Colloques en ligne

Katarina Melic

Kundera: (im)moralisme du roman

« La seule chose qui nous reste face à cette inéluctable défaite qu'on appelle la vie est d'essayer de la comprendre. C'est là la raison d'être de l'art du roman. » (Le Rideau) .

1Le point de départ de cette réflexion est la préface qu’Aragon rédige pour la traduction française du premier roman de Kundera, La Plaisanterie, chez Gallimard. L’événement a lieu fin août 1968, au moment même de l’invasion de la Tchécoslovaquie par les armées du Pacte de Varsovie, invasion qui signifie la mise à mort brutale du « Printemps de Prague » et du projet de « socialisme à visage humain ». Cette préface appelle deux remarques. D’une part, elle permet à Aragon de crier sa colère devant l’écrasement du processus de démocratisation (on se souvient de la fameuse formule : « Je me refuse à croire qu’il va se faire là-bas un Biafra de l’esprit. Je ne vois pourtant aucune clarté au bout de ce chemin de violence »1)2. D’autre part, cette préface a, pour Kundera, de grandes répercussions : elle va le faire connaître en France, puis dans le monde, en lui conférant  un statut de grand écrivain (la préface était intitulée « Ce roman que je tiens pour une œuvre  majeure », œuvre  désignée ensuite dans le texte comme « l’un des plus grands romans de ce siècle »3), et cela au moment même où il devient dans son pays un auteur interdit, privé de ses lecteurs tchèques. En 1966, Aragon, sans même connaître le roman, non encore traduit, convainc Gallimard de le publier, alors que pèse la menace qu’il ne soit pas édité en Tchécoslovaquie. Il s’agit d’un geste politique significatif car il faut encourager le processus de déstalinisation, tout en prenant le risque de s’opposer aux censeurs et au pouvoir tchèques. Pourtant, la situation change rapidement : la censure laisse finalement passer le manuscrit4, le roman paraît à Prague au printemps 1967 et devient très vite un succès (120 000 exemplaires en trois éditions rapidement épuisées). On peut facilement imaginer que le contenu et l’objectif de cette préface auraient été très différents sans les événements du 21 août. Comme l’a remarqué Kundera, les circonstances ont conduit Aragon à écrire « un très beau texte d’un pessimisme lucide […] un règlement de comptes avec le communisme unique dans son œuvre »5. Cette préface jouera donc un grand rôle dans sa seconde vie d’écrivain, un écrivain pour des lecteurs étrangers, d’abord exilé dans son propre pays, avant qu’il ne le quitte pour la France, en 1975. Mais c’est aussi avec l’écrivain qu’il a été, en Tchécoslovaquie, celui qu’Aragon salue en 1968, qu’il va prendre de plus en plus ses distances, au point de ne plus se reconnaître dans cette fameuse préface, reprise d’édition en édition, pendant seize ans, avant que l’auteur du roman ne décide de s’en libérer. Kundera l’explique dans la « Note de l’auteur », datée de mai 1985, dont il fait une sorte de postface aux rééditions de son roman  et qui se substitue désormais à la préface d’Aragon6. C’est à cause de cette préface (mais ce n’est pas la seule cause) que La Plaisanterie est reçue comme un roman politique7, alors que ce livre ne devait être que « roman et rien que roman »8. En même temps, Kundera dit sa reconnaissance envers Aragon car, sans lui, La Plaisanterie n’aurait jamais vu le jour en France.  Gallimard lance ce roman au moment où Kundera est effacé de la littérature tchèque.  Dans cette postface à son roman, que l'on retrouve dans toutes les éditions à partir de 1985, il résiste à toute lecture politique. Il est tout à fait dans les logiques des faits de se demander ce qu’aurait écrit Aragon sans la coïncidence politique : quelle lecture aurait-il proposé? que serait alors devenu ce qu’il appelle « la lumière de La Plaisanterie » ? Cette « lumière » renvoie précisément à ce qui nous intéresse, la fonction de connaissance du roman: qu’est-ce que le roman nous fait connaître ?

2Avant de passer au roman, et à sa valeur inestimable qui tient à ce qu’il constitue un mode spécifique de connaissance et à ses points d'ancrage dans la tradition romanesque, nous nous proposons de dégager quelques principes fondamentaux de l’écriture kundérienne afin de mettre en lumière la spécificité de l’esthétique kundérienne.

