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Regards croisés sur la question de l'égalité femmes-hommes au Maroc et ailleurs (Casablanca)

Regards croisés sur la question de l'égalité femmes-hommes au Maroc et ailleurs (Casablanca)

Publié le par Marc Escola (Source : Hind Aassouli)

La Faculté des Lettres et des Sciences Humaines Aïn Chock, l’Université Hassan II de Casablanca,

 le Laboratoire de recherche Genre, Éducation, Littérature et Médias et le Master Genre, Sociétés et Cultures organisent un

Colloque international :

Regards croisés sur la question de l'égalité femmes-hommes au Maroc et ailleurs

Les 22 et 23 mai 2025

La question de l’égalité entre les femmes et les hommes demeure un enjeu crucial dans les débats sociétaux, juridiques et académiques contemporains, à la croisée des aspirations universelles et des spécificités culturelles. Complexe à plus d’un titre, l’égalité persiste à faire l’objet de débats innombrables, houleux et multiformes dès qu’il s’agit de celle des femmes et des hommes. L’égalité, définie comme « l’égalité des droits, des responsabilités et des opportunités pour les femmes, les hommes, les filles et les garçons » (ONU Femmes, 2021), ne constitue pas une problématique exclusivement féminine, mais une question de société qui concerne et engage aussi bien les hommes que les femmes.

Le concept d’égalité de genre s’est construit au fil des siècles à travers des réflexions philosophiques, politiques et sociales. En Occident, des philosophes comme Mary Wollstonecraft, avec son ouvrage A Vindication of the Rights of Woman : With Strictures on Political and Moral Subjects (1792), ont plaidé pour une égalité des droits entre les sexes. Le XXe siècle a vu des avancées majeures grâce à des théoriciennes comme Simone de Beauvoir (Le Deuxième Sexe, 1949), qui a analysé les fondements patriarcaux des rôles genrés, et des militantes comme Betty Friedan (The Feminine Mystique, 1963), qui ont remis en question les normes sociétales oppressives. Plus récemment, le féminisme intersectionnel, porté par la professeure Kimberlé Crenshaw, a souligné l’interconnexion entre genre, race et classe dans les dynamiques de discrimination. Ces débats occidentaux, bien qu’ancrés dans des contextes spécifiques, ont inspiré des mouvements féministes à l’échelle mondiale.

Au Maroc, le débat sur l’égalité hommes-femmes s’inscrit dans un contexte marqué par des avancées législatives et des défis persistants. L’adoption du Code de la famille en 2004 et l’inscription de l’égalité des sexes dans la Constitution de 2011 illustrent la volonté de renforcer les droits des femmes. L’article 19 de cette Constitution stipule que « L’homme et la femme jouissent, à égalité, des droits et libertés à caractère civil, politique, économique, social, culturel et environnemental ». Ces initiatives s’inscrivent dans les engagements internationaux du Maroc, notamment l’Agenda 2030 pour le développement durable, dont le cinquième objectif vise à promouvoir l’égalité des sexes, à autonomiser les femmes et les filles, et à éliminer toutes les formes de discrimination et de violence à leur égard.

Cependant, la mise en œuvre de ces engagements se heurte encore à des normes socioculturelles, des stéréotypes de genre profondément ancrés et des inégalités structurelles. Ces problématiques ne sont pas isolées et trouvent des résonances dans d’autres pays, où les contextes locaux influencent les luttes pour l’égalité tout en partageant des enjeux globaux. En effet, comme en témoignent les nombreux rapports internationaux, les inégalités de genre persistent à l'échelle mondiale. Ces disparités affectent divers secteurs, notamment la politique, l’économie, la santé, et le domaine social.

