Bakhtine, Volochinov et Medvedev dans les contextes européens et russe
1Bénédicte Vauthier, de l’Université de Tours, a été le maître d’œuvre de ce volume, dont il faut souligner l’ampleur et la qualité. Il fait suite à une autre publication importante consacrée à Bakhtine en 1997 : L’héritage de Mikhaïl Bakhtine, dirigée par Catherine Depretto (Presses Universitaires de Bordeaux).
2Les grands problèmes posés par l’œuvre de Bakhtine et de son cercle sont ici abordés sous un éclairage souvent nouveau. D’abord, l’analyse du contexte européen dans lequel il s’inscrit fait une part peut-être plus large que d’ordinaire à la culture allemande. Son influence sur la vie intellectuelle russe de cette époque est connue, mais sans doute pas assez dans les détails, particulièrement sa conception des problèmes formels (les formes signifiantes), avec Dilthey, Wölfflin, Cassirer (La philosophie des formes symboliques)... Que ces penseurs aient été attirés par Cassirer est significatif : par lui, le lien est rétabli avec le philosophe occidental qui se trouve au cœur de la pensée russe — Nicolas de Cues. Au passage, on peut noter l’importance de ce qui se fait à l’Université de Bochum dans l’étude de la pensée russe. Ce volume est d’ailleurs le fruit d’un séjour dans cette université. Que, de plus, une hispaniste en soit l’éditeur est d’autant plus remarquable.
3L’Allemagne, de son côté, a été particulièrement réceptive à la culture russe de cette époque, et a servi de plaque tournante. C’est pourquoi Jirmounski, pourtant sans relation directe avec le cercle de Bakhtine, occupe une place centrale dans ce volume, avec son ouvrage, Les problèmes formels dans la science russe de la littérature, publié en 1925 en allemand à Leipzig. La présentation de Roger Comtet (Viktor Maksimovitch Jirmounski (1891-1971) et le formalisme russe) met en évidence une attitude qui s’apparente à celle de Bakhtine : non pas refus du formalisme, au contraire, mais nécessité de ne pas s’y enfermer, et vigilance à l’égard de ce qui l’avait précédé, ce qui était aussi dans la tradition universitaire pétersbourgeoise.
4Le texte lui-même (traduit par R. Comtet), dont le but est de présenter « l’histoire de la méthode formelle », contribue à rétablir les liens, à montrer d’où vient cette attention portée à la forme : elle est dans le prolongement du symbolisme, elle procède autant que lui d’un refus de l’utilitarisme du XIXe siècle. Cette synthèse consistante a un aspect « état des lieux » très précieux sur le plan informatif, surtout complété comme elle l’est par une bibliographie très détaillée, qui va jusqu’en 1926, et par un répertoire des noms de tous les personnages cités par Jirmounski. Tout cela en fait un outil de travail précieux.
5Quelques sources allemandes sont mises en évidence par Sergueï Tchougounnikov (Quelques sources allemandes de la « linguistique sociologique » (Volochinov) et de la « psychologie matérialiste » (Vygotski)…), dans le domaine de la « linguistique sociologique » de Volochinov. Toutefois, en ce qui concerne la polémique entre Iourkiévitch et Tchernychevski, il faut rappeler que le « dualisme » que combat Tchernychevski repose sur un contresens : le terme « dualisme » au sens religieux n’est pas celui de l’âme et du corps. Et pour les philosophes des Académies de théologie, dont Iourkiévitch faisait partie, la distinction matérialisme/spiritualisme n’était justement pas aussi tranchée. Sans vouloir ignorer la grandeur héroïque de Tchernychevski, il faut bien voir que les arguments sur lesquels il fondait son « principe anthropologique » étaient assez rudimentaires.