3Dans un des premiers essais consacrés à l’œuvre kundérienne, Kvetoslav Chvatik note:

L’œuvre romanesque de Kundera se caractérise par une remarquable unité interne et une grande logique dans son développement. […] L’unité de l’œuvre romanesque de Kundera résulte d’une unité de motifs et de thèmes, de l’unité de la conception du récit dans son ensemble et du geste sémantique qui en découle pour les romans9.

4Parmi ces thèmes et motifs récurrents, on trouve par exemple celui du chapeau, présent dans Le Livre du rire et de l’oubli, L’Insoutenable  Légèreté de l’être, L’Immortalité, ou encore dans La Lenteur. Cette récurrence esquisse la ligne conductrice qui traverse l’œuvre kundérienne et lui donne en partie sa cohérence interne, mais elle montre aussi, par le caractère changeant et changeable du motif, comme celui du chapeau, qui apparaît de roman en roman, chaque fois avec une nouvelle valeur, un des concepts essentiels dans l’art kundérien du roman : l’art de la variation.  Kundera explique ce principe de la variation dans le septième chapitre de la sixième partie du Livre du rire et de l’oubli. Pour faire comprendre ce terme musical de « variation », il le compare à celui de symphonie :

La symphonie est une épopée musicale. On pourrait dire qu’elle ressemble à un voyage qui conduit, à travers l’infini du monde extérieur, d’une chose à une autre chose, de plus en plus loin. […]. Vous connaissez certainement la pensée où Pascal dit que l’homme vit entre l’abîme de l’infiniment grand et l’abîme de l’infiniment petit. Le voyage des variations conduit au-dedans de cet autre infini, au-dedans de l’infinie diversité du monde intérieur qui se dissimule en toute chose10.

5Afin de réaliser cette exploration, l’art de la variation consiste en fait en une reprise infinie, mais toujours différente d’un même objet, d’un même thème, ou d’un même mot, pour l’investir à chaque fois d’un nouveau sens, d’un nouvel éclairage. Chaque réapparation d’un élément déjà cité contient un écart potentiel par rapport à sa première occurrence.  Pour mieux comprendre cette idée de voyage dans l’infinie diversité du monde intérieur, comme le formule Kundera, il faut également évoquer un autre concept esthétique kundérien, lié par essence à celui de la variation : l’art de la polyphonie.

6La polyphonie s’oppose à la composition unilinéaire et consiste à développer simultanément deux ou plusieurs voix, qu’il s’agisse de voix de personnages, ou bien de genres littéraires11. La polyphonie permet une écriture composée de discours généralement autonomes (discours philosophique, historique, politique, onirique, érotique, poétique, essayiste,...) et d’unir ces derniers autour d’un ou de plusieurs thèmes. Cette polyphonie conduit également à une multiplication des points de vue autour d’un même objet qui peut être ainsi éclairé sous des angles différents, voire contradictoires.  Ainsi, dans L’Insoutenable légèreté de l’être,  un exemple évident est sans doute celui des divergences de points de vue entre Sabina et Franz autour de certains mots. Tandis que pour Franz « un cimetière n’est qu’une immonde décharge d’ossements et de pierraille »12, Sabina dans des moments de tristesse « prenait sa voiture pour aller loin de Prague se promener dans un de ses cimetières préférés. Ces cimetières de campagne sur fond bleuté de collines étaient beaux comme une berceuse »13:

Dans le chapitre intitulé «Les mots incompris», j’examine le code existentiel de Franz et celui de Sabina en analysant plusieurs mots: la femme, la fidélité, la trahison, la musique, l’obscurité, la lumière, les cortèges, la beauté, la patrie, le cimetière, la force. Chacun de ces mots a une signification différente dans le code existentiel de l’autre. Bien sûr, ce code n’est pas étudié  in abstracto14, il se révèle dans l’action, dans les situations15.  

7Ainsi, la variation et la polyphonie kundériennes constituent une esthétique d’exploration phénoménologique de l’existence qui  consiste dans la répétition d’un thème, d’une situation, d’un mot. Tout semble être pareil et pourtant se révèle différent à chaque reprise. Répétition et différence. L’idée d’« exploration phénoménologique », d’exploration de l’essence ontologique de l’être, est l’une des clés fondamentales de l’écriture kundérienne et de la conception du roman qu’il défend.

