Introduction : Fictions impossibles
1La pensée de la fiction semble être née jumelée à celle de possibilité. Selon Aristote l’histoire raconte le particulier, ce qui a eu lieu, tandis que la poésie traite du général, de ce qui « pourrait arriver », selon la vraisemblance ou la nécessité dans le déroulement de l’intrigue (Poétique 1451b)1. Néanmoins, chez Aristote, l’exclusion de l’impossible n’est pas totale : le Stagirite estime, en effet, que « Du point de vue de la poésie un impossible persuasif (pithanon adunaton) est préférable au non persuasif, fût-il possible (apithanon dunaton) (Aristote, 1461 b9). Cependant, à partir de la Renaissance, les théoriciens néo-aristotéliciens (comme par exemple Lodovico Castelvetro, 1570, ch. 25), marginalisent radicalement l’impossible (comme le suggèrent les omissions ou les traductions erronées de ce passage) (Sozzi, 1991 ; Lavocat, 2010). Ils s’opposent en cela aux néo-platoniciens bien plus accueillants aux paradoxes (comme, notamment, Francesco Patrizzi, 1586), ce qui se traduit, dans les fictions du XVIe siècle, par une débauche de monstres, d’allégories, d’impossibilia en tout genre, dont l’œuvre extravagante de Barthélémy Aneau donne un bon exemple2. Dès lors, l’acceptation, et même la promotion de la fiction sont conditionnées par son inféodation à la possibilité, bientôt redéfinie en vraisemblance : comme on sait, celle-ci, chez les théoriciens du XVIIe siècle, se définit aussi bien par les impossibilités physiques, les contradictions logiques, que par les atteintes à la bienséance, morale et politique, en conformité avec l’opinion publique. L’Abbé d’Aubignac juge ainsi que représenter un roi injuste et tyrannique est de l’ordre de l’impossible ([1669] 2011)3 ! La fiction vraisemblable est adoubée, à condition qu’elle soit distinguée de « la fable », qui concentre à la fois l’opprobre et les impossibilités : dieux libertins aux pieds de chèvre, fées, animaux parlants (Huet, [1678] 2004). Cette évolution peut aussi bien être comprise comme un progrès de la rationalité (Duprat, 2009) que comme la mainmise de la censure (Garnier, 1976 ; Zanin, 2018). Ce privilège est durable et enraciné dans la culture occidentale : comme le remarque Margaret Cohen (1999) à propos du roman du XIXe siècle, nous sommes induits à valoriser les romans réalistes plutôt écrits par des hommes, au détriment des fictions fantaisistes et sentimentales qui caractérisent la production féminine romantique.
2Pourtant l’impossible résiste. Il y eut toujours des genres comme l’opéra pour le cultiver, destinés aux femmes et aux enfants, comme les contes, ou au divertissement, comme le théâtre à machine. Aujourd’hui, la domination de la fantasy ressemble fort à une revanche de l’impossible. Des séries aux jeux vidéo inspirés par les univers de Tolkien ou Lovecraft, aux multivers de la franchise Marvel, s’affirme un goût renouvelé pour les mondes impossibles. Le règne (jamais absolu) du roman vraisemblable aura duré un peu plus de trois siècles, de la fin du XVIIe siècle à la moitié du XXe siècle.
3C’est peut-être que la relation de la fiction à l’impossible, loin d’être conjoncturelle, est plus fondamentale qu’il n’y parait. Même les fictions les plus mimétiques de la réalité commettent des infractions à la vraisemblance. Comment le narrateur d’À la recherche du temps perdu pouvait-il rapporter la conscience de Bergotte au moment de sa mort ou l’amour de Swann qu’il ne pouvait pas connaître (Genette 1972) ? Le narrateur du récit à la troisième personne n’éprouve aucune difficulté à entrer dans la psyché des personnages et à nous livrer ses pensées et ses intentions les plus secrètes. Ce phénomène peut être interprété comme un déplacement de la subjectivité langagière – celle-ci ne se situe pas dans le « je » du narrateur mais dans le « il » ou le « elle » des personnages – et à ce titre comme un artifice extraordinaire qui caractérise le propre du discours fictionnel (Hamburger, [1957] 1986 ; Banfield, 1982 ; Cohn, 1999). De ce fait, l’impossibilité est au cœur du roman moderne et occidental.