6En replaçant le Rabelais « dans le contexte des discussions méthodologiques franco-allemandes des années 1910-1920 », Irina Popova (Le « carnaval lexical de François Rabelais. Le livre de M. M. Bakhtine dans le contexte des discussions méthodologiques franco-allemandes des années 1910-1920) apporte des précisions essentielles, sur l’origine du « carnaval » — au départ « carnaval lexical », l’expression ayant été employée pour la première fois par Vossler —, et sur le « génie grotesque », mis en évidence par Spitzer dans sa thèse sur Rabelais. Il reste que, s’il y a sans doute un certain manque d’audience de Rabelais en France, cela n’explique pas à soi seul que les études rabelaisiennes n’y accordent jusqu’à ce jour pratiquement aucune place à l’œuvre de Bakhtine. On espère voir approfondie dans un autre travail la référence à Goethe et à sa réflexion sur le Mercredi des Cendres.
7On perçoit, dans le cercle de Bakhtine, l’écho des débats soulevés par la réception de Saussure en Russie (C. Depretto, Alexandre Romm (1898-1943), lecteur du Marxisme et la philosophie du langage). La réaction d’Alexandre Romm (1e traducteur, non publié, de Saussure) à Marxisme… converge finalement avec l’attitude de Bakhtine lui-même face à l’ouvrage de Volochinov. Ses objections portent sur le problème de la reconnaissance, car tout énoncé, même en grande partie création individuelle, nécessite toujours « un minimum de compréhension, assuré par l’existence de la langue en tant que système ». Une négation totale de la langue comme système éliminerait la communication.
8Une grande place est accordée dans ce numéro au problème passionnant et vraiment singulier que pose la réception de Bakhtine en Occident.
9Les conditions très particulières de sa réception l’avaient fait considérer comme une sorte d’hapax, alors que ses liens avec le monde intellectuel russe des années 1910 sont avérés. Ce volume apporte encore des éclaircissements sur ce point et suggère de nouvelles pistes. Les textes de Bakhtine et de son cercle ont été reçus dans un ordre qui n’était pas celui de leur production, avec retard, et dans des milieux intellectuels précis qui impliquaient par avance une certaine forme de réception (marxiste ou saussurienne). On peut également mesurer l’ambiguïté de la réception de la psychanalyse en Russie (Michel Aucouturier, Le cercle de Bakhtine et la psychanalyse) : elle apparaît d’abord comme une psychologie matérialiste, qui « sonne le glas de la psychologie idéaliste », et peut être mise en rapport avec l’engouement bien connu pour la réflexologie. Elle introduit aussi, inscrite en creux, une réflexion sur la mémoire (mais c’était une préoccupation commune à tous les contemporains, même si elle n’était pas dite). Que l’erreur peut être « génératrice du mode d’existence du sens » (Tatiana Bubnova, Être sans alibi. Pour un autre itinéraire bakhtinien) est une formule particulièrement heureuse ici. Les déformations subies conjuguaient d’une part l’action du contexte soviétique qui imposait le masque, et d’autre part l’ignorance de l’Occident, à l’époque, quant à la formation intellectuelle de Bakhtine.
10L’article de Matthias Aumüller (Le cercle de Bakhtine et la méthodologie en science de la littérature dans les années 1920) montre bien la position de Bakhtine par rapport à l’école formaliste — alors que dans les années 70 on l’a présenté (Todorov, Kristeva) comme faisant partie de cette école. C’est la connaissance des œuvres du début et de son entourage qui vont changer cette réception, et de ce point de vue le livre de Pavel Medvedev est décisif. La méthode formelle en littérature vient justement d’être éditée en français par B. Vauthier et R. Comtet aux Presses Universitaires du Mirail ; saluons au passage la décision d’indiquer l’auteur comme : Pavel Medvedev/Cercle de Bakhtine. Sur le Rabelais, l’article d’I. Popova apporte des précisions importantes, et souligne une fois de plus le caractère étrange de cette réception différée et faussée : les véritables sources du « carnaval » seraient à chercher dans les années 1910, donc hors contexte soviétique, et Rabelais n’aurait pas été un « but en soi » pour Bakhtine — mais cela, c’est dit en 1946… Vladimir Alpatov (Saussure, Volochinov et Bakhtine) rappelle que dans les années 1970, Le marxisme et la philosophie du langage fut considéré comme « structuraliste », car il allait dans le sens de la lutte contre la science officielle — c’est encore une réception faussée.