8Dans son essai L’Art du roman, Kundera se réfère à une réflexion d’Hermann Broch, pour lequel la finalité d’un roman est selon lui la connaissance :

Découvrir ce que seul un roman peut découvrir, c’est la seule raison d’être d’un roman. Le roman qui ne découvre pas une portion jusqu’alors inconnue de l’existence est immoral. La connaissance est la seule morale du roman16.

9Cette connaissance est possible par ce jeu de variations et de polyphonie qui permet notamment d’éviter l’univocité et d’éclairer la complexité et les paradoxes du monde en mettant en avant, non pas une vérité, mais des vérités. Ainsi, rien n’est plus hostile au totalitarisme que l’esprit du roman, c’est-à-dire, la faculté de comprendre la complexité des vérités relatives qui se confrontent dans le monde :

En tant que modèle de ce monde, fondé sur la relativité et l’ambiguïté des choses humaines, le roman est incompatible avec l’univers totalitaire. […] La Vérité totalitaire exclut la relativité, le doute, l’interrogation et elle ne peut jamais se concilier avec ce que j’appelle l’esprit du roman17.  

10La sagesse ne consiste plus dans la possession d’une vérité préexistante et donnée:

Comprendre avec Cervantès le monde comme ambiguïté, avoir à affronter, au lieu d’une seule vérité absolue, un tas de vérités relatives qui se contredisent (vérités incorporées dans des ego imaginaires appelés personnages), posséder donc comme seule certitude la sagesse de l’incertitude18.

11Le roman kundérien a donc une mission cognitive, celle de soumettre toute situation à une interrogation méditative, à construire des vérités qu’il est seul à pouvoir dire et qui restent hypothétiques. Le romancier n’examine pas la réalité, mais l’existence. Les possibilités humaines représentent l’existence et c’est au romancier de dessiner la carte de l’existence, « le territoire du roman », en découvrant différentes possibilités humaines. Selon Chvatik, le roman kundérien repose sur deux prémisses19. La première est la conviction que la découverte est une fonction fondamentale de la forme romanesque. Il s’agit de la fonction noétique. On ne peut parler d’univocité de la représentation logique et rationnelle, mais de plurivocité, de polysémie qui reflètent la pluralité de l’existence. La deuxième prémisse  est l’autonomie du roman. Le romancier ne doit pas illustrer dans son œuvre une théorie particulière:

Le roman est pour Kundera, inconciliable avec les principes idéologiques et les idées philosophiques toutes faites, que les personnages et l’action sont uniquement censés démonter et illustrer20.

12Le roman n’est pas une confession de l’auteur, ni une contribution à la sociologie ou à l’Histoire, mais représente une exploration de la vie humaine dans le monde. Kundera ne retient des circonstances historiques que celles qui créent une situation existentielle révélatrice. Dans L’Art du roman, Kundera donne un exemple tiré de La Plaisanterie:

Ludvik voit tous ses amis et condisciples lever la main pour voter, avec une totale facilité, son exclusion de l’université et faire ainsi basculer sa vie. Il est sûr qu’ils auraient été capables, si nécessaire, de voter avec la même facilité sa pendaison. D’où sa définition de l’homme : un être capable dans n’importe quelle situation d’envoyer son prochain à la mort. L’expérience anthropologique fondamentale de Ludvik a donc des racines historiques, mais la description de l’Histoire elle-même (le rôle du Parti, les racines politiques de la terreur, l’organisation des institutions sociales, etc.) ne m’intéresse pas et vous ne la trouverez pas dans le roman21.

13Il s’agit donc d’une expérience anthropologique. Mais ce n’est pas tout :

Non seulement la circonstance historique doit créer une situation existentielle nouvelle pour un personnage, mais l’Histoire doit en elle-même être comprise et analysée comme situation existentielle22.  