4Cependant, ce type d’impossibilité passe généralement inaperçu, car le lecteur ou la lectrice l’envisage comme une convention propre au récit fictionnel. Pendant très longtemps, les histoires insérées ont été racontées par des témoins fictifs à la mémoire si prodigieuse qu’ils pouvaient reproduire mot pour mot les lettres, les conversations, les poèmes récités par les protagonistes de leur récit ; on ne sait trop pourquoi cette convention, à un moment de l’histoire du roman, un peu avant l’émergence du roman réaliste, n’a plus été acceptée. Car les lecteurs, ou les spectateurs, peuvent aussi bien manifester la tolérance plus large à l’égard de l’invraisemblance la plus élémentaire, que tâtillons, voire obsessionnels, dans le relevé des impossibilités. Nombreux sont ceux et celles qui se vouent à traquer et enregistrer les « goofs » (c’est-à-dire les incongruités, les erreurs de la continuité, les anachronismes, etc.) dans les fictions écrites ou filmiques (Hamus-Vallée et Caïra, 2020). Les anomalies dans les fictions nous fascinent ; elles peuvent en outre donner lieu à des activités herméneutiques intenses.
5L’ambivalence de la réception est peut-être corrélée à l’instabilité du statut de l’impossible. Celui-ci fait en effet débat. Si certains considèrent que les fictions peuvent être définies comme des « mondes possibles impossibles » (Lavocat, 2016), la plupart des théoriciens de la fiction soutiennent que les contradictions fragilisent, voire ruinent la construction du monde fictionnel (Pavel, 1988 ; Doležel, 1998). Le « principe du départ minimal », selon Marie-Laure Ryan, suppose que nous reconstituons le monde d’une fiction ou d’un énoncé contrefactuel comme étant le plus proche possible de la réalité que nous connaissons (Ryan 1980, p. 406) ; par conséquent, nous adoptons des stratégies de lecture pour réduire les paradoxes et rationaliser les impossibilités (Ryan, 2010, p. 77-80). Cependant, le courant de la narratologie dite « non-naturelle » a ranimé l’intérêt des narratologues pour les fictions non réalistes (Richardson, 2015 ; Alber, 2016).
6Comme on l’a vu précédemment, à propos de l’abbé d’Aubignac, la définition de l’impossible oscille entre le domaine de l’impossibilité physique ou logique à celui de l’éthique. Peut-on se livrer à une fiction qui provoque une aversion morale ? David Hume constatait l’impossibilité d’éprouver du plaisir à l’égard des œuvres qui décrivent la perversion morale ([1757] 1965). En se référant à ce texte, Kendall Walton (1990) affirme qu’on se refuse à prendre part à l’imagination dont on ne peut accepter le présupposé éthique. Pourquoi cette résistance alors qu’on est bien conscient de la fictionnalité des œuvres en question (Weatherson, 2004) ? D’autre part, est-il légitime de juger des personnages de fiction comme s’ils étaient des personnes réelles ? Faut-il s’inquiéter des dangers de l’identification avec ces personnages, ou de la transmission des valeurs de l'auteur implicite (voir Booth, 1988, p. 41) ? La question de la nature et de la légitimité des jugements de nature axiologiques à propos des fictions se pose aujourd’hui de façon pressante, car elle implique des décisions quant à ce qui est ou non lisible, ce qu’il est possible ou non d’enseigner par exemple (Tortonèse, 2023 et Delale et al., 2023)4. Les enjeux de ces questions ne sont donc pas seulement philosophiques et théoriques, mais pragmatiques et politiques. En outre, nous assistons à une résurgence de la méfiance généralisée ou même de la haine à l’égard de la fiction, qui se trouve soit dans les non-fictions, au nom de la « faim de réalité (reality hunger) » (Shields, 2010), soit, paradoxalement, à l’intérieur de la fiction elle-même.
