Le médiévalisme au Québec. Études, représentations et usages du Moyen Âge dans la société québécoise (Québec)
Le colloque « Le médiévalisme au Québec : études, représentations et usages du Moyen Âge dans la société québécoise » réunira près d’une quarantaine de chercheurs et chercheuses du Québec et d’ailleurs pour explorer la réception et l’actualisation du Moyen Âge dans la société québécoise. Il a pour objectif de repérer et d’identifier les caractères originaux du médiévalisme québécois, à la fois pour comprendre les logiques sociales qui président à leur existence et pour tenter de mettre au jour des mouvements de fond de la culture et de la société québécoises.
Cet événement est ouvert à toutes les disciplines (histoire, littérature, histoire de l’art, philosophie, architecture, etc.) par lesquelles on peut appréhender la réception matérielle (collections muséales, fonds archivistiques, paysage seigneurial, architecture néogothique) et idéelle (discours littéraire, politique, religieux) du passé médiéval au Québec et au Canada français depuis 1867.
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Au premier abord, tout semble séparer la culture québécoise de celle du Moyen Âge, essentiellement dans la mesure où le Québec, « société neuve » (Bouchard, 2000), apparaît par définition comme un espace géographique exclu de la période médiévale, que la fragmentation conventionnelle de l’histoire fait habituellement se terminer avec la « découverte » des Amériques. Or ce découpage – par ailleurs contesté de plusieurs façons (Le Goff, 2004; Baschet, 2006) – tend à dissimuler certaines réalités pourtant incontestables : la basilique Notre-Dame de Montréal arbore un vocabulaire architectural inspiré du gothique français, les principales bibliothèques universitaires du Québec conservent des dizaines de livres d’heures et autres manuscrits médiévaux, et l’imaginaire médiéval imprègne autant la vie intellectuelle et religieuse que les productions littéraires québécoises, à un point tel qu’on en trouve des traces dans des œuvres aussi diverses que celles de Réjean Ducharme et de Bryan Perro. Contre toute attente, le Québec se présente comme une terre fertile de médiévalisme, que l’on peut définir comme « la réception du Moyen Âge aux siècles ultérieurs » (Ferré, 2010), sa persistance dans la culture occidentale.
Le colloque « Le médiévalisme au Québec : études, représentations et usages du Moyen Âge dans la société québécoise » (Québec, 6, 7 et 8 février 2025) sera l’occasion d’explorer cette persistance, à travers l’étude des manifestations, matérielles et idéelles, du Moyen Âge dans la société et la culture québécoises. Le cas québécois est à cet égard particulièrement intéressant, en raison du positionnement distinctif du Québec, analogue à celui du Canada anglais (Brush, 2010), dont le double héritage médiéval, anglais et français (Toswell et Czarnowus, 2020), a alimenté un médiévalisme riche et multiple, déployé dans un nombre considérable de domaines (architectural, politique, littéraire, audiovisuel, idéologique, religieux, etc.). Pourtant, en dépit de travaux pionniers (Gingras, 2016; Moran, 2016; Guyot, 2015; Livernois, 2012; Dunn-Lardeau, 1999; Angers, 1995) et d’un colloque tenu en 2015, prometteur d’un chantier à ouvrir1, le médiévalisme québécois reste un objet à penser dans toute sa complexité, et dans une perspective qui transcende les spécialités académiques. Cet événement se veut ainsi un espace de discussion interdisciplinaire, pour appréhender les manifestations du Moyen Âge au Québec dans toute leur diversité d’expression. Il s’agira plus spécifiquement de repérer ces manifestations et d’identifier les caractères originaux du médiévalisme québécois, mais aussi d’interroger les logiques sociales qui président à leur existence et qui gouvernent leur modalité d’incarnation. L’objectif général est d’aller au-delà des conclusions généralement formulées à propos de la récupération du Moyen Âge (à savoir que celui- ci nourrit une vision ambivalente, tantôt positive, tantôt négative), pour potentiellement révéler, par le médiévalisme, des mouvements de fond de la culture et de la société québécoises.
Pour ce faire, il conviendra de s’intéresser tant aux manifestations matérielles qu’idéelles du Moyen Âge au Québec. Les « manifestations matérielles » renvoient ici à l’héritage direct du Moyen Âge, ce qui recoupe les présences effectives du Moyen Âge au Québec (dans les archives, les collections muséales et l’architecture, par exemple), mais également les continuités structurelles (la permanence, sur le territoire québécois, de certaines des structures politiques, culturelles et religieuses de la période médiévales). Les « manifestations idéelles » renvoient quant à elles à l’imaginaire médiéval (la manière dont les fictions du Moyen Âge nourrissent nos productions culturelles et artistiques), mais aussi au Moyen Âge imaginaire (à savoir la façon dont la vision plurielle que l’on se fait de cette période investit les discours politiques, les récits littéraires et l’histoire intellectuelle).
