Les avant-dernières choses, les mains de Mae Marsh et la grand-mère de Marcel
1Parus en même temps que la traduction française de History. The Last Things Before the Last (1969)*, l’ouvrage inachevé de Kracauer, les actes du colloque «Siegfried Kracauer, théoricien de l’histoire» organisé à Paris en 2003 rendent d’abord justice à cette œuvre posthume qui, longtemps ignorée des historiens français, est restée absente des débats historiographiques des dernières décennies. Par sa réflexion sur ce que Jacques Revel (qui signe d’ailleurs une importante présentation de L’histoire. Des avant-dernières choses*) appellera les «jeux d’échelles», par son interrogation sur le statut épistémologique de l’histoire et sur son écriture ou par sa proposition de rapprochement entre histoire d’une part et photographie et cinéma d’autre part, Siegfried Kracauer a pourtant très tôt soulevé nombre des problèmes qui occupent toujours ceux qui s’intéressent à l’historiographie. Comme Carlo Ginzburg le suggère à la fin de sa contribution, nous découvrons trop tard le Kracauer «penseur de l’histoire». Sa langue nous est par certains aspects presque trop familière et sa lecture, si elle semble avoir enthousiasmé les auteurs des articles rassemblés par Philippe Despoix et Peter Schöttler, pourra aussi bien décevoir.
2«Une histoire autre? (Re)lire History. The Last Things Before the Last», (p13-28). Après avoir rappelé que «Kracauer fut, dans l’Allemagne de Weimar, l’un des fondateurs de la critique de cinéma», puis, lors de son exil, un défenseur du «néo-réalisme» et l’auteur de Theory of film (1960)*, Philippe Despoix souligne que le parallèle entre les médias photo- et cinématographiques d’une part et l’historiographie d’autre part constitue «l’analogon épistémologique central» de History*. S’inspirant de la démarche de Jacques Revel (dans De l’histoire au cinéma, Antoine de Baeque, Christian Delage (dir.), Bruxelles, Éditions Complexe, 1998, p99-110), qui établit un parallèle entre l’écriture de l’histoire et l’interrogation menée par Antonioni dans Blow up (sorti en 1966, l’année du décès de Kracauer) sur le rapport «entre médium photographique, factualité et représentation», P. Despoix propose de lire History* comme une «interrogation extra-disciplinaire sur les modes d’écriture de l’histoire». Cinq propositions viennent expliciter l’affinité postulée par Kracauer. Le document étant une trace physique, «le premier parallèle entre photographie et histoire se situerait dans leur rapport commun à un référent passé». P. Despoix compare ainsi la célèbre remarque de Barthes dans La chambre claire - «le même siècle a inventé l’Histoire et la photographie» - à un essai de Kracauer publié en 1927 (traduit dans Le Voyage et la danse*). Mais, tandis qu’en 1927 la photographie, rapprochée des ambitions de l’historisme allemand, était condamnée comme illusion de reproduction technique, dans History*, «seule l’optique non humaine de la caméra est capable de rendre le monde visible dans son ambivalence, en partie structurée et en partie informe». Le «dehors de l’archive» est ensuite comparé au «hors-champs photographique». Avec le cadrage et les aléas de l’archivage, histoire et photographie sont nécessairement marquées «du sceau de l’incomplétude». Elles découpent du réel : « tout comme la relation entre la photographie et son hors champ, celle qu’entretiennent document et univers historique » serait «de l’ordre du fragment», la trace étant considérée comme «empreinte irréductiblement arrachée à son origine». À cette esthétique du fragment se rattache encore l’«antinomie du gros plan et du plan d’ensemble», qui constitue le troisième aspect de l’analogon. On retrouve ici les agrandissements photographiques de Blow up où «une prise de vue de plus en plus grossie du "même" événement» fait «apparaître des histoires, des couches de sens non seulement différentes mais divergentes». Les variations d’échelles, en histoire comme au cinéma, posent le problème de l’articulation des approches «micro» et «macro». Kracauer y voit une véritable aporie, qu’il explicite dans le cinquième chapitre de History* en faisant appel à la scène (déjà convoquée dans Theory of Film*) du procès dans l’épisode moderne de Intolerance, lorsque Griffith filme en gros plan les mains de l’actrice Mae Marsh: «le gros plan ne se laisse pas entièrement subsumer sous l’histoire dans laquelle il est inséré, il résisterait même à s’intégrer sans reste dans la suite des plans d’ensemble»; de même approches micro- et macro-historiques révèlent des «couches de sens dont il serait vain de penser qu’elles pourraient converger dans un même récit». Vain et même dommageable, puisque Kracauer prescrit à l’histoire comme au cinéma d’adopter un mode de composition fragmentaire et épisodique. Tandis que le chapitre 7 de History* propose Joyce, Woolf ou Proust comme modèles de narrateurs découpant résolument la continuité imaginaire du sujet dans le temps, Theory of film* valorise les épisodes, les récits incomplets, les «segments sans relation fixe à un avant et à un après de l’épisode», dont «la juxtaposition n’assure aucune clôture», sur le modèle du néo-réalisme de Paisà (1946) de Rossellini. La dernière proposition a trait aux rapports de l’historien et du photographe à leurs objets, rapports qui se caractériseraient par une imbrication d’ «empathie» et d’ «estrangement».
