Provocations satiriques éphémères anonymes
1En parcourant dans leur diversité les témoignages laissées par le xixe siècle, le lecteur attentif remarque à la longue l’existence de phénomènes collectifs ayant laissé eux-mêmes peu de traces directes, voire aucune, bien qu’ils aient manifestement occupé les esprits pendant un moment, limité mais intense. Ces phénomènes éphémères se caractérisent par la prolifération de gestes, motifs ou slogans au sein de la population, autour de thèmes renvoyant à des provocations satiriques. Aujourd’hui nous parlerions de « buzz » autour de « gimmicks » : ces termes sont sans doute anachroniques mais ils s’apparentent à ce que les contemporains qualifiaient de « modes » et de « scies ».
2Les proliférations en question se caractérisent par la rapidité de leur expansion, un remarquable pouvoir envahissant et la capacité à disparaître tout aussi rapidement, pour éventuellement resurgir à un autre moment. Elles s’expriment comme une sorte de fièvre collective s’emparant de la population. Elles ne sont pas nécessairement politiques, ni initiées à chaque fois par les mêmes maillons de la chaîne de diffusion, à laquelle contribuent les journalistes, les écrivains, les artistes, ainsi qu’une quantité indéterminée d’anonymes. Enfin, elles se différencient de la rumeur sur leur intention : il ne s’agit pas de révéler quoi que ce soit, le message propagé étant la plupart du temps léger, drôle, abscons même. Dans certains cas, il peut être compris comme politique mais ce sens échappe totalement à une grande partie de ceux qui le propagent. En effet, le moteur essentiel de ce phénomène réside davantage dans le fait d’y participer plutôt que dans le fond de sa signification. Et la participation prend des formes très diverses : graffitis, gestes, slogans criés ou chantés, déguisements, transformation d’objets (pièces de monnaie par exemple)… autant de moyens qui, n’étant pas destinés à durer, n’ont laissé de traces que dans les souvenirs. L’historien se trouve ainsi face à la difficulté de reconstituer ces processus de prolifération dont l’existence n’est évoquée qu’indirectement, par des témoignages portant généralement sur un autre sujet. Il s’agit donc, pour redonner corps à ces reflets fantomatiques de l’esprit d’une époque, d’élaborer une stratégie de reconstitution de l’éphémère, lequel peut se rencontrer à la convergence de faisceaux de natures très différentes éclairant chacun à sa façon le sujet. La présente contribution se propose d’exposer, à partir d’un cas précis, des pistes méthodologiques pour aborder ce genre d’objet d’étude.
Repérer la prolifération
3Les proliférations de provocations satiriques éphémères sont rarement identifiées comme telles par les contemporains, qui signalent au détour de leur propos leur existence, souvent avec agacement : leur futilité empêche d’y voir un phénomène digne d’intérêt en tant que tel. Elles sont l’écume d’un « état des esprits » plutôt déréglé par des faits plus graves, sur lesquels préfèrent s’étendre les témoignages dont nous disposons. La première difficulté consiste donc à repérer un mouvement de la nature qui nous intéresse, et d’une ampleur significative. Pour ce faire, il convient de choisir un point d’entrée suffisamment explicite, un témoignage qui en présente de manière claire la manifestation.
4À titre d’exemple, une caricature de Bouquet parue dans La Caricature met en scène des enfants griffonnant sur un mur. Ils sont interpellés par la propriétaire des lieux, furieuse, qui leur enjoint d’aller faire leurs « ordures » plus loin (ill. 1).
Ill. 1 : La Caricature, n° 115, 17 janvier 1833, pl. 248, dessin de Bouquet
5Ce dessin présente l’avantage de mettre en scène trois éléments essentiels du processus de prolifération tel qu’il s’offre aux regards à un moment donné de son développement :
6- un des modes de prolifération : la pratique des graffitis ;
7- un des vecteurs : les enfants, ces « gamins de Paris » qui peuplent les rues de la capitale ;
8- plusieurs motifs graphiques : la Poire (ill. 2), dix fois représentée, mais aussi un nom (Thierrat) (ill. 3), un slogan (« Crédeville voleur ») (ill. 4), un visage de profil avec un nez démesuré (ill. 5) et enfin, en rouge sous le volet, un signe géométrique composé d’une pointe se terminant en volute (ill. 6).
