Le personnage : niveaux de vraisemblance
1Cet article propose deux thèses, ou plutôt, pour être juste, deux observations, concernant la représentation littéraire des personnages et ses liens avec les modèles à vivre promus par l’art. La première note l’existence de plusieurs niveaux de ressemblance entre, d’une part, les œuvres artistiques et littéraires et, d’autre part, les aspects de la vie qu’elles évoquent ; la seconde concerne les rapports assez particuliers qui s’établissent entre la fidélité de la représentation et la capacité artistique de proposer des modèles à vivre.
Individu, type et idéal
2Prenons comme point de départ une statue, celle de Konrad Adenauer par Helga Tiemann, érigée à Berlin, place Adenauer, en 2005 et qui représente le chancelier allemand en train de se promener, le chapeau à la main, le pan droit de son manteau flottant dans le vent. Son visage est calme, son regard vif. Le socle de la statue étant un rectangle de pierre d’à peu près vingt centimètres de hauteur, Adenauer a l’air de marcher à côté des passants et, en effet, les enfants berlinois jouent souvent à côté de lui, lui prennent la main, se blottissent contre son bras. Le plain-pied aussi bien que la ressemblance du visage et de la démarche intensifient le sentiment que l’individu représenté est là, à côté de nous, qu’on appelle sa présence « illusion esthétique », selon l’exemple du grand historien de l’art Ernst Gombrich, ou qu’on y voie plutôt un cas de « reconnaissance iconique », si l’on suit la théorie, plus exacte, du philosophe écossais Flint Schier2. Les détails visibles garantissent la vraisemblance de ce portrait : il s’agit bien de Konrad Adenauer. En même temps, à un deuxième niveau, la statue fait signe vers un type : le leader démocratique, calme, décidé, prenant l’avance. À un troisième niveau, enfin, la statue représente à sa manière un des idéaux qui devrait guider le comportement des dirigeants démocratiques, à savoir la capacité de se placer au même niveau que les autres citoyens. En regardant cette statue, le passant reconnaît sans difficulté les trois niveaux : l’individu (le chancelier Adenauer), le type (le bon leader) et l’idéal (le respect de l’égalité).
3Certaines œuvres d’art insistent sur les aspects généraux des figures représentées – les types et les idéaux – plutôt que sur leur ressemblance immédiate avec la réalité perceptible. Dans La Liberté guidant le peuple par Delacroix (1830), la belle femme aux seins découverts, coiffée d’un bonnet phrygien et brandissant un drapeau tricolore évoque un ensemble d’idées associées à la liberté lors de la Révolution de 1830 (l’élan de la nature, l’appel au combat, la tradition jacobine) sans faire référence à une personne concrète. De même la statue de la liberté par Frédéric Auguste Bartholdi, offerte aux États-Unis par le gouvernement français en 1866 lors du centième anniversaire de la Déclaration américaine d’indépendance et installée dans le port de New York, offre au spectateur l’image d’une femme immensément plus grande que nature, portant une torche et foulant aux pieds une chaîne brisée. Il ne s’agit certes pas d’un portrait, mais de l’allégorie de la liberté, de sa grandeur, de sa lumière et de sa force.
4En regardant ces œuvres, nous sentons-nous invités à les adopter comme modèle à vivre – de manière passagère peut-être ? La statue de la liberté à New York (que j’ai eu l’occasion d’admirer de près) écrase le spectateur en lui présentant le modèle à vivre d’une nation entière plutôt que celui d’une personne et c’est sans doute pour cette raison que pendant longtemps ce monument gigantesque a accueilli les immigrants lors de leur arrivée en Amérique. L’image du chancelier Adenauer est plus amicale (choix polémique probablement délibéré) et si cette image propose aux passants la vision instantanée d’un modèle à vivre, c’est en vertu du type et de l’idéal qu’elle incarne plutôt que de la personne dont elle fait le portrait. Quant à la Liberté au bonnet phrygien chez Delacroix, pour allégorique qu’elle soit, son élan ne manque pas de donner aux spectateurs l’envie de s’enrôler dans son bataillon. Concluons donc que dans les arts plastiques le modèle à vivre – ou plutôt l’allusion passagère à ce genre de modèle – souvent se fait voir grâce aux traits plus généraux de la représentation plastique, à savoir les types ou les idéaux qu’elle évoque.