Selon le Rapport analytique Africa Gender Index 2023 publié en novembre 2024 par la Banque africaine de développement et la Commission économique des Nations unies pour l'Afrique, les femmes en Afrique atteignent un score global de 50,3 % en matière d’égalité dans les domaines économique, social et de la représentation publique, une légère progression par rapport à 48 % en 2019. Dans le domaine social, les femmes se rapprochent de la parité avec un score de 98,3 %, notamment grâce à une meilleure accessibilité à l’éducation et à la santé, les filles dépassant désormais les garçons en termes de taux de diplomation dans les différents cycles scolaires. Néanmoins, les inégalités persistent dans la représentation publique, où les femmes n’occupent que 24,4 % des postes en 2023, malgré une légère amélioration (+1,5 %). Elles restent sous-représentées dans les parlements, les gouvernements et les instances dirigeantes du secteur privé. Sur le plan économique, la parité a reculé, passant de 61 % en 2019 à 58,2 % en 2023. Les femmes ont été plus durement touchées que les hommes par les revers économiques durant cette période.

En 2024, les propositions de réforme portant sur le Code de la famille marocain (Moudawana), ont une fois de plus suscité les débats. Ces modifications, visant à renforcer les droits des femmes, portaient sur des aspects centraux tels que l’égalité dans la tutelle légale des enfants, l’élimination des exceptions autorisant le mariage des mineures, et une révision des lois concernant l’héritage. Ces changements proposés ont cependant ravivé de profondes divisions au sein de la société marocaine. D’un côté, les défenseurs des droits des femmes ont salué ces réformes comme un alignement nécessaire sur les principes universels des droits humains et les engagements internationaux du Maroc. De l’autre, des groupes conservateurs ont exprimé de fortes réserves, affirmant que certaines des propositions allaient à l’encontre des principes religieux et des normes culturelles enracinées.

L’enquête publiée en 2024 par le Haut-Commissariat au Plan (HCP), intitulée « Que pensent les Marocains de l’égalité hommes-femmes ? », offre un éclairage sur ces dynamiques. Selon le rapport, la perception de l’égalité entre les sexes varie selon l’âge. Les jeunes de 18 à 29 ans sont les plus critiques, 63,6 % estimant qu’il n’y a pas d’égalité de genre. Ce pourcentage diminue avec l’âge : 56,1 % chez les 30-59 ans et 54,9 % chez les 60 ans et plus. Les jeunes, influencés par l’évolution des normes sociales, une éducation plus ouverte et une sensibilisation accrue, tendent à remettre en question les inégalités de genre. À l’inverse, les générations plus âgées, socialisées dans un contexte de rôles de genre traditionnels, perçoivent souvent les avancées récentes comme suffisantes. Ces résultats soulignent que, malgré les avancées juridiques, les normes socioculturelles continuent de constituer un frein majeur à une égalité véritablement effective.

Dans ce cadre, le colloque "Regards croisés sur la question de l’égalité femmes-hommes au Maroc et ailleurs" propose d’explorer les dynamiques de l’égalité des sexes à travers une approche comparative et pluridisciplinaire. Trois grands questionnements structurent les débats et les contributions. Premièrement, quels sont les obstacles structurels, socioculturels et politiques à l’égalité femmes-hommes, et comment les lois, les politiques publiques, ainsi que les stratégies de prévention et de sanction des violences peuvent-ils transformer les rapports de genre malgré ces freins ?  Deuxièmement, quel rôle jouent les médias, la littérature, les discours religieux ou politiques dans la construction des stéréotypes genrés et des perceptions de l’égalité, et comment ces représentations influencent-elles les normes sociales et culturelles ? Enfin, quelles stratégies et quels leviers permettent de favoriser l’autonomisation des femmes, leur participation dans l’économie et la société, tout en tenant compte des intersections avec d’autres formes d’exclusion comme la classe, l’âge ou l’ethnicité, et quel est l’impact global de ces inégalités sur le développement économique et social ?