Ill. 2 à 6 : La Caricature, n° 115, 17 janvier 1833, pl. 248, par Bouquet, détails.
9La richesse de cette scène laisse entrevoir un phénomène d’une certaine ampleur, éphémère puisque fondé avant tout sur des gestes, exécutés eux-mêmes sur des supports et suivant des moyens n’étant pas destinés à durer, à propos de sujets conjoncturels dont la signification peut nous échapper de prime abord. Le témoignage lui-même, une caricature de presse, s’inscrit dans une pratique ayant un rapport à l’éphémère, aussi bien dans sa nature que dans son propos.
10Ce dessin semble donc constituer une entrée intéressante pour identifier et prendre la mesure d’un phénomène de prolifération de provocations satiriques. Il ne permet cependant pas d’en affirmer le caractère réel, ni l’ampleur, les caricatures ayant pour habitude de déformer et d’inventer pour atteindre leurs buts propres (critiquer et faire rire). Il convient donc, à partir de ce point de départ, d’étendre les recherches afin de confirmer l’existence de ce que celle-ci nous donne à voir.
Évaluer l’ampleur du phénomène
11Dans un premier mouvement, il s’agit de s’assurer qu’on se trouve bien en présence d’un phénomène réel d’une ampleur significative, et d’essayer d’en découvrir le ou les sens. Pour le cas qui nous occupe, il convient donc de chercher d’autres dessins du même fonds, en amont et en aval, de façon à en repérer les manifestations éventuelles. La lecture attentive de La Caricature et de son complément quotidien Le Charivari permet de relever plusieurs occurrences du même phénomène, ou d’une de ses parties, avant et après le dessin de Bouquet choisi comme point de départ de la recherche. La pratique des graffitis revient à plusieurs reprises, et les motifs identifiés plus haut apparaissent, seuls, associés entre eux ou avec d’autres, sur plusieurs représentations. Le « Crédeville voleur » apparaît dès juin 1831 sur un mur de slogans griffonnés que Louis-Philippe vêtu en maçon s’efforce d’effacer (ill. 7).
Ill. 7 : La Caricature, n° 35, 30 juin 1831, pl. 70, non signée.
12La Poire apparaît seule en septembre 1831 (ill. 8), puis associée au profil à gros nez, vraisemblablement tracée par des enfants (ill. 9).
Ill. 8 : La Caricature, n° 47, 22 septembre 1831, pl. 96, dessin d’A. de Rudder (détail).
Ill. 9 : La Caricature, n° 84, 7 juin 1832, pl. 168, dessin de Traviès (détail).
13Un gamin déguenillé trace plus tard des poires à côté d’un « Crédeville voleur » d’un profil à gros nez (ill. 10).
Ill. 10 : Le Charivari, 28 avril 1834, dessin de Traviès.
14Enfin, la Poire se distingue aux côtés de profils croqués, ce qui permet d’identifier le motif géométrique à volute comme un nez pointu, ici rattaché à son visage (ill. 11).
Ill. 11 : Le Charivari, 4 novembre 1834, dessin non signé (détail).
15Ce relevé, non exhaustif, donne à penser que cette prolifération par graffitis de motifs récurrents constitue bien un phénomène réel, relativement prolongé dans le temps. Pour s’en assurer, il est nécessaire de sortir de ce premier espace de recherche et de sonder au-delà, vers d’autres témoignages pouvant en confirmer l’existence.