3 «Le mirage de l’unité historique», (p29-44). Après un exposé de la réflexion épistémologique de Kracauer, Sabina Loriga entend montrer en quoi ses considérations sont «extrêmement riches, surtout aujourd’hui, dans une conjoncture historiographique qui nous amène tous à nous interroger à nouveau sur le rapport entre le général et le particulier». Kracauer pense l’histoire contre la philosophie et contre le modèle des «sciences dures» et distingue trois traits spécifiques de l’univers historique : il est constitué de faits contingents, il est potentiellement infini et ne «contient pas de sens déterminé». Pour affirmer ses droits, l’histoire doit donc «accepter d’être suspendue à un niveau beaucoup plus bas que ceux des sciences de la nature, de la philosophie de l’histoire ou de l’art», l’histoire ne visant pas les choses ultimes, «mais les choses pénultièmes». La connaissance historique est, comme son objet, frappée du sceau de la précarité et c’est bien «en raison de ce caractère provisoire» que Kracauer s’intéresse à l’histoire. Il garde confiance dans la possibilité de connaître et de comprendre le passé et conteste ainsi dans le troisième chapitre «l’idée selon laquelle le présent serait toujours et en toute circonstance la provenance et la destination de l’historien». Refusant d’affirmer avec Croce et Collingwood que l’histoire est «toujours contemporaine», Kracauer souligne dans le chapitre suivant la déprise de soi et de son temps que constitue le «voyage de l’historien», au terme duquel il peut trouver «ce qu’il ne cherchait pas : c’est-à-dire l’idée historique» qui «ne vise pas une règle ou une loi concernant toute la réalité» mais cherche «à lier le particulier au général de la façon la plus complexe possible». On ne peut reprocher à S. Loriga de ne pas expliciter cet aspect de la réflexion de Kracauer, l’imprécision étant à mettre au compte de la fin du quatrième chapitre (pourtant présenté comme achevé) de History*. Illustrée par la théorie marxienne des étages structurels ou par «le prototype de l’homme de la Renaissance» chez Burckhardt, la notion d’ «idée historique» semble proche de celle de modèle ou peut-être de l’idéal-type weberien. Elle est une «incursion dans le royaume des vérités générales» mais a «des limites bien précises», sa «fin propre» étant «d’expliquer telle ou telle partie du passé » (L’Histoire p161-166). Pour comprendre l’apport de Kracauer à la question de l’articulation du particulier et du général, S. Loriga propose ensuite de revenir sur son traitement du problème de la «structure hétérogène du monde historique». Kracauer insiste ainsi sur les «limites de la notion d’appartenance» (à des groupes ou institutions). «Dans la mesure, écrit-il, où un individu "appartient", une grande part de ce qu’il est reste hors du cadre» (ibid. p 77). La critique vaut aussi pour l’appartenance temporelle et la notion de Zeitgeist, une époque n’étant «qu’un conglomérat précaire de tendances, d’ambitions et activités indépendantes». S’il «reconnaît çà et là que chaque époque a sa propre physionomie», Kracauer en vient à «désavouer la notion de période», unité qui «pullule d’anachronismes, de cas d’exterritorialités chronologiques, de débordements temporels». Aussi le septième chapitre dénonce-t-il chez Ranke ou Pirenne des «stratagèmes pour connecter ce qui est déconnecté» et consolider des «contextes illusoires». Pour autant, «Kracauer ne propose pas d’étudier tout le passé à travers le microscope, mais de saisir la mesure spécifique de chaque phénomène historique». L’histoire doit alors «renoncer à connaître le passé dans sa totalité » et se faire «connaissance par entités singulières», chacune ayant sa mesure temporelle propre et ne pouvant être appréhendée que comme fragment. Il ne faut pas subsumer le particulier sous le général mais exalter des dissonances et des contre-champs, tel le gros plan de Griffith sur les mains de Mae Marsh. Près de quarante ans après sa publication, History suggère finalement aux historiens de résister aux deux «utopies» que seraient la représentativité et la prosopographie. La première procède par induction à partir de cas singuliers jugés communs, normaux ou moyens. La seconde «vit dans le mirage de pouvoir saisir une époque ou une civilisation en reconstituant ses éléments un par un». Les réflexions de Kracauer sont, bien sûr, plus heuristiques que dogmatiques: elles valent surtout comme aiguillons et garde-fous et sont loin d’apporter une solution définitive au problème de l’articulation du particulier et du général qui ne cesse de tarauder les chercheurs en sciences humaines.
