Éditer la poésie, XIXe–XXIe s. Histoire, acteurs, modes de création et de circulation. Avec Mireille Calle-Gruber & Esther Tellermann (Sorbonne Nouvelle & en ligne)
Séance 2, 16h-19h
Mireille Calle-Gruber, « Les déménagements éditoriaux de Michel Butor. Des Œuvres complètes aux Cahiers Butor »
Entreprendre d’éditer des Œuvres complètes, quelles qu’elles soient, n’est-ce pas geste dont l’ambition toujours est vouée à incomplétude ? Cette visée totalisante n’est-elle pas toujours différée et promise à inachèvement ? Constat d’autant plus évident lorsqu’il s’agit de l’Œuvre-Butor : œuvre immensurable, non seulement par sa masse mais aussi par la singulière diversité de ses formes poïétiques peu orthodoxes et les méthodes d’une écriture littéraire qui n’aura cessé de déménager.
Je commencerai par étudier comment j’ai élaboré l’édition des Œuvres complètes de Michel Butor avec la collaboration active de l’écrivain – situation exceptionnelle et fort éclairante quant à la créativité du geste éditorial en littérature. En suite de quoi, je présenterai, à partir du constat d’« Œuvres complètes incomplètes », le projet en cours des « Œuvres complémentaires » de Michel Butor.
Mireille Calle-Gruber, écrivain et professeur émérite à la Sorbonne Nouvelle où elle dirige le programme de recherches « Michel Butor, Qu’est-ce qu’une œuvre ? Des œuvres complètes aux cahiers », et, avec Hélène Campaignolle, le projet « Poétique de l’archive Claude Simon » (UMR THALIM) ainsi que la collection « Archives » aux Presses Sorbonne Nouvelle, a publié une cinquantaine d’ouvrages personnels et collectifs, dont, parmi les plus récents, Marguerite Duras, la noblesse de la banalité (de L’incidence, 2024), Claude Simon, être peintre (Hermann, 2021), et avec Pascal Quignard, Morphogenèse. L’origine ne cesse pas (Hermann, 2023). Concernant Michel Butor, outre de nombreuses conférences, colloques et entretiens avec l’auteur, avec qui elle a voyagé en Allemagne, en Suisse, en Grèce, au Japon, au Canada, aux Etats-Unis, au Brésil, Mireille Calle-Gruber a publié les Œuvres complètes de Michel Butor en 12 volumes aux éditions La Différence (2006-2010) et ils ont écrit ensemble un récit-scénario de film Le Chevalier morose (Hermann, 2017). Elle a fait paraître un album posthume des œuvres photographiques commencé ensemble : Michel Butor, Au temps du noir et blanc, Delpire, 2017, et dirige à présent la série des Cahiers Butor, réalisant le projet fait avec Michel Butor.
Mireille Calle-Gruber a reçu en 2022 le doctorat honoris causa de l’Université Aristote de Thessalonique, distinction que Michel Butor avait reçue en 2000.
On peut lire :
Michel Butor, Déménagements de la littérature, PSN, 2008 (actes du colloque sous la direction de M.C-G)
Michel Butor, Au temps du noir et blanc, Delpire, 2017.
Cahier Butor, Compagnonnages de Michel Butor, Hermann, 2019 (direction. M.C-G, Jean-Paul Morin, Adèle Godefroy)
Cahier Butor 2, Michel Butor et les peintres, Hermann, 2022 (direction M.C-G et Patrick Suter)
Cahier Butor 3, Michel Butor en musique, HDiffusion, 2024 (direction M.C-G et Marion Coste).
Les Cartes postales de Michel Butor, éditions du Canoë, 2024 (direction, Pauline Basso et Adèle Godefroy avec la collaboration d’Anne Reverseau ; préface M.C-G.).
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Esther Tellermann, « Éditer : faire commerce de l’impossible ? », entretien avec Serge Linarès
Esther Tellermann est née en 1947 à Paris. Ancienne élève de l’École normale supérieure de Lyon, Agrégée de lettres modernes, elle exerce actuellement la psychanalyse.
Grand prix de l’Académie Française pour son premier livre Première apparition avec épaisseur en 1986, sa poésie s’attache à rendre compte d’un lyrisme intime du monde. Organisée en suites de chants posés entre le murmure et la symphonie, entre les symboles et la réalité arrachée, son œuvre mêle destinée personnelle et portée universelle et s’attache à dépasser dans le mythe les répétitions tragiques de l’histoire, dans une tension vers une impossible consolation.
Elle a publié une vingtaine de livres de poésie, principalement aux éditions Flammarion, et aux éditions Unes, ainsi que deux récits, Une odeur humaine (Farrago/Léo Scheer, 2006), Première version du monde (Unes, 2019), et un essai Nous ne sommes jamais assez poète (La Lettre volée, 2014).
Deux autres essais vont paraître en 2025. Elle est présente dans l’Anthologie de la poésie française du XVIIe au XXe siècle(Gallimard, « Bibliothèque de la Pléiade », 2000), elle a également obtenu le prix François Coppée de l’Académie française pour Guerre extrême en 2000, et le prix Max Jacob en 2016 pour Sous votre nom, ainsi que le prix Louise Labé pour Votre écorce. Signalons une première monographie de son œuvre écrite par Aaron Prevots Esther Tellermann : Énigme, prière, identité, (Brill, Rodopi, 2022).
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Serge Linarès est professeur de littérature française des XXe et XXIe siècles à l’Université Sorbonne Nouvelle. Ses recherches portent, pour l’essentiel, sur la poésie et les relations interartiales. Entre autres publications, il est l’auteur de Picasso et les écrivains (Citadelles & Mazenod, 2013) et de Poésie en partage. Sur Pierre Reverdy et André du Bouchet(L’Herne, 2018). Il a récemment co-édité trois ouvrages collectifs : La Critique d’art des poètes (avec Corinne Bayle et Philippe Kaenel, Kimé, 2022), Éditer en poète (avec Isabelle Diu, 2024), ainsi que le numéro d’avril 2024 de la revue Europe(avec Anne-Christine Royère) consacré à Anne-Marie Albiach.
Pour suivre la séance en ligne, écrire à: serge.linares@sorbonne-nouvelle.fr