11L’article de Jaques Bres et Laurence Rosier (Réfractions : polyphonie et dialogisme : deux exemples de reconfigurations théoriques dans les sciences du langage francophones) reprend et conclut les questions de réception : dans le contexte français — essentiellement Kristeva —, les notions de dialogisme et polyphonie ont eu tendance à fusionner et à se diluer, et comme elles étaient utilisées en littérature, à se ramener à l’intertextualité.
12Ce volume permet donc de cerner les différentes étapes de la réception : Bakhtine a d’abord, pour les raisons que l’on a vues, semblé concerner avant tout les études littéraires, puis le « défi dialogique » s’est étendu aux sciences sociales (Michael O. Gardiner, Le défi dialogique de Bakhtine aux sciences sociales) : « la construction du savoir social » étant « une entreprise collective résultant de dialogues en cours, sans origine ni fin précise… », cela implique que « le sujet s’engage activement dans le milieu où il vit et l’altère ; et ce faisant il ne cesse jamais de se transformer lui-même ». Or c’est là une façon détournée d’interroger la destruction/création d’un monde, qui était effectivement à l’œuvre, et aussi de marquer implicitement une responsabilité de l’Occident : ces « modes de conscience réifiants » sont bien le produit de la pensée occidentale. Cette « critique du théorétisme » correspond au reproche général que les philosophes russes adressent à la philosophie occidentale en particulier à Kant : « récuser la validité de l’expérience vécue » au nom de « constructions intellectuelles ».
13On ne peut éviter de faire aussi le rapprochement avec la notion berdiaevienne « d’objectivation ». Il y a une « perte de soi » dans la vision d’autrui, à laquelle Bakhtine est sensible lui aussi, le risque de se laisser attraper, figer, dans une « détermination objectivante » « qui me rate en tant qu’auto-accomplissement » (Alexander Haardt, Répondre de quelque chose, c’est répondre à quelqu’un : un dialogue imaginaire entre Bakhtine et Levinas). En ce sens le Dostoïevski montre une nouvelle appréhension de la conscience (un monde fait de « …consciences multiples dont aucune n’est devenue complètement objet pour l’autre »), et il rejoint en effet E. Levinas, pour qui l’autre est l’absolument non déterminable par moi.
14Ce rapprochement entre Bakhtine et Levinas, qui tourne autour de la question de l’altérité, suggère qu’ils puisent sans doute à des sources communes, qui sont peut-être à chercher dans ce milieu culturel de la Russie de l’Ouest/Lituanie, dont ils sont tous deux issus.
15Plus largement, ce qui crée le sens est fondamentalement social. D’où l’importance de considérer la « valorisation » apportée par le langage (T. Bubnova). Contre les Lumières, Volochinov défend l’idée qu’il n’y a pas d’homme en soi, d’homme abstrait, non socialement organisé (Patrick Sériot, Volochinov, la sociologie et les Lumières). Pour qu’il y ait communication (« milieu sémiotique »), il faut qu’il y ait « organisation sociale ». La conscience en elle-même ne peut expliquer quoi que ce soit. L’individu isolé de son groupe ne peut être étudié.
16Medvedev (La méthode formelle…) parle lui aussi de « valorisation sociale » : même les « discours intérieurs » sont « traversés par les évaluations d’un auditeur virtuel » (Marie-Cécile Berteau, Le vécu de la langue dans la forme et la voix. Une approche avec Iakoubinski et Volochinov). Et même « dépourvu des justifications idéologiques officielles », l’individu est toujours dans son rapport unique avec les autres, ce n’est pas la fin du social. Il n’y a d’ailleurs pas de limite stricte entre « dialogicité » verbale et dialogicité intercorporelle (Augusto Ponzio, Dialogue, intertextualité et intercorporéité dans l’œuvre de Bakhtine et du Cercle) : la « sémiosphère » est globale.