14Le personnage de Teresa de L’Insoutenable légèreté de l’être, peut illustrer cette réflexion kundérienne :

Alexandre Dubcek, après avoir été arrêté par l’armée russe, kidnappé, emprisonné, menacé, rentre à Prague. Il parle à la radio, mais il ne peut parler, il cherche son souffle, il fait au milieu des phrases de longues pauses atroces. Ce que révèle pour moi cet épisode historique (d’ailleurs complètement oublié car, deux heures après, les techniciens de la radio ont été obligés de couper les pénibles pauses de son discours), c’est la faiblesse. La faiblesse comme catégorie très générale de l’existence23.  

15Pour Kundera, le roman se sert de situations historiques pour  mieux explorer des catégories existentielles et c’est le regard d’un anthropologue qu’il pose sur ses personnages.

16Kundera souligne une différence fondamentale entre la façon de penser d’un philosophe et celle d’un romancier : dans le domaine du philosophe, on est dans le domaine des affirmations, des certitudes, alors que dans le domaine du  roman, on n’affirme pas, on médite, on est dans le territoire du jeu et des hypothèses. Le romancier ne doit pas illustrer dans son œuvre une théorie particulière. Kundera ne se fait donc pas le porte-parole d’une pensée philosophique donnée, ses méditations sont d’essence romanesque, c’est-à-dire relatives, ambiguës, plus interrogatives qu’affirmatives, et ce, notamment grâce à l’art de la variation et de la polyphonie qui rend toute certitude impossible.

17La conception kundérienne du roman, cohérente en soi (la finalité d’un roman étant la découverte d’une nouvelle portion jusqu’alors inconnue de l’existence), est ancrée dans sa conception de l’histoire des arts :

Appliqué à l’art, la notion d’histoire n’a rien à voir avec le progrès ; elle n’implique pas un perfectionnement, une amélioration, une montée ; elle ressemble à un voyage entrepris pour explorer des terres inconnues et les inscrire sur une carte. L’ambition du romancier est non pas de faire mieux que ses prédécesseurs, mais de voir ce qu’ils n’ont pas vu, de dire ce qu’ils n’ont pas dit. La poétique de Flaubert ne déconsidère pas celle de Balzac, de même que la découverte du pôle Nord ne rend pas caduque celle de l’Amérique24.

18Cette histoire ne suit pas les développements de l'Histoire, ni ceux de la science et des innovations techniques. L'histoire du roman est celle d'une cartographie du roman qui s'étend à partir d'un point commun. L'histoire du roman est l'héritage que recueille chaque romancier. Elle est constituée du « petit contexte », le milieu dans lequel il inscrit sa propre aventure, et du « grand contexte » en fonction duquel se mesurent la place et la valeur de chaque nouvelle œuvre. Les œuvres ne se laissent pas emprisonner dans les frontières de leurs pays respectifs ; au contraire, elles s'inscrivent sur la carte d'une géographie inexplorée par leurs prédécesseurs. Et c'est dans cette logique que Kundera fait la distinction entre le grand contexte et le petit contexte:

Il y a deux contextes élémentaire dans lesquels on peut situer une œuvre d’art : ou bien l’histoire de sa nation (appelons-le le petit contexte), ou bien l’histoire supranationale de son art (appelons-le le grand contexte). Nous sommes accoutumés à envisager la musique, tout naturellement, dans le grand contexte. […] La possessivité de la nation à l'égard de ses artistes se manifeste comme un terrorisme du petit contexte qui réduit le sens d'une œuvre au rôle que celle-ci joue dans son propre pays25.

19Dans ce qui touche l'art du roman, il n'y a pas d'autres nationalités que celle rabelaisienne, cervantine, flaubertienne, etc. Pour Kundera, qui reprend l'idée de Goethe et de la « Weltliteratur », cette histoire du roman est transnationale par définition. Le lignage part de Cervantès et Rabelais, passe par Fielding, Flaubert, Balzac, Tolstoï jusqu'à Proust, Joyce, sans oublier les grands romanciers d'Europe centrale de la première moitié du XXe siècle (Kafka, Musil, Broch), lignage donc européen au début, mais qui s'élargit avec l'arrivée des romanciers d'Amérique du Nord et du Sud (Faulkner, Carpentier, Fuentes). Kundera identifie trois temps dans l’histoire du roman. Le premier temps correspond au XVIIIe siècle jusqu’à Cervantès : c’était celui de « la première liberté ». Le second temps correspond au XIXe siècle où la forme a eu plus de poids sur le roman et c’est au cours de ce temps que « la première liberté » s’achève. Enfin, le troisième temps coïncide avec le XXe siècle jusqu’à nos jours. Ce troisième temps, estime Kundera, est en réalité le deuxième temps de « la première liberté ». Par ses thèmes, le troisième temps a vu la naissance d’une écriture différente des premiers temps. La liste de ces romanciers de cette seconde liberté est longue:  Gabriel Garcia-Marquès, Carlos Fuentès, Franz Kafka, Hermann Broch, Léon Tolstoï, Anatole France, Robert Musil, Withold Gombrowicz, Bohumil Hrabal, Fedor Dostoïevski, Aimée Césaire ou Patrick Chamoiseau. C’est l’unique voie qui mène du roman à l’archi-roman. Dans une lettre qu’il a adressée à son ami l’écrivain mexicain, Carlos Fuentes, en 1998, à l’occasion de son anniversaire, Kundera précise ce que signifie pour lui un archi-roman :