7Les articles réunis ici apportent des perspectives historiques et théoriques sur la question des impossibilités de et dans la fiction sous trois angles majeurs. 1) Une analyse des cas limites – narrations et mondes impossibles – éclaircit les paradoxes et contradictions qui ont été jugés comme incompatibles avec la construction d’un univers de la fiction. 2) L’acceptation et le rejet des contradictions et des impossibilités physiques, logiques, psychologiques ou autres varient selon les périodes historiques et les traditions culturelles. Nous nous proposons d’explorer ces degrés de tolérance variables et fluctuants à l’égard des impossibilités de la fiction. 3) Les fictions sont parfois considérées comme impossibles par elles-mêmes, et ce, pour des raisons politiques, religieuses ou éthiques ou à cause d’un supposé épuisement des formes et motifs fictionnels. La version la plus connue de ce débat concerne la non-représentabilité de certains sujets, notamment les atrocités historiques et le traumatisme.
8Dans ce cadre conceptuel, les articles offrent une gamme de perspectives aussi bien disciplinaires qu’interdisciplinaires (histoire et théorie littéraires, narratologie, philosophie, philosophie du droit, cinéma et études des médias). Les articles traitent de périodes historiques et de traditions culturelles différentes, et étudient des œuvres de fiction dans différents médias (y compris les jeux vidéo, le cinéma, la bande dessinée et les séries télévisées).
9La première partie, « Narrateurs impossibles », prend pour objet des situations narratives impossibles où le narrateur raconte ce qu’il ne pourrait pas raconter, d’un point de vue logique ; les articles font apparaître un degré d’impossibilité croissante. Camille Brun étudie la duplicité du discours préfaciel dans deux textes que Balzac publie sous le pseudonyme de Saint-Aubin : les mensonges du préfacier impossible, qui à la fois affirme et nie la paternité des œuvres, se transforment en mise en abyme de la fiction. La question du mensonge revient dans l’article de Maxime Decout sur un texte contemporain, Veuves au maquillage de Pierre Senges, où un narrateur non fiable raconte son propre démembrement. L’impossibilité de cette situation d’énonciation sera pourtant atténuée par la multiplication d’incertitudes sur le statut de la narration, suscitant un questionnement sur la validation du discours et une réflexion sur la nature de la fiction, et de ses rapports avec l’imposture. Avec l’étude de Lolita Felgueiras nous passons du narrateur démembré au narrateur mort : dans J’irai cracher sur vos tombes de Boris Vian, Lee Anderson raconte en effet une histoire qui inclut sa propre mort, dans le cadre d’un récit qui paraissait à première vue réaliste. Cette impossibilité énonciative, non assumée par le texte, génère une indécision à la fois sur la genèse et sur le statut générique du roman.
10Dans la deuxième partie, deux articles étudient les affordances propres au médium cinématographique dans la mise en scène des impossibilités narratives. Dans son étude du film Little Women de Greta Gerwig, Caroline Bem montre comment Gerwig mobilise la forme médiale et narrative du diptyque pour créer un espace impossible, non seulement au niveau du dénouement de l’intrigue (le mariage de Jo March a et n’a pas lieu), mais aussi dans l’entre-deux intermédial qui permet de suspendre l’opposition entre le passé et le présent, l’hétérosexualité et l’homosexualité, le livre et le film, l’adaptation d’une fiction et la fictionnalisation de l’histoire. En revanche, Rami Gabriel met en lumière les limites de la réflexivité cinématographique dans The Other Side of the Wind d’Orson Welles ; dans ce cas, la démarche métaleptique du cinéaste produit une incohérence qui mène à l’effondrement des cadres diégétiques et à l’échec du projet autofictionnel.