4«Détails, gros plan et micro-analyse», (p45-64). Kracauer souligne, dans l’introduction, (L’Histoire p56) qu’il comparait «déjà l’historisme et la photographie» dans son article de 1927, faisant ainsi lui-même du parallélisme entre l’historiographie et les médias photographiques «l’élément de continuité entre la première et la deuxième phase de son œuvre que sépare la césure de l’exil». Carlo Ginzburg - qui avait largement contribué dans les années 90 à la (re)découverte du dernier Kracauer (« Microhistory. Two or Three Things That I know about It », Critical Inquiry, 20-1, 1993, p10-35. Traduction de Martin Rueff à paraître prochainement aux éditions Verdier) - se demande si le rapprochement « un peu rapide » entre histoire et historisme, «difficilement compatible avec les critiques que Kracauer n’a cessé d’adresser à ce dernier», est à mettre au compte de l’inachèvement du manuscrit ou constitue «un indice qui pourrait indiquer la présence d’une ambiguïté dans la pensée de Kracauer». Dans l’article de 1927, Kracauer observait que l’historisme s’était «imposé à peu près en même temps que la technique photographique moderne» et voyait entre ces deux «produits de la société capitaliste» un parallélisme profond : la photographie cherchant à créer «une continuité spatiale» tandis que «l’historisme voudrait remplir la continuité temporelle» («La photographie», Le Voyage et la danse* p44). Photographies et historicisme se trouvaient alors «associés dans une seule et même condamnation», même si Kracauer envisageait tout de même «une émancipation de la photographie, appelée à se libérer du pur enregistrement des événements». Entre ces réflexions et History se trouve un élément de discontinuité qu’incarne la grand-mère de «Marcel». «Dans Theory of film* et History, Kracauer analysait respectivement les caractéristiques du film et de l’historiographie en se référant plus d’une fois à cette page du Côté de Guermantes, dans laquelle le narrateur, revenant à l’improviste chez lui après un voyage, voit sa grand-mère sans qu’elle le voie, lui, et ne la reconnaît pas un bref instant». Le narrateur, dont le regard «estrangé» est comparé notamment à «l’objectif impassible de l’appareil photographique», comprend alors que son aïeule va mourir. Par le biais de Proust, peut-être inspiré par un passage des Mémoires de Saint-Simon, et sans doute par celui de Benjamin qui avait déjà traduit Guermantes en allemand lorsque les deux exilés se rencontrèrent à Marseille, Kracauer substitue à l’analogie entre historicisme et photographie «l’analogie complètement différente, et par certains aspects opposée», de la photographie et de l’historiographie. Pour comprendre ce second rapprochement, il faut cependant se souvenir que, chez Proust, la figure du photographe apparaît à l’issue d’une déclinaison paradigmatique convoquant «le témoin, l’observateur, en chapeau et manteau de voyage, l’étranger qui n’est pas de la maison, le photographe qui vient prendre un cliché …». Pour Kracauer, le «manque de reconnaissance», le regard «estrangé» permet une meilleure compréhension. Ginzburg fait bien sûr ici référence à ses propres réflexions sur «l’estrangement» et souligne que Kracauer, dans le quatrième chapitre, compare la figure de l’historien, «étranger au monde que ses sources évoquent» (L’Histoire p145), à celle de l’exilé, certains grands historiens devant d’ailleurs beaucoup, selon lui, à leur condition d’expatriés. «L’identification de l’historien avec l’exilé» est ainsi le point d’aboutissement d’une réflexion sur les médias photographiques. Kracauer explore donc dans ses deux derniers ouvrages un mode de connaissance fondé par une attitude de «passivité active» - à l’instar des médias photographiques, l’historiographie «n’est pas un simple miroir de la réalité» et implique «réceptivité» d’une part, «choix» et «construction» d’autre part. Malgré la variété des terrains d’enquête, l’itinéraire intellectuel de Kracauer «se révèle d’une profonde unité», comme en témoigne par ailleurs le rapprochement des jeux d’échelles en historiographie et au cinéma. Ginzburg suggère que Kracauer n’aurait pu parler de micro-histoire sans le cinéma et le gros plan. Les médias photographiques auraient, sur ce point, libéré «toute une série de possibilités cognitives: une nouvelle manière de voir, de raconter et aussi de penser». Des dernières pages - constituées d’une digression assumée sur l’« impassibilité devant le réel » et la valorisation du détail chez Flaubert et Michelet - on retiendra la conclusion, sans surprise de la part de l’historien italien, sur les «implications cognitives (et pas seulement rhétorico-ornementales) de toute narration quelle qu’elle soit».