17Si le « dialogisme » s’oppose à la dialectique, c’est que « la transformation perpétuelle, l’ambiguïté et l’interaction » vont « à rebours de la prédilection moderne pour l’ordre, l’immuable, la symétrie et la prévisibilité » (M. Gardiner). Ce que montre implicitement tout ce volume, c’est à la fois l’ancrage de cette notion dans le questionnement fondamental de ce temps (la mort d’une culture), mais aussi à quel point elle dépend d’un autre contexte : celui de la philosophie religieuse russe traditionnelle (déjà indiqué par Maryse Dennes dans L’héritage de Bakhtine). Il est très significatif qu’au-delà du Rabelais, les notions de « crise » et de « transition » qui distinguent tout « moment carnavalesque » (I. Popova) soient étendues par Bakhtine au romanesque et à la « vie », contre une conception « frileuse, casanière » (« komnatnoe ») du spirituel : c’est par là qu’on retrouve l’inspiration d’une philosophie religieuse qui, dès le début du XXe siècle, met l’accent sur l’idée de « Vie à travers la mort » (l’expression, plus tardive, est de L. Karsavine), c’est-à-dire d’une résurrection qui implique le passage par la mort réelle, absolue.
18Autre thème récurrent dans la philosophie russe traditionnelle : la pensée de la totalité. On le voit bien dès le Dostoïevski : la polyphonie montre une égale préoccupation de l’unité et de la multiplicité, leur mise en rapport dynamique (B. Vauthier). Elle implique une orientation vers l’unité, mais sans unification : or c’est justement ce qui définit l’un des concepts essentiels de la philosophie russe traditionnelle, « l’unitotalité ». Lorsqu’on lit (M. Gardiner) : « il n’est nullement question de fusion… en dépit du fait que nous co-participons au même monde » on ne peut manquer d’évoquer les notions de « distinction sans séparation » et « union sans confusion », qui sont à base de la définition traditionnelle de la Trinité, très présente dans la philosophie russe. Et l’idée d’unité dans la diversité, de « multiplicité de forces interactives » qui ne se dissolvent pas dans « une Unité supérieure », peut faire référence à l’unitotalité. D’autre part, la conviction qu’on ne peut rien connaître vraiment en dehors d’une totalité (M. Aumüller) est une des idées-forces de la philosophie russe, développée en particulier par le livre de N. Losski publié en 1910 (Le monde comme totalité organique), dont l’influence a été considérable à l’époque.
19Le plus intéressant, c’est que l’une des préoccupations spécifiques de cette philosophie soit étendue aux problèmes linguistiques – il faut retrouver la langue comme « totalité concrète, vivante » (Vl. Alpatov) –, mais d’une manière masquée. Sur ce point, il n’y a pas de différence notable entre Bakhtine lui-même et les membres de son cercle. Ce qui ramène au problème de sa réception : on l’a cru penseur soviétique, bien que peu conforme, alors qu’il vient visiblement surtout d’une pensée religieuse qui connaissait son épanouissement dans les années 1910.
20C’est ce qui rend particulièrement précieuse l’étude des contemporains de Bakhtine, qui, eux, se trouvaient dans un autre univers, où la pensée n’était pas « persécutée » : d’où l’intérêt d’analyser l’œuvre de son frère, malgré leur peu de points communs dans la vie, pour en savoir plus sur les sources de Bakhtine. L’article de Galin Tihanov (Micha et Kolia : penser le frère en tant qu’autre) rappelle que les études de folklore étaient en convergence avec l’héritage des plus prestigieux professeurs de l’université de Saint-Pétersbourg, Ziélinski par exemple (l’absence de différenciation entre acteur et spectateur, si caractéristique de la théâtralité populaire, s’applique autant à la tragédie grecque), mais on pense aussi à Grevs.