Nous invitons les chercheuses et chercheurs de toutes disciplines (sciences sociales, humaines, juridiques, etc.) à soumettre des propositions de communication qui s’inscrivent dans les axes thématiques suivants :

Axe 1 : Politiques publiques et législations sur l’égalité de genre

Axe 2 : Discours, représentations et égalité de genre

Axe 3 : Éducation, jeunesse et transformations sociales

Axe 4 : Participation économique et leadership féminin

Axe 5 : Résistances, militantismes et égalité

Axe 6 : Égalité, intersectionnalité et diversité des expériences

L’exploration des enjeux liés à l’égalité femmes-hommes dans divers contextes nationaux et internationaux vise à mettre en évidence les progrès réalisés, les résistances rencontrées et les perspectives d’amélioration dans divers domaines (politique, économique, social, culturel et éducatif). L’approche croisée proposée par ce colloque repose sur une volonté de dialogue entre disciplines (sociologie, anthropologie, histoire, littérature, droit, économie, études médiatiques, etc.) et entre acteurs (universitaires, praticiens, activistes, représentants institutionnels). En croisant les regards académiques, institutionnels et militants, cet événement cherche à offrir une plateforme de dialogue pour analyser les défis spécifiques à chaque pays, contribuer à une meilleure compréhension des mécanismes d’inégalités de genre et de réfléchir à des stratégies novatrices pour les réduire. Enfin, il vise à diffuser et valoriser les recherches académiques et les initiatives locales innovantes en faveur de l’égalité des sexes.

Modalités de soumission

Les propositions de communication (titre, résumé de 300 à 500 mots, accompagné de 5 mots-clés et d’une brève biographie) doivent être envoyées en format Word avant le 02 mars 2025 à l’adresse suivante : colloque.egalite2025@gmail.com">colloque.egalite2025@gmail.com

Les auteurs et autrices des propositions retenues seront informés avant le 10 mars 2025. Les communications pourront être présentées en français, en arabe ou en anglais.

Les articles définitifs devront être soumis pour publication à l'issue du colloque, au plus tard le 30 juin 2025.

Calendrier 

-       Date limite d’envoi des résumés de communications : 02 mars 2025

-       Date limite de réponse du comité scientifique : 10 mars 2025

-       Dates du colloque : 22 et 23 mai 2025 

-       Lieu du colloque : Faculté des Lettres et des Sciences Humaines Ain Chock, Casablanca, Maroc.

Bibliographie indicative

AfDB, ECA (2024). Africa gender index 2023 analytical report: African women in times of crisis. 

Banque mondiale (2024). Croissance au Moyen-Orient et en Afrique Nord. https://openknowledge.worldbank.org/server/api/core/bitstreams/8e209285-50df-421b-b7cb-ce59c46ca1a1/content

Bereni L., Chauvin S., Jaunait A. et Revillard A. (2008). Introduction aux gender studies, Manuel des études sur le genre. De Boeck.

Conseil National des Droits de l’Homme (2015). État de l’égalité et de la parité au Maroc : préserver et rendre effectifs les objectifs constitutionnels, Rabat.

Forum économique mondial (2021). Rapport mondial sur l’écart entre les hommes et les femmes 2021 : Insight Report. Genève, Suisse. https://www3.weforum. org/docs/WEF_GGGR_2021.pdf

Gillot, G. & Nadifi, R. (Dir.) (2018). La marche vers l’émancipation : travail et éducation des femmes au Maroc, Casablanca : Afrique Orient.

Goffman E. (2002). L’arrangement des sexes, La dispute. Le genre du monde, (1977 pour l’édition américaine originale).

HCP (2021). La femme marocaine en chiffre, 20 ans de progrès.

HCP (2024). Que pensent les marocains de l'égalité hommes-femmes ? Les Brefs du Plan.

MSFEDS (2018). Plan Gouvernemental pour l’Egalité ICRAM 2, 2017-2021, Rabat :AZ Editions.

Nathalie Bernard-Maugiron (2021). « L’autonomisation économique des femmes dans la région Moyen-Orient et Afrique du Nord », Cahiers d’études africaines, mis en ligne le 02 janvier 2024. DOI : https://doi.org/10.4000/etudesafricaines.34479

Nations Unies (2008). Le rôle des hommes et des garçons dans l’égalité des sexes, Division de la promotion de la femme. https://www.un.org/fr/gender-equality/index.html

OCDE (2017). L’autonomisation économique des femmes dans la région MENA : L’impact des cadres juridiques algérien, égyptien, jordanien, libyen, marocain et tunisien, Paris, Éditions OCDE « Compétitivité et développement du secteur privé ».