5 «Le voyage de l’historien. Temps et contingence chez Kracauer», (p65-75). L’article de Jakob Tanner souligne d’abord la méfiance de Kracauer - «dont l’idéal consistait à tenir les idées dans un état fluide» - envers les modes de pensée systématiques. Il se démarque donc de la «représentation d’un univers homogène gouverné par des causalités claires et nettes », mais considère cependant que la réalité historique, malgré son indétermination, est «en partie structurée» (L’Histoire p251), ce double aspect trouvant son expression emblématique dans l’adjectif anglais contingent, que l’on peut traduire à la fois par «accidentel» et par «dépendant». J. Tanner résume ensuite le quatrième chapitre («Le voyage de l’historien») et rappelle que Kracauer, contre la thèse d’une histoire qui serait toujours «contemporaine» et à la suite de l’historien anglais Thomas Macauleay, compare le parcours «dans le monde des traces et des archives» à un voyage à l’étranger. En équilibre entre distance et empathie, «faire de l’histoire équivaut à un déplacement, à l’abandon d’un territoire sûr». Au retour de ce voyage, l’historien, dépaysé, peut porter «un regard étonné, voire novateur, sur le présent». Les dernières pages de l’article rappellent enfin la méfiance de Kracauer vis-à-vis d’une historiographie «linéaire» et à rebours de sa conception d’un univers historique hétérogène : «la réalité traitée par l’historien n’est pas une totalité cohérente qui se déploierait dans un temps homogène», d’où la condamnation de l’histoire universelle – comprise comme philosophie de l’histoire. J. Tanner souligne avec raison la dimension normative des pages où Kracauer condamne - aussi bien dans les domaines historiographiques que littéraires ou cinématographiques - la linéarité de l’intrigue et les «astuces et techniques de mise en scène qui soutiennent une tendance à l’harmonisation».
6 «L’historien entre objectivisme et subjectivisme. Siegfried Kracauer face à Marc Bloch», (p77-92). Peter Schöttler, traducteur allemand de l’Apologie pour l’histoire ou Métier d’historien, constate que seuls deux historiens échappent, dans History, à une « dispostion quelque peu manichéenne » mettant les uns «du bon côté» et dénonçant l’inconsistance des autres. Lewis Namier et Marc Bloch sont, en effet, à la fois cités comme modèles de «finesse» et critiqués pour leurs «préjugés scientistes». Seule la figure de Bloch, que Kracauer gratifiait du titre d’«historien par excellence» (L’Histoire p126), retient ici l’attention de P. Schöttler. History ne dialogue qu’avec un Bloch «restreint» - seules l’Apologie et La Société féodale sont convoquées, à l’exclusion d’autres textes comme Les Rois thaumaturges - et «isolé» d’une École des Annales que Kracauer semble avoir ignorée (les échelles braudéliennes de temporalité auraient pourtant dû l’intéresser). Mais «Kracauer ne se trompe pas sur les intentions profondes de Bloch», qui conçoit l’histoire comme un travail scientifique, ou amené à le devenir, et souligne chez cet historien un «côté rationaliste» qu’on aurait aujourd’hui tendance à réduire. Et P. Schöttler de s’inscrire en faux contre la thèse, avancée notamment par Ginzburg (« A proposito della raccolta dei saggi storici di Marc Bloch », Studi Medievali, 6, 1965), d’une rupture entre un Bloch «jeune» et «postiviste» et le Bloch de l’Apologie, tout en précisant que le «scientisme» de Bloch n’est pas le positivisme étroit de Langlois et Seignobos qui «croyaient aux "faits" en tant que tels et refusaient tout constructivisme». On comprend ainsi mieux la réaction de Kracauer: l’historien français insiste sur l’aspect scientifique de son travail et se réfère surtout à Renan, Cournot, Durkheim ou Simiand alors que, pour Kracauer, l’opposition Geistes- vs Naturwissenschaften reste essentielle, même s’il juge le programme de Dilthey insuffisant. Un autre point de divergence apparaît lors de la confrontation de la critique par Bloch de la photographie comme «mode de connaissance déficient et inefficace, parce que passif» à la théorie développée par Kracauer de la «passivité active» du processus photographique comparé au travail de l’historien face à ses sources. Kracauer semble enfin mettre «dans le même sac» l’histoire universelle d’un Spengler ou d’un Toynbee et l’histoire universelle, en fait mondiale et comparée, souhaitée par Bloch ou Pirenne. En revanche, la récurrence dans les derniers chapitres de History de l’idée, empruntée à l’Apologie, d’un «tact des mots» nécessaire à l’historien, témoigne de la dette de Kracauer vis-à-vis de Bloch. Kracauer l’utilise avant tout pour souligner que l’histoire doit être écrite «à tâtons», sans que l’historien puisse « jamais compter sur une vérité unique et univoque». P. Schöttler conclut que, tout en prenant Marc Bloch très au sérieux, Kracauer se rapprocherait finalement, par ses amalgames, d’un Valéry, auquel il se réfère d’ailleurs souvent et à qui Lucien Febvre ou Marc Bloch reprochaient de critiquer l’historiographie en ignorant la «nouvelle histoire» qu’ils étaient en train de fonder au cours des années vingt et trente.