11Dans la troisième section, la notion de monde possible, qui conditionne beaucoup le statut de l’impossibilité logique, est défendue et contestée. Marie-Laure Ryan, à partir de la prémisse selon laquelle un monde possible ne peut contenir de contradiction, et que celles-ci ne peuvent être imaginées, décrit les stratégies du lecteur ou de la lectrice pour isoler, ignorer, neutraliser les impossibilités qu’il ou elle rencontre. Revenant aux conceptions aristotéliciennes du possible, du vraisemblable et du nécessaire du point de vue de l’intrigue, Claude Calame, tout en récusant une définition de la fiction comme monde possible au nom d’une conception pragmatique de la fiction, analyse la poétique narrative grecque, et la façon dont elle rend l’impossible vraisemblable. Monique Villen, à partir des travaux de Marie-Laure Ryan, soutient néanmoins la possibilité d’imaginer l’impossible, à travers l’exemple de la science-fiction (en particulier d’un roman d’Ursula Le Guin). Enfin, Fuhito Tachibana, à partir de l’exemple de Mallarmé, pose la question de la métaphore et de la poésie, par rapport à l’opposition entre fiction et non-fiction. Il plaide pour une conception de la fiction qui ne reposerait pas sur l’idée de présence d’un monde fictif.
12La quatrième partie, « Anomalies narratives et genres impossibles », s'intéresse aux non-conformités et aux non-conformismes dans de différents médias. Alexis Hassler propose une étude transmédiale de la narration en mettant en parallèle le narrateur récalcitrant du roman comme celui de Jacques le fataliste et son maître de Diderot et le « glitch » volontaire des jeux vidéo qui mime le dysfonctionnement informatique : empêchant les joueurs de suivre le bon déroulement narratif, ce dernier dispositif les invite, par un jeu interactif, à la création diégétique. Annick Louis se penche pour sa part sur les « goofs » dans les films et les séries télévisuelles. Selon Louis qui examine un épisode de The Big Bang Theory où il est question d’une incohérence narrative d’Indiana Jones, les défauts à l’égard de la plausibilité ne détériorent pas nécessairement l’immersion fictionnelle ni, par conséquent, le plaisir de la fiction, à moins qu’ils ne concernent les lois des genres. La question des genres est également importante dans les deux articles qui prennent pour objet la modernité littéraire. Analysant « Sur le roman pur », texte théorique de Riichi Yokomitsu, Kohei Takahashi montre que l’improbabilité constitue un enjeu à la fois esthétique et épistémique pour ce romancier japonais qui voulait établir un nouveau réalisme dans les années 1930. Jeppe Barnwell, quant à lui, s’interroge sur le réalisme de la littérature occidentale à travers les œuvres de Peter Seeberg. Le « documentarisme fictionnel » que pratique le romancier danois illustre un paradoxe de la pseudo-factualité : pour devenir l’œuvre littéraire, ce type de texte qui se caractérise par la mimèsis formelle a recours à l’inventivité qui provient parfois de l’impossibilité.
13La cinquième partie, « Versions et virtualités narratives », met en valeur les possibilités des fictions impossibles. L’article de John Pier sur « Mobius the Stripper » de Gabriel Josipovici explore la richesse interprétative de ce texte qui nous interdit la lecture linéaire par un dispositif qui sépare les pages en deux. Cette œuvre expérimentale soulève, selon Pier, les paradoxes non seulement (onto)logiques et narratologiques, mais aussi médiatiques pour mettre la lecture en question. C’est sur les récits à multiversion que se penche Brian Richardson qui s’intéresse également aux stratégies de la réception des narrations à la fois cinématographiques et littéraires. Établissant la typologie des récits à multiversion à travers les films comme Lola rennt de Tom Tykwer ou Le Jour de la marmotte de Harold Ramis mais aussi le roman comme La Jalousie d’Alain Robbe-Grillet, Richardson met en lumière la nature antimimétique et les effets cognitifs – surtout l’ironie – de ces récits qui se répètent en se variant. Pour Jean-Bernard Cheymol qui analyse 3" de Marc-Antoine Mathieu, l’impossibilité relève moins de l’ontologie que de la perception. S’appuyant sur la philosophie de Bergson, Cheymol souligne que cette bande dessinée numérique qui nous fait face à ce qu’il appelle l’« hyper-présence » du réel proche de la poétique de la simultanéité nous rend sensible au passage du virtuel à l’actuel. Revenant à la littérature, Martin Riedelsheimer nous invite à réfléchir sur l’infini narratif qui s’oppose à la finitude textuelle. L’infini étant, selon la théorie de George Lakoff et Rafael Núñez, une métaphore conceptuelle, ce sont les figures comme la mise en abyme ou la répétition qui donnent lieu à l’infini littéraire. Examinant dans cette perspective les figures de l’infini dans Cloud Atlas de David Mitchell et Apeirogon de Colum McCann, Riedelsheimer nous fait remarquer que ces figures témoignent des soucis éthiques de la littérature contemporaine.
