discours de la méthode : pour bien conduire sa raison et chercher la vérité dans les sciences. Paris : Librairie de L. Hachette et Cie. DIOP, Birago (1963). Contes et Lavanes. Paris : Présence Africaine. DIOP, Cheikh Anta (1954). Nations nègres et culture. Paris : Éditions Africaines. DIOP, Cheikh Anta (1960). L’Afrique noire pré́-coloniale : étude comparée des systèmes politiques et sociaux de l’Europe et de l’Afrique noire, de l’antiquité́ à la formation des états modernes. Paris : Présence africaine. DUMESNIL, Claude (1962). Jean Cazeneuve, Sociologie de la radio-télévision. Paris : PUF, Collection « Que sais-je ? ». Les Cahiers de la publicité, n° 4, p. 108.  DURKHEIM, Émile (1911). « Jugements de valeur et jugements de réalité ». Revue de Métaphysique et de Morale, n° 4, 19e Année, p. 437-453. Société française de philosophie. ELA, Jean-Marc (1989). Cheik Anta Diop ou l’honneur de penser. Paris : L’Harmattan, Collection « Classiques ». ESPINAS, Alfred (1877). Des sociétés animales : Étude de psychologie comparée. Paris : Librairie Germer Baillière et Cie. FAURE, Élie (1921). Histoire de l’art – L’art médiéval. Paris : Les Éditions G. Crès et Cie. HENRIOT, Émile (1953). Courrier littéraire XIXe siècle :  Les Romantiques. Paris : Éditions Albin Michel. HUGO, Victor (1910). Le dernier jour d’un condamné. Œuvres complètes de Victor Hugo. Roman. 1. Paris : La Librairie Ollendorff. HUGO, Victor (1859). La légende des siècles. Tome 1. Paris : Michel Lévy Frères – Hetzel et Cie. LE GOFFIC, Charles (1919). La littérature française au XIXe siècle : tableau général. Tome I. Paris : Bibliothèque Larousse. LE GOFFIC, Charles (1919). La littérature française aux XIXe et XXe siècles : tableau général accompagné de pages types. Tome II. Paris : Bibliothèque Larousse. LÉVY-BRUHL, Lucien (1925). La mentalité primitive. Paris : Librairie Félix Alcan (4e édition). Consulté le 31.01.2025. MANDELA, Nelson (1994). Un long chemin vers la liberté. Fayard. MOSCOVICI, Serge (2000). « La mentalité prélogique des primitifs et la mentalité prélogique des civilisés », p. 208-231. Dans MOSCOVICI, Serge (dir.) (2000). Psychologie sociale des relations à autrui. Paris : Nathan Université/HER, Collection : Psychologie Fac.  OMOTUNDE, Jean-Philippe (2000). L’origine négro-africaine du savoir grec. Volume 1. Éditions Menaibuc, Collection « Connaissance du monde nègre ». TOURAINE, Alain (1965). Sociologie de l’action. Paris : Les Éditions du Seuil. TOURAINE, Alain (1978, octobre). Théorie et pratique d’une sociologie de l’action. Sociologie et sociétés, vol. 10, n° 2, p. 149-188. https://doi.org/10.7202/001798ar  VALLEREY, Gisèle (1955). Contes et Légendes de l’Afrique Noire. Paris : Fernand Nathan Éditeur.

Cet appel à contribution s’adresse à tous les universitaires, quel que soit leur grade, ainsi qu’aux doctorants et post-doctorants qui souhaitent émettre leurs opinions et rendre compte de leurs expériences personnelles.

Les auteurs sont invités à soumettre en format Word leurs propositions d’articles via la plateforme ASJP suivant le lien : https://www.asjp.cerist.dz/en/PresentationRevue/646                         

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Pour tous renseignements complémentaires s’adresser à : revueparadigmes@gmail.com 

Dates importantes

  • Lancement de l’appel à contribution : 1er février 2025
  • Dernier délai pour la réception des articles : 15 avril 2025
  • Réponse aux auteurs : à partir du 20 avril 2025
  • Publication et mise en ligne : mai – juin 2025

Résumé- « … qui a peur ; … qui aime ; … qui adore. –phobie ; –philie ; –lâtrie. Et si les suffixes pouvaient, dans leur pouvoir de nuancer, se faire confronter le regard primitif et le regard moderne dans un instant éternel de lucidité que les littératures africaines contemporaines traduiraient parfaitement pour être les héritières affectionnées de la Parole ancestrale primordiale. Les hommes en seraient-ils contrariés à l’extrême ? ou bien, refugiés dans l’ascèse, sauront-ils pactiser avec leur conscience et leur solitude dans un procès d’écriture qui mènera inexorablement la littérature soit à sa propre négation soit au renouvellement de l’innocence des hommes ?

Mots-clés : littérature, écriture, conscience, solitude, africaine.