16Cette démarche impose de se tourner sans a priori vers toutes sortes de sources, en tentant de remonter les fils au fur et à mesure qu’ils se précisent : presse, archives, mémoires, collections iconographiques, correspondances, manuscrits, etc. Il n’est pas envisageable de se focaliser sur un corpus, puisque cette prolifération éphémère n’a par nature pas laissé de traces elle-même. Il faut donc tenter d’en saisir la réalité en multipliant les regards portés sur elle. Ces indices supplémentaires permettent à la fois de confirmer l’existence du phénomène et d’en expliquer les significations.
Comprendre le sens & l’origine des motifs de prolifération
17Le travail d’approfondissement démontre rapidement que les motifs observés sur la caricature de Bouquet n’ont pas nécessairement de lien les uns avec les autres et qu’ils ont chacun leur propre histoire. Ce qui les relie reste avant tout ce qui en fait précisément un phénomène éphémère : une volonté ponctuelle (provoquer) et une pratique (le griffonnage des murs). Il est possible de reconstituer le parcours de chacun.
18Les motifs les plus anciens sont le profil à gros nez et le slogan « Crédeville voleur » (ill. 4 et 5). Ils ne sont pas liés l’un avec l’autre, si ce n’est par la simultanéité de leur apparition et leur association fréquente sur les murs. Le Figaro en témoigne dès 1828 dans un article intitulé « Crédeville et M. B***, ou la signature et le grotesque1 ». On y apprend que Crédeville serait un bagnard évadé narguant la police en signant ainsi les murs. Le profil à gros nez serait celui de Bouginier, un peintre susceptible moqué ainsi par ses camarades d’atelier. En réalité, les explications sur l’origine de ces motifs évoluent avec le temps, personne n’en connaissant véritablement les origines2. Mais l’essentiel reste leur capacité à couvrir les murs, portés par une sorte de frénésie populaire : « ce génie énorme qu'on appelle Paris, tout en transfigurant le monde par sa lumière, charbonne le nez de Bouginier au mur du temple de Thésée et écrit Crédeville voleur sur les pyramides » (Victor Hugo3). Cette prolifération de motifs sans signification semble avant tout portée par un geste et un désir de rire plus que par une motivation quelconque.
19Les autres motifs visibles sur la caricature de Bouquet composent un deuxième ensemble : ils ont une signification plus politique liée à la monarchie de Juillet et surgissent donc dans un second temps, à peu près simultanément. Ils n’ont cependant pas tous la même vigueur dans ce mouvement de prolifération. Le nom « Thierrat » (ill. 3) n’apparaît pas, à notre connaissance, dans d’autres sources ; sa signification reste donc obscure : on peut y voir la contraction « Thiers rat », le jeune ministre Adolphe Thiers étant une des cibles favorites du journal. Ce motif ne semble pas avoir donné lieu à une forte prolifération.
20Le motif géométrique rouge (ill. 6) correspond au « nez de d’Argout », ministre des beaux- arts et des travaux publics, un des adversaires principaux des caricaturistes qui voient en lui le promoteur de la censure renaissante. Ce second « nez » semble avoir eu une vie sur les murs lui aussi, moins riche néanmoins que celle de Bouginier. Le motif de la Poire (ill. 2), désignant le roi Louis-Philippe et par extension l’ensemble du régime, connaît pour sa part un véritable succès populaire et sort massivement des journaux pour aller envahir les murs4. Ces motifs apparaissent à partir de 1831 et profitent de la dynamique de prolifération initiée par Crédeville et Bouginier quelques années plus tôt. Pour beaucoup de contemporains, ils ne sont pas distingués :
Qui pourra dire les scènes innombrables du drame de Paris révolutionnaire ? Quel peintre saisira cette action toujours variée, cette décoration toujours changeante ? La rue tortueuse et sombre avec ses pignons et ses auvents du xive siècle ; la rue qu’on alligne [sic] aujourd’hui avec ses blanches murailles fleurdelisées de poires, salies du nez de d’Argout, du nom de Crédeville voleur […]5.
21La recherche de traces de ces motifs dans des sources diverses vient confirmer l’existence et la force de ce mouvement de prolifération, dans lequel ils mènent tour à tour une vie propre ou collective. Elle fait également apparaître des dimensions de ce mouvement que la caricature de départ ne permettait pas de saisir.