Programme
Jeudi, 6 février 2025
13h00–13h30 : Accueil des participants et participantes et mot de bienvenue
13h30–15h00 : Continuités religieuses : de l’art à la doctrine
Présidence : À venir
- Hugues Dupuis (U. Laval) : « Les gisants de Mgr François de Laval : œuvres modernes empreintes de tradition »
- Vincent Perras (U. de Montréal) : « De la Chrétienté à la Ligue des Nations : références au Moyen-Âge dans la doctrine sociale de l’Église catholique »
- Thomas Quintal (UQAC) : « Héritage de l’architecture gothique au Québec : le cas de l’église Saint-Édouard »
15h15–16h45 : Mémoires des noms
Présidence : À venir
- Rosalie Grimard-Mongrain (U. de Montréal / U. Paris 8 Vincennes-Saint-Denis) : « La mémoire des noms : regards croisés sur des archives du Moyen Âge et du Québec du XIXe siècle »
- Louise Lainesse (U. de Montréal) : « Communautés d’endeuillés, communautés imaginées? La mémoire des noms (Moyen Âge et XIXe siècle québécois) »
- James Couture (U. de Montréal / U. Paris 8 Vincennes-Saint-Denis) et Joseph George Akl (U. de Montréal) : « Des saint·e·s à perte de vue : analyse des hagiotoponymes médiévaux des municipalités du Québec »
17h00–18h30 : Conférence inaugurale de Francis Gingras (U. de Montréal)
18h30–20h00 : Cocktail de bienvenue
Vendredi, 7 février 2025
9h00–10h30 : Chevaux et chevaliers, d’un médium à l’autre
Présidence : À venir
- Adrien Savard-Arseneault (U. de Montréal) : « La vertu chevaleresque comme idéal dans L’avalée des avalées et Le nez qui voque »
- Benoît Bouzigues (U. de Montréal) : « Les représentations médiévalistes des chevaux dans les contes et légendes québécoises : du bestiaire médiéval à l’héritage du cheval-fée Bayart »
- Elsa Guyot (chercheuse indépendante) : « Un chevalier médiéval dans le dessin de presse à Montréal : étude de deux caricatures de l’artiste John Collins »
10h45–12h15 : « Faire médiéval » : résurgence par l’esthétique
Présidence : À venir
- Christelle Chaillou (CNRS/CESCM de Poitiers) : « Se réapproprier la musique médiévale : le cas du “Salon de la passion médiévale” de Montréal »
- Brenda Dunn-Lardeau (UQAM) : « Les voies de la résurgence du Moyen Age dans un incunable de 1478 de Celse, enluminé au XXe siècle et conservé à la bibliothèque Osler de McGill »
- Helena Kogen (UQAM) : « Retour aux sources : l’Historia naturalis de Pline (Venise, 1472), William Morris et l’esthétique du mouvement Arts and Crafts au Québec »
13h30–15h00 : Conférence plénière de Vincent Ferré (Sorbonne Nouvelle) : « Si loin, si proche : pourquoi le Moyen Âge? »
15h15–16h45 : Représenter et se représenter le Moyen Âge
Présidence : À venir
- Michaël Blais (U. de Montréal) : « Représentations du Moyen Âge dans les romans québécois contemporains : Dominique Fortier, Jean Marcel, Paul Zumthor »
- Marie Raulier (Basel Universität) : « L’insaisissable Moyen Âge de Saint-Denys Garneau »
- Isabelle Arseneau (U. McGill) : « Nous vivons une espèce de XVe siècle : correspondances entre Jacques Brault et le Père Lacroix (1992-2009) »
17h00 : Visite des archives des Augustines
Samedi, 8 février 2025
9h15–10h15 : Le Moyen Âge dans le système scolaire québécois, d’hier à aujourd’hui
Présidence : À venir
- Johanne Charest (Cégep de Sept-Îles) : « Les traces du Moyen âge dans la production littéraire d’écrivains issus du cours classique »
- Kim Labelle (U. Laval / Cégep Garneau) : « Pour un nouveau souffle du Moyen Âge : réflexions sur l’enseignement de la littérature médiévale au collégial »
10h30–12h00 : Le Québec au miroir du Moyen Âge (1/2)
Présidence : À venir
- Kouky Fianu (U. d’Ottawa) et Bertrand Labasse (U. d’Ottawa) : « Un Moyen Âge venu de loin : réception et représentation du Moyen Âge dans la presse franco-canadienne »
- Olivier Guimond (U. d’Ottawa) : « Une “communauté médiévale” dans la modernité. Le Canada français de Burton LeDoux »
- Michel Hébert (UQAM) : « La figure de Jeanne d’Arc au Canada français (1860-1940) : la catholique, l’héroïne, la sainte »
13h15–14h45 : Le Québec au miroir du Moyen Âge (2/2)
Présidence : À venir
- Christian Jaouich (Ministère du Conseil exécutif) : « “Notre société redevenue de type mérovingien” : usages et références au Moyen Âge dans la revue Cité libre (1950-1966) »
- Jonathan Livernois (U. Laval) : « Vivre notre “Moyen Âge avant notre antiquité” : réflexions à partir d’une idée de Jacques Brault »
- Raphaëlle Décloître (U. Laval / Collège Marianopolis) et Madeline Tessier (U. McGill) : « Être femme pendant le “moyen-âge québécois” : le médiévalisme comme mise à mal du patriarcat dans quelques textes féministes (1970-80) »
15h00–16h30 : Une contre-culture médiévalisante
Présidence : À venir
- Olivier Séguin-Brault (UQAR / U. de Tours) et Ludovic Massy-Raoult (U. Laval) : « “Villon voyage” : itinéraires du corpus villonien au Québec »
- Julien Vallières (U. McGill) : « “En la docte et sapiente et son quartier” : appropriation de la référence médiévale dans trois périodiques du Quartier latin de Montréal (1914-1917) »
- Guillaume Bellehumeur (U. McGill / Collège Montmorency) : « De l’alchimie du vers d’Yves-Gabriel Brunet à la fatigue culturelle de Jeanne d’Arc : l’utilisation de l’imaginaire médiéval dans la contre-culture québécoise »
16h45–17h30 : Remarques de conclusion : Louise Bienvenue (U. de Sherbrooke), Gordon Blennemann (U. de Montréal), Isabelle Cochelin (U. de Toronto) et Elsa Guyot (chercheuse indépendante)