5L’impact moral de la littérature (et je parlerai maintenant des genres littéraires à intrigue, ceux qui racontent ou mettent en scène des actions) s’exerce-t-il de la même manière ? Pour répondre à cette question, voyons d’abord si et, dans l’affirmative, comment ces genres littéraires mettent en évidence les trois couches mimétiques notées dans les arts plastiques. Considérons tout d’abord quelques exemples qui précèdent le XIXe siècle. Dans les tragédies antiques, les idéaux qui guident les personnages sont bien évidents dans la grande majorité des cas, de même que les types que ces personnages incarnent, bien que les traits strictement individuels soient à peine visibles – et c’est peut-être pour cette raison que les acteurs qui jouaient ces tragédies portaient des masques aux traits fort schématiques. Ceci reste vrai dans les tragédies françaises du xviie siècle, où Cléopâtre dans Rodogune chez Corneille, Andromaque et Phèdre chez Racine incarnent des types, étant presque dépourvues de traits spécifiquement individuels. On comprend qui sont ces personnages en examinant leurs actions, y compris les passions et les raisons qui les font naître. Lorsque Cléopâtre, par exemple, déclare dans un monologue les ressentiments personnels qu’elle a nourris sous le masque du calme royal, elle est certes, jusqu’à un certain point, un individu, mais, surtout, elle présente aux spectateurs le modèle (le type) de ces passions. Écoutons-la déclamer sa haine au début du deuxième acte :
Serments fallacieux, salutaire contrainte,
Que m’imposa la force et qu’accepta ma crainte
Heureux déguisement d’un immortel courroux,
Vaines fantômes d’état, évanouissez-vous ! […]
Et vous qu’avec tant d’art cette feinte a voilée,
Recours des impuissants, haine dissimulée,
Digne vertu des rois, noble secret de cour,
Éclatez, il est temps, et voici notre jour3.
6Pour malveillante qu’elle soit, l’énergie de Cléopâtre n’est pas sans ressembler à celle de la Liberté portant le drapeau dans le tableau de Delacroix. On peut donc se demander si, au cas où un spectateur (un politicien de profession, par exemple) était tenté de prendre la reine de Syrie pour modèle à vivre, il le ferait sous l’influence du personnage pris dans son ensemble, ou plutôt sous celle de traits plutôt abstraits : le mouvement, la force, le courage, le cynisme de Cléopâtre.
7L’impact de ces traits, saisis au deuxième ou au troisième niveau de la représentation – le type humain avec ses passions, ses vertus et ses vices, ou encore les maximes qui le guident –, visible dans les arts visuels et dans la tragédie classique se retrouve-t-il dans le roman et le théâtre du XIXe siècle ? À première vue, on est tenté de répondre par l’affirmative : l’essor du réalisme n’a-t-il pas rapproché les univers de fiction du monde réel des lecteurs ? Ceux-ci ne reconnaissent-ils pas d’autant plus facilement les cibles de la représentation fidèle à la réalité à tous les niveaux et par conséquent ne sont-ils pas, encore plus que dans le passé, tentés de choisir les personnages réalistes comme modèles à vivre ? Et pourtant cette reconnaissance ne va pas de soi.
Modèles à vivre dans la littérature haut-de-gamme…
8La situation est surtout très différente selon l’appartenance des œuvres examinées à la littérature haut-de-gamme (high-brow, comme on l’appelle en anglais) ou à la littérature pour le grand public (low-brow). Dans le premier cas, le réalisme littéraire imagine des personnages dont les traits individuels (origine, apparence physique, talents, aspirations) sont décrits en détail, mais dont le type n’est pas toujours simple ni avantageux. Dans Illusions perdues de Balzac, par exemple, Lucien de Rubempré, parfaitement identifiable par son origine familiale et géographique, par ses talents et par son ambition, offre au lecteur l’image hybride d’un jeune homme à la fois compétent et corruptible, loin d’offrir un modèle à vivre. Lucien échoue dans la vie, mais David Séchard, son beau-frère, nettement plus honnête et capable, n’en finit pas mieux. L’échec social des personnages exemplaires (le destin du colonel Chabert étant le plus émouvant) et le succès de ceux qui ne le sont pas est une des constantes de l’univers balzacien. Certes, l’auteur de la Comédie humaine estime la vertu personnelle et la générosité envers l’entourage immédiat (Renée de Maucombe dans Mémoires de deux jeunes mariées, aussi bien que Vautrin dans Splendeurs et misères des courtisanes) plutôt que la réussite mondaine. Mais souvent ses personnages proposent des modèles ascétiques, dont la tâche consiste à regretter leurs péchés de jeunesse, à se sacrifier et à souffrir au nom de la charité. Pensons aux protagonistes du Médecin de campagne et du Curé de village : les types qu’ils incarnent ressemblent à s’y tromper à ceux prônés par les Vies de saints. Étant donnée l’extraordinaire richesse de l’univers balzacien, il est certes possible de trouver de temps en temps des modèles à vivre à la fois plausibles et équilibrés (les deux protagonistes de Modeste Mignon, par exemple), mais les malheurs de la vertu et l’injustice morale du monde qui nous entoure demeurent les grandes thèses défendues par Balzac.