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8«Mobilités interdiscursives et stratégies argumentatives dans History», (p93-118). Le titre choisi par Walter Moser souligne chez Kracauer une «tension» entre «une mobilité qui dérange», à l’encontre d’un certain «ordre du discours», et une stratégie argumentative visant à «dégager la spécificité de la connaissance historique». «Il y aurait de la méthode dans la mobilité instable que Kracauer n’hésite pas à générer dans sa traversée des discours». Cette traversée, véritable «contrebande discursive», consisterait à «introduire dans un champ de discours particulier» (l’histoire, ou plutôt la réflexion métahistorique) «des éléments appartenant à un autre champ», comme «la philosophie, la science et la littérature». La notion d’«ordre du discours» rappelle évidemment Foucault, cité en note, mais W. Moser s’appuie surtout sur les travaux de Jürgen Link (Elementare Literatur und generative Diskursanalyse, München, Fink, 1983) qui distingue les discours spécialisés de «l’interdiscours», soit «l’espace discursif du quotidien» apte à mobiliser des matériaux provenant de ces discours spécialisés. La littérature serait, quant à elle, le «discours spécialisé dans la mise en rapport de tous les autres» et Kracauer procéderait à une «inversion systémique en échangeant les places de la littérature et de l’histoire». W. Moser confond ici, comme il ne cessera de le faire, discours de et discours sur l’histoire et la convocation de la théorie de Link ne paraît pas indispensable. Il rappelle ensuite l’ «extériorité» de Kracauer vis-à-vis de la corporation historienne puis distingue deux «figurations» qui permettent à Kracauer d’ «identifier le lieu de l’histoire», de la situer dans le «champ des savoirs». La première figure apparaît dans le sous-titre du livre et consisterait en une «temporalisation du lieu de l’histoire»: l’histoire ne s’occupe que des choses pénultièmes et laisse les choses ultimes aux spéculations philosophiques ou théologiques. Sur le trajet de la connaissance menant aux universaux, l’historien doit «s’arrêter à l’avant-dernière étape qui serait son lieu - et son temps - propre». Avec la figure de l’ «antichambre» (The Anteroom est le titre du dernier chapitre de History), la temporalisation se doublerait d’une spatialisation. Kracauer fait de ce «lieu de transit où on ne se tient que pour aller ailleurs» la «demeure même de l’historien» et finit par faire un «vrai lieu» de ce «non-lieu», notamment lorsqu’il évoque un «véritable esprit d’antichambre» (L’Histoire p291) ; il installe ainsi l’histoire dans «l’instabilité et la précarité» d’un «espace entre-deux», d’une «zone intermédiaire». En élaborant une «logique du tiers-lieu et de la dynamisation des binarismes», Kracauer anticipait «un mode de pensée qui a cours aujourd’hui», par exemple dans la définition de la culture en contexte postcolonial par Homi Bhabba (The Location of Culture, NY-London, Routledge, 1994). Cette «localisation» en zone intermédiaire ferait de l’histoire «un lieu prédestiné à accueillir l’interdiscursivité». Mais, là encore, la confusion entre discours historique et métahistorique est patente et grève irrémédiablement la démonstration. Kracauer convoque certes le genre du roman policier pour modéliser différentes méthodes d’enquêtes historiographiques et fait bien de Proust une «autorité en matières de relations entre le présent et le passé», mais Kracauer ne fait pas de l’histoire… W. Moser est alors en bien mauvaise posture lorsqu’il remarque en note que Kracauer qualifie d’ «historien majeur» le Tolstoï de La Guerre et la paix. L’article se termine par l’examen de trois cas d’interdiscursivité complexes. On retrouve d’abord une certaine grand-mère qui donne à W. Moser l’occasion de souligner la «forte tendance ocularo-centriste dans le représentation du processus de connaissance chez Kracauer». Dans le septième chapitre («L’histoire générale et la démarche esthétique »), Kracauer cite Auerbach pour ériger Joyce, Proust et Woolf en modèles pour les historiens qui, eux aussi, doivent refuser d’«imposer à la vie, à leur sujet, un ordre que la vie elle-même ne possède pas» (la citation est extraite de Mimèsis). La fiction moderne est donc un phare pour l’historien qui doit éviter les «effets d’harmonisation» et rendre compte du caractère hétérogène et discontinu du Lebenswelt. Le troisième recours à la littérature fictionnelle que relève W. Moser se situe à la fin du même chapitre et constitue une «espèce de modélisation croisée entre littérature et histoire»: Kracauer cite un long passage de Tristram Shandy où Sterne met en scène la figure d’un historien, «modèle analogique pour l’activité dans laquelle est engagé le narrateur».