14Le sixième ensemble d’articles déplace la question de l’impossibilité vers le champ moral, à partir du cas limite que constitue la représentation du viol et d’autres violences sexuelles dans la fiction et surtout sur la scène du théâtre. Véronique Lochert se penche sur les débats qui émergent au XVIIe siècle mais aussi à l’époque contemporaine sur la représentation de la violence sexuelle. Celle-ci constitue un objet paradoxal qui met à l’épreuve les limites de l’imagination, du récit ou de la mise en scène, tant du point de vue des mécanismes de sa représentation que de sa réception : quelles émotions suscite la mise en fiction d’un viol, et à quel public s’adressent ces fictions ? Zoé Schweitzer, pour sa part, considère le cas extrême d’une histoire mythique féroce, celle du viol et de la mutilation de Philomèle, crime suivi d’une vengeance tout aussi hyperbolique. Qu’elles passent par l’édulcoration ou l’invisibilisation de la violence au nom des convenances, ou par sa représentation à travers les procédés de figuration originaux, les pièces tragiques étudiées mettent en lumière le pouvoir heuristique de la fiction qui cherche à rendre la violence compréhensible. Enrica Zanin aborde enfin la question de l’évolution historique des représentations du sexe, à partir du cas des nouvelles de la fin du XVIe siècle et du XVIIe siècle. Si l’émergence de la censure en Europe et l’influence d’une nouvelle conception de la mimésis font disparaître les scènes érotiques explicites, le viol reste toutefois présent dans les fictions en raison de sa portée symbolique et exemplaire ; il fait l’objet de stratégies narratives permettant de contourner les difficultés morales qu’il pose.
15Dans le septième et dernier groupe de textes, les auteurs s’intéressent aux impossibilités morales dans les fictions, et de la fiction. Carola Barbero et Alberto Voltolini, qui se définissent eux-mêmes comme des « moralistes modérés », analysent le phénomène de la résistance imaginative morale, y compris dans les textes humoristiques qui violent les principes moraux, pour montrer que même dans ce cas, la participation imaginative est impossible. Christine Baron évoque ensuite les « jurifictions », ou récits fictionnels qui ont trait au droit, qui soulignent l’inadéquation entre les textes de loi et les réalités humaines et mettent l’accent sur les impossibilités éthiques. Otto Pfersmann distingue les énoncés prescriptifs exigeant des actions impossibles de l’utilisation de tels énoncés dans des fictions et du cas d’énoncés qui se présentent comme normatifs, mais n’en remplissent pas les conditions sémantiques d’intelligibilité. Les contraintes de crédibilité intra-fictionnelles ouvrent un espace cognitif de divertissement, alors que les exigences d’intelligibilité et de réalisabilité limitent le domaine de la normativité. Lena Seauve se penche sur les cas de « narrations impossibles » contemporaines, qui représentent la violence du point de vue de celui qui la commet, ce qui fait obstacle à l’identification du lecteur ou de la lectrice. Enfin, Mathilde Zbaeren s’interroge sur la légitimité du recours à la fiction pour rendre compte des génocides (en prenant l’exemple de celui du Rwanda), en se fondant sur des témoignages réels.