9Stendhal s’intéresse, lui aussi, aux impossibles rapports entre le succès dans la vie et l’intégrité personnelle. Julien Sorel n’en fait pas preuve et réussit – ou presque – précisément pour cette raison. Son échec final est dû à un moment de colère irresponsable, de fierté masculine mal comprise. Comme c’est, par ailleurs, le cas de Fabrice del Dongo dans La Chartreuse de Parme, jeune homme naïf, spontané, le plus souvent honnête et qu’une impulsion aveugle rend criminel. Sont-ce des modèles à vivre ? Difficile de répondre par un « oui » catégorique.
10Un roman, cependant, et surtout un roman réaliste publié avant 1850, raconte d’ordinaire une multitude d’épisodes ; le lecteur avance lentement d’un incident à l’autre en évaluant chaque fois le comportement des personnages et sa valeur éthique. Ce qui en résulte n’est pas exactement le choix définitif d’un modèle à vivre à la fin de la lecture, mais plutôt, de temps en temps, des élans de sympathie pour le personnage durant tel ou tel épisode : Fabrice naïf ne se rendant pas compte de l’amour de sa tante Gina, Lucien Chardin entouré par ses amis du Cénacle, David Séchard expliquant l’invention du papier bon marché, Chabert ému par les enfants que sa femme a eus lors de son deuxième mariage. La probité de ces personnages fait résonner le cœur du lecteur, lequel serait sans doute d’accord avec l’idée que leur comportement pendant ces épisodes mériterait d’être pris comme modèle momentané dans des situations semblables, si jamais elles lui arrivaient.
11Il reste que dans ces romans, ce qui capte l’attention morale du public n’est pas la conduite des personnages prise dans son ensemble. Le modèle momentané agit en dépit de ce que ces personnages ont fait plus tôt ou de ce qu’ils feront par la suite, en dépit aussi de la manière dont ils seront punis, récompensés ou ignorés par le dénouement du récit. Car si chaque geste des protagonistes de La Chartreuse de Parme, par exemple, devait être pris en compte, aussi bien que la manière dont le dénouement du roman scelle leur destin, je crois que je choisirais comme modèle à vivre le comte Mosca, gentilhomme toujours sage, courtois et généreux. Certes, je me rends bien compte que cette préférence est celle d’un homme âgé. Disons donc que dans le roman réaliste français haut-de-gamme les caractères étant souvent complexes, ni tout à fait admirables, ni tout à fait répugnants, l’attraction d’ordre moral qu’ils exercent sur les lecteurs n’est pas toujours très forte.
… Et dans le roman populaire
12Faisons maintenant un pas vers la littérature pour le grand public, où nous trouvons des protagonistes qui, loin d’être conçus à dessein comme un mélange savant de vertus et de faiblesses, allient plutôt une déchéance absolue avec les perfections les plus sublimes, ressemblant donc aux pénitents qui, chez Balzac, rachètent leurs méfaits par le don de soi. Ainsi, dans Les Mystères de Paris, Fleur-de-Marie, prostituée au cœur de sainte, agit toujours de la manière la plus désintéressée. Parfois le contraste unit deux genres de vertu : Rodolphe, qui découvrira que Fleur-de-Marie est sa propre fille, joue le rôle de prince pendant le jour et celui de justicier secret et cruellement efficace pendant la nuit. Ces personnages offrent-ils des modèles à vivre ? Bien entendu que non ! a-t-on envie d’exclamer, étant donnée leur parfaite invraisemblance.
13Et pourtant. Les lecteurs des Mystères de Paris, tout en se rendant compte que ni les individus mis en scène (Fleur-de-Marie, Rodolphe), ni les types qu’ils représentent (la prostituée angélique, le prince brigand-justicier) ne sont plausibles, ces lecteurs, donc, font attention au troisième niveau de la représentation artistique, à savoir à la présence des idéaux moraux que ces personnages incarnent : la pureté malgré tout, le désir fou de justice. Pourquoi liraient-ils cette suite d’aventures sans aucun lien avec la réalité si elles ne mettaient pas en évidence la splendeur des normes qui devraient nous guider et, dans les cas des scélérats, la laideur des vices que nous devrions éviter ?
14Pour faire un bref saut jusqu’à la fin du xxe siècle, d’où vient l’extraordinaire succès de la série La Guerre des étoiles de George Lucas, dont le scénario et les personnages – Luke Skywalker, la princesse Leia, Han Solo – n’ont presque rien de plausible, sinon des vertus et des idéaux qu’ils incarnent ? Le Seigneur des anneaux de J. R. R. Tolkien et les films qu’il a inspirés appartiennent à la même catégorie d’œuvres destinées au grand public et dont la spécialité ne consiste pas à décrire la réalité déjà visible mais à rendre visible le conflit entre les idéaux les plus sublimes et l’indignité la plus méprisable.