9 «Biographie, autobiographie, ego-histoire : l’historien en son miroir», (p119-139). Après avoir cité la première phrase de l’ouvrage - «Les historiens de l’Antiquité faisaient habituellement précéder leurs récits d’une courte autobiographie…» -, Bertrand Müller laisse Kracauer de côté pendant une dizaine de pages pour s’intéresser à la question de l’inscription (ou non) du «je» de l’historien dans son texte. À l’hypothèse traditionnelle d’une corrélation entre subjectivité textuelle et subjectivité épistémologique - l’effacement du «je», au cours du dix-neuvième siècle, serait l’expression d’un positivisme aujourd’hui caduc, tandis que sa résurgence «exprimerait un rapport nouveau à l’objet, manifesterait une nouvelle épistémologie, voire une nouvelle éthique dans la recherche» - il oppose, ou ajoute, une autre interprétation. L’effacement des marques de la subjectivité tiendrait d’abord «à une transformation de la relation de l’historien avec la société et en particulier à un effacement de sa posture de témoin». Nourries de références aux travaux de Jonathan Crary (L’art de l’observateur. Vision et modernité au XIXe siècle, Jacqueline Chambon, 1990), de François Hartog («L’œil de l’historien et la voix de l’histoire», Communications n°43, 1986) et de Monique Sicard (La Fabrique du regard. Images de science et appareils de vision. XVe-XXe siècles, Odile Jacob, 1998), ces réflexions sur l’inscription textuelle de l’articulation entre histoire et mémoire sont des plus stimulantes. Les pages suivantes résument quelques grandes lignes de l’ouvrage posthume de Kracauer: refus du dogmatisme et de l’esprit de système, continuité avec Theory of film et homologie histoire - médias photographiques (et l’on retrouve une grand-mère qui, paradoxalement, nous est désormais familière), critique de la notion de Zeitgeist et de la thèse de l’historien nécessairement fils de son temps à travers les figures du voyageur, du sans-domicile et de l’exilé… L’article se termine par la lecture de deux passages où le «je» de Kracauer surgit mais ne constituerait «au fond qu’une dissimulation, une manière d’apparaître pour ne pas se dire et se déplacer ailleurs».
10 « Les éléments d’autobiographies intellectuelles dans History », (p141-163). Comme Carlo Ginzburg, Olivier Agard pose la question de l’unité de l’itinéraire intellectuel de Kracauer et propose «de prendre le postulat de la cohérence formulé par Kracauer dans History au sérieux». L’ouvrage est alors non seulement lu comme une somme récapitulative mais encore comme un «autoportrait indissolublement personnel et philosophique». Olivier Agard met donc surtout en avant les éléments de continuité entre History et les travaux précédents, en particulier ceux de la période antérieure à l’exil. D’abord, Kracauer prolonge dans History une réflexion entamée dès ses écrits de jeunesse sur la «crise de l’historisme», le relativisme et le scepticisime qu’impliquerait l’historicisation du savoir et de la pensée. Dès les années vingt, il «en était venu à l’idée de l’impossibilité d’une saisie absolue et totale de la réalité socio-historique»; dans History, il formule de nouveau «l’idée du caractère hétérogène du donné socio-historique», dénonce les tentatives des historiens pour «subsumer la réalité sous des principes qui la rendent plus intelligible, l’organisent» et condamne définitivement toute philosophie de l’histoire prétendant dégager des lois universelles. Dans Genêt* (roman paru en 1928), le narrateur ironisait ensuite sur la méthode historiographique de son oncle, qui collecte ses données à la manière des positivistes allemands. Deux ans plus tard, dans son essai de sociologie Les Employés*, Kracauer définissait au contraire sa méthode comme «construction dans le matériau» (Konstruktion im Material), à quoi fait écho la notion de «passivité active» proposée dans History: «il faut à la fois laisser parler le matériau et le construire», l’histoire ne s’écrivant pas «avec un pot de colle et des ciseaux», selon une expression empruntée à Collingwood. L’historien est alors «comme un détective qui tente de comprendre une époque à partir de ses traces matérielles» et Kracauer retrouve dans History certaines des réflexions proposées dans son essai sur Le Roman policier*, en particulier lorsqu’il oppose les mauvaises enquêtes, comme celles d’Hercule Poirot, qui recompose arbitrairement la réalité, et les véritables enquêtes, par exemple celles d’Arnold Pike dont la méthode, dans les romans de Philip McDonald, s’inscrit pleinement dans ce que Ginzburg définira plus tard comme «paradigme indiciaire». Celui-ci se double, dans History, d’un «paradigme ethnographique»: l’historien est comparé à un voyageur ethnologue, comme l’était le sociologue des Employés*. O. Agard rejoint encore Ginzburg en soulignant que l’analogie avec les médias photographiques, désormais centrale, constitue en revanche un véritable élément de discontinuité dans le parcours intellectuel de Kracauer. «Susceptible d’une infinité de montages et de perspectives également légitimes», le matériau de l’historien paraît ainsi «beaucoup plus ouvert et indéterminé» que celui du sociologue de 1930. Le «caractère hétérogène de l’univers historique » renforce cette indétermination, mais Kracauer, en posant le principe de la coexistence de séries temporelles, ne fait que radicaliser «une intuition qui affleurait dans ses textes antérieurs: il s’était toujours intéressé aux phénomènes d’asynchronie », de « non contemporanéité du contemporain » (l’expression est de Ernst Bloch); tel est le cas dans Les Employés*, dans son Jacques Offenbach* à travers l’attention portée à «l’imbrication de l’archaïsme et du moderne» ou encore dans ses travaux sur la propagande totalitaire. History serait enfin pour Kracauer l’occasion d’un retour sur ses «engagements» politiques. Il explique, dans l’introduction, une partie de son intérêt pour l’histoire comme un intérêt pour «les grands mouvements idéologiques à l’état naissant», en particulier pour les «possibilités que l’histoire n’a pas jugé bon d’explorer», (L’Histoire p59). Il aurait ainsi éprouvé «un attrait intense pour les époques qui ont précédé l’établissement définitif du christianisme dans le monde gréco-romain, la Réforme, le mouvement communiste» (Ibid. p60).