Varier les sources : trouver des traces de l’éphémère
22Chaque type de source peut apporter un éclairage spécifique sur le phénomène, ses pratiques, son ampleur. Les sources imprimées et manuscrites, mais aussi les objets doivent retenir l’attention. Les traces présentées ci-après portent essentiellement sur le motif de la Poire qui a connu un phénomène de prolifération particulièrement massif.
23Les archives départementales (série M Administration générale : lettres aux préfets, rapports de police sur les troubles à l’ordre public) et celles de la Préfecture de police de Paris (séries AA421 et AA423 : événements divers 1831-1836) révèlent des cas précis où les agents ont eu affaire à des provocateurs. À Auxerre, dans l’Yonne, un rapport de 1832 décrit des graffitis très proches de ceux visibles sur la caricature de Bouquet (ill. 12).
Ill. 12 : Archives départementales de l’Yonne, Auxerre, série III M1 113, événements locaux (1831-1833), pièce 29 (détail).
24La lecture de la presse vient confirmer les provocations et les démêlés de leurs auteurs avec les forces de l’ordre. La presse satirique bien entendu s’en fait l’écho, mais ce sont surtout les organes locaux et nationaux qui donnent le plus de corps à cette réalité. Ils révèlent notamment les différentes formes qu’elle peut prendre, au-delà des graffitis, formes tout autant éphémères comme les costumes du carnaval (ill. 13).
Ill. 13 : L’Ami de la Religion, supplément au n° 2223, 20 février 1834.
25Les œuvres littéraires, fictions ou mémoires, contribuent à compléter l’éventail des pratiques. Elles inscrivent par ailleurs ces provocations dans un contexte plus général, leur donnant un ancrage profond. Ainsi Stendhal présente-t-il son personnage Lucien Leuwen aux prises avec des enfants qui se moquent de lui en lui présentant « une poire, ou quelque autre emblème séditieux »6. Le manuscrit de l’auteur montre par ailleurs que le griffonnage de poires constituait également une sorte de récréation d’atelier, puisqu’il a lui-même pratiqué dans un style très proche de celui visible sur la caricature de Bouquet (ill. 13 et 14).
Ill. 14 et 14bis : Stendhal, manuscrit de Lucien Leuwen, bibliothèque de Grenoble, et détail.
Ill.15 : La Caricature, n° 115, déjà cité, détail.
26Enfin, certains objets peuvent venir compléter cette évaluation de l’ampleur et de la variété du phénomène. La Poire a donné lieu à de multiples réutilisations (pommeau de canne, jeu de massacre, pipe…)7. Elle est également venue détourner les symboles même du pouvoir politique en transposant les graffitis des murs sur les pièces de monnaie (ill. 16).
Ill. 16 : Pièce de cinq francs, monarchie de Juillet, collection particulière.
Replacer l’éphémère dans le temps long
27Le travail de recherche des traces s’accompagne d’une mise en perspective du phénomène à plusieurs niveaux. D’une part il permet de saisir que celui-ci s’inscrit dans des pratiques qui précèdent son existence, auxquelles il assure une forme de continuité, et que ces pratiques se poursuivent après lui sur d’autres motifs. D’autre part, il permet de mesurer les échos du phénomène tel qu’il se manifeste à un moment donné, c’est-à-dire les empreintes qu’il aura laissées dans les mémoires et dans les gestes.