15Revenons au XIXe siècle français, où Notre-Dame de Paris et Les Misérables de Victor Hugo sont à la fois proches du réalisme social, spécialité de Balzac et de Stendhal, et de l’angélo-démonisme du roman populaire. Certes, la générosité évangélique de Monseigneur Myriel nous propose un modèle à vivre, sinon au niveau littéral, du moins, à l’instar des vies des saints, à celui des vertus inimitables. Jean Valjean, quant à lui, admirablement individualisé – apparence physique, provenance et mobilité sociale inoubliables, aventures qui frôlent l’invraisemblable sans s’y installer – allie, en tant que type, l’intelligence, le courage et la dévotion. Un des aspects qui le rendent plus proche du lecteur que d’autres héros de roman grand public de l’époque – Rodolphe chez Eugène Sue ou Dantès dans Le Comte de Monte-Cristo d’Alexandre Dumas – est son destin de fugitif, à savoir de quelqu’un qui n’affronte pas le mal, mais le fuit. Beau sujet de réflexion : pour quelle raison le personnage du fugitif a-t-il fourni, depuis Les Éthiopiques d’Héliodore, un des modèles à vivre les plus persuasifs proposés par le roman ? Serait-ce parce que, à la différence des modèles épiques-héroïques (le guerrier invincible, le fondateur des cités, le justicier) le fugitif cherche inlassablement non pas la victoire et la maîtrise de la vie publique, mais le retrait nécessaire à l’intimité et à la vie privée ? Chez Jean Valjean, surtout, le fugitif est en même temps quelqu’un qui se dévoue à une personne dont il lui échoit (on ne se rend pas très bien compte pourquoi) de prendre soin, de protéger : la petite Cosette. Nouveau modèle à vivre ? Ou simplement manière de guider le regard du lecteur vers les strates énigmatiques de notre vie morale, vers ce qu’il nous incombe de faire sans qu’on sache toujours pour quelle raison.
16Par la suite, ce genre de protagonistes continuera d’abonder dans les romans pour le grand public, romans appelés idéalistes par Jean-Marie Seillan4, mais la littérature haut-de-gamme, séduite depuis les années 1860 par la philosophie de Schopenhauer, imaginera bientôt un nouveau modèle à vivre, la personne dont la seule raison d’agir est la bonté : Félicité dans Un cœur simple de Flaubert, la mère de Marcel dans La Recherche du temps perdu, personnages généreux entourés de gens égoïstes, vaniteux, indifférents, cruels. Dans le roman de Proust, la bonté n’est cependant pas la seule vertu : le récit d’un jeune homme déçu par l’amour et qui découvre lentement sa vocation littéraire appartient au genre du roman de formation. Ce roman ressemble donc à David Copperfield de Dickens, à La Recluse de Wildfell Hall d’Anne Brontë et à Middlemarch de George Eliot, œuvres dont les protagonistes, après avoir fait des choix imprudents, réussissent à trouver leur vraie voie dans la vie. Dans la littérature française du XIXe siècle, en revanche, le roman de formation aboutit au résultat contraire, le protagoniste (Lucien de Rubempré, Frédéric Moreau) finissant d’ordinaire du côté des perdants. En décrivant les actions de ces personnages, ces romans semblent vouloir mettre en garde le lecteur de ne surtout pas agir de la même manière.
17C’est la vague schopenhauerienne qui a permis plus tard aux protagonistes des romans français de formation d’atteindre le bonheur dans une vie consacrée à l’art, les exemples les mieux connus étant Jean-Christophe de Romain Rolland et Marcel dans le roman de Proust. Ces solitaires qui tournent le dos au monde de la volonté aveugle pour se consacrer à l’art proposent eux aussi des modèles à vivre. Contemplez le monde, nous disent-ils, regardez sa vanité et n’y participez pas : l’art seul vous offre d’autres perspectives. Hélas, lorsqu’il s’adresse aux innombrables lecteurs qui n’auront certes pas l’inspiration créatrice du narrateur de La Recherche du temps perdu, ce modèle à vivre, pour séduisant qu’il paraisse, recommande en fin de compte le retrait et la solitude. Et nul doute que la proximité choisie par Proust pour présenter son personnage et l’accent qu’il met sur son imperfection en diminuent la valeur comme modèle. Marcel n’a ni la force des justiciers idéalisés par les romans populaires et par les films à grand succès, ni la générosité d’un fugitif comme Jean Valjean.
18Car le déficit de vraisemblance au niveau des traits immédiatement perceptibles, en d’autres termes la forte idéalisation des personnages, loin d’affaiblir leur impact, renforce leur capacité à offrir un modèle à vivre. C’est là, peut-être, une des raisons du succès des romans populaires. Quant à la littérature haut-de-gamme récente, beaucoup plus attentive à la précision et aux détails de la représentation, c’est ce qui sans doute explique sa difficulté croissante à projeter des modèles à vivre.