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12 «Les Jacques Offenbach de S. Kracauer. Biographie, histoire et cinéma» (p165-186). Kracauer avait le projet d’une adaptation cinématographique de son Jacques Offenbach ou le secret du Second Empire* (1937), qu’il écrivit en exil à Paris à partir de 1934 tandis que Benjamin travaillait à son Livre des passages (Passagenwerk). Nia Perivolaropoulou rappelle d’abord que Kracauer avait publié en 1930 un article très critique («La biographie - forme d’art de la nouvelle bourgeoisie », trad. dans Le Voyage et la danse*) sur les biographies à succès et ce que l’on n’appelait pas encore «l’illusion biographique»: la forme narrative éculée des biographies traditionnelles entretient «l’illusion d’un individu cohérent, conscient, unitaire, d’un sujet souverain». Rien d’étonnant alors dans l’ «avertissement» qui ouvre Offenbach* et le démarque des «biographies habituelles» en le qualifiant de «biographie sociale». Comme l’œuvre inachevée de Benjamin, celle de Kracauer porte sur le dix-neuvième siècle parisien, sinon français, et propose de «véritables passages entre la personne d’Offenbach et Paris, entre ses opérettes et son époque, entre le compositeur et la société dans laquelle il évolue». Les motifs du boulevard, de la foule, du flâneur, du journaliste, de la Lorette, du dandy, du bohème sont «autant de lieux qui servent à Kracauer, tout comme à Benjamin, à décrire et à interpréter le XIXe siècle français et Paris, sa capitale, comme origine de la modernité». Probablement dès 1938, Kracauer, qui n’en est pas à son premier projet d’écriture pour le cinéma, rédige un Jacques Offenbach, Motion picture treatment, manuscrit qui précise le cadre chronologique et les épisodes retenus pour l’adaptation cinématographique et donne des indications concernant lieux, personnages, décors, acteurs, prises de vue, montage, contenu de quelques dialogues et bien sûr musique. N. Perivolaropoulou examine ensuite trois moments du film treatment en les comparant avec les passages correspondants du livre pour montrer en quoi le projet d’adaptation devait constituer une véritable «transformation cinématographique». Elle insiste sur «l’importance de la construction temporelle du récit, qui déconstruit en fait la linéarité chronologique» et souligne que, dans le film treatment, la musique «ne se contente pas d’assurer le passage d’une séquence à l’autre, de caractériser des personnages ou encore de contribuer à l’établissement d’une atmosphère» mais «assume, pour une grande part, le travail de création d’une dimension temporelle autre que chronologique». On retiendra des réflexions proposées en conclusion de l’article, que «la migration du personnage d’Offenbach du livre au film» est synonyme d’une «plus grande fictionnalisation», remarque qui vient bien à propos suggérer d’autres relations entre histoire, cinéma et fiction, en contre-point de l’analogie entre archives et «caméra réalité» qui constitue le fil rouge de ce volume.
13 «Siegfried Kracauer, le Museum of Modern Art et la propagande nazie», (p187-208). Souvent considérée comme mineure dans l’œuvre de Kracauer, l’étude des films documentaires de la propagande nazie commandée par le MoMa (musée d’art moderne de New York) en 1941 a constitué, selon Christian Delage, une expérience décisive dans sa réflexion sur les rapports entre histoire et cinéma. Ce mémoire sur «La propagande et le film de guerre nazi», reproduit en annexe de De Caligari à Hitler*, est d’abord lu à la lumière d’un article de 1932, «La tâche du critique de cinéma» (repris dans Le Voyage et la danse*), où Kracauer enjoignait au critique de s’intéresser non seulement aux fictions d’auteurs mais aussi à la production courante, y compris aux films d’opérette, aux films militaires, aux comédies, ainsi qu’aux actualités et aux documentaires, et d’interroger notamment leur signification sociale, leur capacité à influencer les masses. Héritier de Vertov et de la recherche de l’hétérogénéité par le montage, mais vantant aussi la «valeur mécanique d’enregistrement du film», Kracauer avait déjà eu maille à partir en Allemagne avec l’UFA qu’il accusait de produire, dans ses journaux d’actualité, un «continuum factice» imposé d’une semaine à l’autre au public. Lorsqu’il reçoit, en 1941, la commande d’une «étude de la communication allemande en temps de guerre à travers le film», il s’intéresse aux documentaires et aux actualités, qu’il pouvait consulter grâce à la collection des Deutsche Wochenschauen rassemblée à Washington et surtout aux acquisitions récentes de la cinémathèque du MoMa, parmi lesquelles «le meilleur de la production soviétique dont une partie avait servi de modèle - en tout cas d’inspiration - aux réalisateurs allemands». Kracauer n’hésite pas à souligner la qualité et surtout l’efficacité de certains films et «en vient à se placer sur le terrain de l’adversaire et à imaginer de meilleures solutions de mise en scène »: il se demande notamment pourquoi les nazis, contrairement aux soviétiques, s’en tenaient aux images de reportage. Le bombardement reconstitué dans le film britannique Target for Tonight semble ainsi «plus réel» que les bombardements des films nazis. Kracauer note ensuite que les persécutions antisémites apparaissaient peu à l’écran et s’interroge par ailleurs sur l’absence de la mort dans les films allemands, alors que «les Russes n’hésitaient pas à montrer des cadavres civils et militaires». Il souligne ainsi une faille de la propagande nazie, qui ne fonctionnait bien que tant la Wehrmacht était victorieuse mais ne parvenait plus «à travestir une réalité tragique que les familles allemandes pouvaient connaître jusque dans l’intimité de leur foyer». Selon C. Delage, c’est à partir de ce travail pour le MoMA que Kracauer en serait venu à traquer, dans De Caligari à Hitler*, «les motifs pré-nazis de certains films de la République de Weimar».