28Les graffitis visibles sur la caricature de Bouquet choisie comme point de départ de cette étude appartiennent à une tradition remontant au moins au xviiie siècle8. Aux Archives nationales, le fonds « écrits et objets séditieux (Restauration) » (F7 6704 à F7 6706) confirme l’existence de pratiques provocatrices se déployant autour de motifs et d’objets très divers (placards, graffitis, pièces de monnaie grattées, etc.). Le carton conserve même une trace étonnante de l’éphémère : il a contenu jusqu’en 1899 un pain d’épice séditieux dont la silhouette s’est imprimée sur le papier. Le pain en question représentait Charles X en jésuite, une mise en scène satirique qui se diffusait aussi par le grattage des pièces de monnaie, comme ce sera le cas sous Louis-Philippe9. Ainsi cette diversité des pratiques s’est éprouvée sur d’autres motifs avant de s’attacher à ceux représentés par Bouquet. De même, elle se poursuit au-delà, quand la mode est passée, sur d’autres cibles. À partir de 1835, un nouveau slogan surgit, « Feu Duponchel ! » :
Vers 1835 et 1836, des cabrions restés inconnus avaient couvert les murs de Paris, de la France et même de l’étranger de cette légende cabalistique : Crédeville voleur, et leurs amis, non des peintres, mais bien des hommes de science, de lettres, d’État, du barreau et du monde renouvelèrent la charge et prirent un autre nom pour plastron. Leur victime fut M. Duponchel. Partout où surgissait un mur, on vit apparaître, comme au festin de Balthazar, cette inscription tumulaire : Feu Duponchel ! Il y avait des feu Duponchel écrits avec des lettres énormes, jaunes, blanches, rouges, jusqu’au sommet des édifices les plus élevés. Crédeville voleur avait baissé pavillon devant feu Duponchel10.
29Dans la deuxième moitié du siècle, on écrit sur les murs ou on crie dans les lieux publics « Galimard mythe » (ou sa variante « Galimard pou mystique »)11, « Bonino, crétin »12, « Durançon a le sac »13, « Dupoty ! »14, « Barbey d’Aurévilly, idiot »15, « Ohé Lambert ! » et « As-tu vu Lambert ? »16 puis « As-tu vu Godineau ? »17, etc. Toutes ces « scies » participent d’un même processus de prolifération au cours duquel Crédeville ou la Poire n’ont été que des étapes éphémères.
30Certaines de ces étapes laissent néanmoins dans les esprits un souvenir persistant. La Poire surgit à nouveau dans les caricatures et vraisemblablement sur les murs en 1848 et 1871, quand Louis-Philippe est chassé et quand son ancien ministre Thiers devenu chef de l’Exécutif réprime la Commune (ill. 17 et 18).
Ill. 17 : caricature non signée, feuille volante, Deshayes éditeur, 1848.
Ill. 18 : « Manteau impérial, manteau royal… », dessin de Fréville, 1871, Musée d’art et d’histoire de Saint-Denis.
31Il arrive enfin que des farceurs s’amusent à graver dans la pierre des motifs périssables, de façon à porter à la postérité ce geste de provocation comique, comme un détail discret mais révélateur de l’esprit d’une époque. Ainsi l’architecte de la maison égyptienne de la place du Caire à Paris a-t-il intégré à sa frise une tête de Bouginier, dont la signification échappe sans doute aux passants d’aujourd’hui, mais qui demeure, tel le marqueur de l’éphémère de son temps (ill. 19 et 20).
Ill. 19 : Vue photographique de la maison égyptienne de la place du Caire (Paris, IIe arrondissement)
Ill. 20 : détail de la frise de la maison égyptienne de la place du Caire (Paris, IIe arrondissement)
Conclusion
32Les phénomènes de provocations satiriques éphémères anonymes se présentent donc comme la mise à l’unisson de l’esprit public à un moment et autour de thèmes précis. Leur intérêt réside sans doute moins dans ce qu’ils diffusent, les messages étant la plupart du temps insignifiants ou incompris par ceux qui les véhiculent, que par le processus qu’ils génèrent. Une remarquable quantité d’énergie s’y trouve dépensée, sans commune mesure avec leur absence assumée de résultats. Là réside sans doute leur caractère pleinement éphémère, comme une combustion génère de la chaleur tout en faisant disparaître l’objet qui la produit. Ils ne laissent guère de traces sensibles, mais un souvenir multiforme et discret qui peut venir éclairer la connaissance des ressorts d’une époque.