En ce sens, j’ai imaginé le roman moderne non pas comme anti-roman mais comme un archi-roman. L’archi-roman : primo, il se concentre sur ce que seul le roman peut dire ; secundo, il fait revivre toutes les possibilités négligées et oubliées que l’art du roman a accumulées pendant les quatre siècles de son histoire26.

20Après la reconquête de « la première liberté » rabelaisienne, Kundera suggère la voie d’un roman nouveau capable de servir de station de correspondance entre le passé, le présent et l’avenir ; autrement dit un roman fleuve où l’on peut trouver une image des trois temps du roman. Sur le plan de la forme, un archi-roman doit se libérer des moules et des canevas académiques et sur le plan du thème, il doit être ouvert et spontané.

21Ainsi, l’écriture kundérienne ne naît pas dans la rupture avec le passé de l’art romanesque. Elle en respecte les découvertes et s’efforce de poursuivre le travail de recherche entamé par ses prédécesseurs. Une raison pour laquelle Kundera s’est toujours défendu d’être réduit à une formule. Être romancier implique pour lui une sagesse, une attitude, une position et sa seule patrie est le roman, l’histoire du roman.  Pour Kundera, « sa seule patrie, son seul chez-soi », c’est le roman, l’histoire du roman :

Être romancier fut pour moi plus que de pratiquer un « genre littéraire » parmi d’autres; ce fut une attitude, une sagesse, une position […] J’ai fini par avoir ces dialogues étranges: « vous êtes communiste, monsieur Kundera? – Non, je suis romancier. »  « Vous êtes dissident? – Non, je suis romancier. » « Vous êtes de gauche ou de droite? – Ni l’un ni l’autre. Je suis romancier »27.

22Déjà, dans L’art du roman, ne disait-il pas: « Mais si l’avenir ne représente pas une valeur à mes yeux, à qui suis-je attaché: à Dieu? à la patrie? au peuple? à l’individu? Ma réponse est aussi ridicule que sincère: je ne suis attaché à rien sauf à l’héritage décrié de Cervantès »28.

23BIBLIOGRAPHIE

24Louis Aragon,  «Ce roman que je tiens pour une œuvre majeure», préface à La Plaisanterie, Paris, Gallimard, p. I-VI.

25Kvetoslav Chvatik, Le Monde romanesque de Milan Kundera, Paris, Gallimard, 1995.

26Milan Kundera, La Plaisanterie, Paris, Gallimard, Folio, 1985.

27Milan Kundera, Le Livre du rire et de l’oubli, Paris, Gallimard, Folio, 1985.

28Milan Kundera, L’Art du roman, Paris, Gallimard, Folio, 1986.

29Milan Kundera, L’Insoutenable légèreté de l’être, Paris, Gallimard, Folio, 1989.

30Milan Kundera,  Les Testaments trahis, Paris, Gallimard, 1993.

31Milan Kundera, Le Rideau, Paris, Gallimard, 2005.

32Milan Kundera, Une rencontre, Paris, Gallimard, 2009.

33Katarina Melic, « Le jeu de la préface/postface dans La Plaisanterie de Milan Kundera», in: Paratextes. Études aux bords du texte. Éd. Mireille Calle-Gruber et Elisabeth Zawisza, Paris, L’Harmattan, 2000, pp. 139-145.