14 «Le diptyque de S. K. ou comment être présent à sa propre absence», (p209-228). S’appuyant sur l’introduction de History, où Kracauer affirme une continuité avec ses travaux antérieurs, en particulier Theory of Film*, Jean-Louis Leutrat considère que les deux derniers ouvrages de Kracauer forment un «livre double» dont la référence à Proust serait l’«épine dorsale». Les deux œuvres doivent alors être «envisagées ensemble pour produire une lecture stéréoscopique», sans quoi elles risqueraient de paraître «sans relief». Le diptyque confronte l’image (le film) et le temps (l’histoire) et serait un instrument de la pensée de Kracauer en exil, une «forme de montage» comparable à celles qui sont pratiquées par Deleuze avec L’Image-Mouvement et L’Image-Temps ou par Didi-Huberman avec Devant le temps et Devant l’image. Mais c’est surtout un rapprochement avec Histoire(s) du cinéma de Godard qui est ici proposé. L’usage du fragment visuel ou sonore par Godard répondrait à la «loi des niveaux» formulée par Kracauer à propos du récit historique et du récit filmique et illustrée, dans ses deux ouvrages, par le gros plan de Griffith sur les mains de Mae Marsh. À la discontinuité fragmentaire s’ajouterait aussi chez Godard, qui partagerait avec Kracauer (et Benjamin) une même conception du temps historique, un certain usage de l’a(na)chronisme qui ferait écho aux réflexions du sixième chapitre de History, chapitre qui interroge des notions comme celles de chronologie ou de période et met en avant les phénomènes d’asynchronie ou de non-contemporanéité d’événements simultanés. L’idée de rachat rapprocherait enfin Godard de Kracauer: Histoire(s) du cinéma débute et s’achève par l’idée de rédemption tandis que Theory of film* a pour sous-titre The Redemption of Physical Reality. Et J.-L. Leutrat de conclure que «malgré ce qui sépare Kracauer et Godard, chacun aide à comprendre l’autre, ce qui confirme l’actualité du premier».
15*Ouvrages et articles de Kracauer:
16- Der Detektiv-Roman. Ein philosophischer Traktat (1926), trad. par Geneviève et Rainer Rochlitz, Le Roman policier. Un traité philosophique, Paris, Payot, 1981.
17- Ginster. Von ihm selbst geschrieben (1928), trad. par Clara Malraux, Genêt. Roman, Paris, Gallimard, 1933.
18- Die Angestellten (1930), trad. par Claude Orsoni, Les Employés. Aperçus de la nouvelle Allemagne, présenté par Nia Perivolaropoulou, Paris, Editions de la Maison des sciences de l’homme, 2004.
19- Jacques Offenbach und das Paris seiner Zeit (1937), trad. par Lucienne Astruc, Jacques Offenbach ou le secret du Second Empire, préface de Daniel Halévy, Paris, Grasset 1937; rééd. Paris, Le Promeneur, 1994.
20- From Caligari to Hitler. A Psychological History of the German Film (1947), trad. par Claude B. Levenson, De Caligari à Hitler. Une histoire psychologique du cinéma allemand, Paris, Flammarion, 1984.
21- Theory of film. The Redemption of Physical Reality, N.Y., Oxford University Press, 1960; rééd. Princeton, Princeton University Press, 1977.
22- History. The Last Things Before The Last, préface de Paul Oskar Kristeller, N.Y., Oxford University Press, 1969; rééd avec une nouvelle préface de Paul Oskar Kristeller, Princetown, Markus Wiener Publishers, 1995; trad. par Claude Orsoni, L'histoire. Des avant-dernières choses, Présentation de Jacques Revel, préface de Paul Oskar Kristeller (1969) et postface de Nia Perivolaropoulou et Philippe Despoix, Paris, Stock, coll. «Un ordre d’idées», 2006.
23- Le Voyage et la danse. Figures de ville et vues de films, textes choisis et présentés par Philippe Despoix, trad. par Sabine Cornille, Saint-Denis, Presses universitaires de Vincennes, 1996.