21Le caractère énigmatique, fuyant, du personnage (se dérobant à des rencontres qu’il aurait dû chercher) n’en apparaît que plus fort, ainsi que cette « plasticité » étonnante de sa pensée, qui a réussi à faire traverser incognito toute la période soviétique à un contenu idéologique si peu conforme. Les relations entre les membres du « cercle », vues sous ce jour, peuvent laisser une impression de malaise : cette paternité (pour les textes comme Le freudisme…) ni niée, ni revendiquée (M. Aucouturier), cette manière de désavouer les « ajouts désagréables » (la fameuse réponse à Serge Botcharov), confiés jadis à d’autres (ses « jeunes amis » chargés de « l’habillage idéologique »), qui ont malgré tout permis ainsi à ces travaux d’exister, et qui de plus, ont tous les deux subi la répression… L’article de Botcharov a été traduit par C. Depretto dans L’héritage de Bakhtine.
22Malgré l’existence d’un « cercle » de Bakhtine, on a l’impression d’une sorte d’isolement par rapport à la communauté intellectuelle de son temps (C. Depretto), qui s’ajoute aux problèmes de réception. Et ce volume contribue à retrouver des liens perdus. Il donne sa juste place à Vesselovski (lui-même introducteur de Rabelais en Russie, il faut le rappeler). L’article de Volochinov (« Qu’est-ce que la langue ? ») de 1930, qui pose la question des origines du langage et semble y répondre de la même manière que Marr (Ekaterina Velmezova, V. N. Volochinov et N. Ya. Marr sur les origines du langage…), a le mérite de bien montrer « le fond intellectuel commun de l’époque ».
23La question du « plagiat » (B. Vauthier) recoupe l’idée même de « dialogisme ». Cet aspect essentiel renvoie encore une fois au contexte culturel : on peut citer d’autres œuvres (l’une des plus caractéristiques étant le Poème de la mort de Karsavine), qui sont des tissus de citations jamais signalées, le plus souvent faussées, avec une distance ironique ou critique, et qui supposent un interlocuteur averti. Cette dimension dialogique est caractéristique de la culture de l’Âge d’Argent. L’accusation de plagiat, qui s’ajoute aux questions de paternité des textes, met en évidence leur dimension collective, vécue comme telle depuis longtemps, cette conception de l’échange verbal prenant peut-être ses racines dans le platonisme russe.
24Les citations souvent omises par Bakhtine (Vossler est dans le brouillon sur la satire ménippée, donc dans ce qui fait le lien le plus fort entre le Rabelais et le Dostoïevski, mais pas dans la version définitive…, indique I. Popova) sont révélatrices d’une certaine attitude vis-à-vis du mot d’autrui : appropriation, négligence ? Ou conviction profonde qu’une pensée ne peut avoir de possesseur ?
25Mais le plus étonnant peut-être, c’est de constater, particulièrement dans sa présentation de la psychanalyse (pour ce qu’on peut supposer être de lui), que Bakhtine, en montrant que les conflits entre conscient et inconscient ne sont que des « conflits entre différents langages », aboutit à l’idée « d’une domination totale de la société sur la conscience humaine » (M. Aucouturier). C’est là le plus troublant : il dépeint ce qui allait advenir. Est-ce « offrir des bases théoriques au totalitarisme ? » Ces penseurs qui ont énoncé les lois sur lesquelles se fonderait la tyrannie à venir étaient-ils fascinés par l’inéluctable ? Décidés, dans une sorte de délectation intellectuelle morose, à « … faire un paradigme scientifique d’un modèle social en gestation » qu’ils « subissaient comme une contrainte » ?
26On a montré les limites de Bakhtine — le réalisme auquel il n’échappe pas dans son étude sur Dostoïevski, et qui lui fait manquer le « symbolisme hermétique » dont témoignent tous les épisodes du « dérèglement carnavalesque » (Luis Beltran Almeria, Bakhtine et Dostoïevski). Mais on a indiqué aussi l’importance de l’œuvre de Bakhtine pour la narratologie — les nouvelles questions qu’il suscite, comme « la pluralité communicative dans la constitution de l’œuvre littéraire narrative » (Tomas Albaladejo, La pluralité communicative comme élément constituant de l’œuvre littéraire narrative : l’actualité de Mikhaïl Bakhtine).
27L’ensemble de ce travail séduit par l’acuité des problèmes posés, par la diversité du matériau. Il a aussi le mérite de faire surgir de nouvelles questions et d’ouvrir la voie à de nouvelles recherches.