OCDE/OIT/CAWTAR (2020). Changer les lois et éliminer les obstacles à l’autonomisation économique des femmes : Égypte, Jordanie, Maroc et Tunisie, Compétitivité et développement du secteur privé, Éditions OCDE, Paris https://doi.org/10.1787/af7f3846-fr

OECD (2023). Joining Forces for Gender Equality: What is Holding us Back?, OECD Publishing, Paris, https://doi.org/10.1787/67d48024-en.

ONU Femmes (2020). « From insights to action: Gender equality in the wake of COVID-19 », https://reliefweb.int/report/world/insights-action-gender-equality-wake-covid-19.

ONU Femmes (2022). Manuel sur l’intégration de la dimension de genre pour des résultats en matière d’égalité des sexes. https://www.unwomen. org/sites/default/files/2022-02/Handbook-on-gender-mainstreaming-for-gender-equality-results-en.pdf

Sabbar Mbarka. (2021). « L’égalité des genres et l’éducation au Maroc : état des lieux et perspectives ».  Revue de l’administration de l’éducation, n°10.

Coordinatrice du colloque 

Hind AASSOULI, Professeure habilitée à la FLSHAC

Comité d’organisation

-       BRAKSA Abdelilah, Doyen de la Faculté des Lettres et des Sciences Humaines Aïn Chock

-       HABIBI Hassan, Directeur du Laboratoire GELM

-       AASSOULI Hind, (Université Hassan II de Casablanca, FLSHAC) 

-       TAMIM Adil, (Université Hassan II de Casablanca, FLSHAC)

-       AMRAOUI SAIDI Mouhcine, (Université Hassan II de Casablanca, FLSHAC) 

-       Doctorant(e)s du GELM

-       Etudiant(e)s du MGSC

Comité scientifique 

-       AASSOULI Hind, (Université Hassan II de Casablanca, FLSHAC)

-       AMRAOUI SAIDI Mouhcine (Université Hassan II de Casablanca, FLSHAC) 

-       BABA Khalil, (Université Mohammed 1er, Oujda, Faculté des Sciences)

-       Băluță Ionela (Université de Bucarest)

-       BELABBES Fatiha (Université Hassan II de Casablanca, FLSHAC) 

-       Ben Salem Maryam (Université de Carthage) 

-       BENNIS BENNANI Yasmine (Université Hassan II de Casablanca, FSJES Aïn Chock) 

-       BOUSBAA Amal (Université Hassan II de Casablanca, FLSHAC)

-       BRAKSA Abdelilah, (Université Hassan II de Casablanca, FLSHAC)

-       CHRAÏBI Houda (Université Hassan II de Casablanca, FLSHBM) 

-       Djelloul Ghaliya Nadjat (Université de Lausanne)

-       EL YAMLAHI Moulay Ali (Université Hassan II de Casablanca, FLSHAC) 

-       GILLOT Gaëlle (Université de Paris1, IEDES) 

-       HABIBI Hassan (Université Hassan II de Casablanca, FLSHAC) 

-       Hammami-Marrakchi Afef (Université de Sfax)

-       Hérault Laurence (Université Aix-Marseille)

-       Houdmont Dag (Université Libre de Bruxelles)

-       IRAQI Rhita (Université Hassan II de Casablanca FLSHAC) 

-       KAAOUAS Nadia (Université Hassan II de Casablanca, FLSHAC) 

-       KADIRI Zakaria (Université Hassan II de Casablanca, FLSHAC)

-       KHALIL Jamal (Université Hassan II de Casablanca, FLSHAC) 

-       MABROUR Abdelwahed (Université Chouaib Doukkali, FLSH, El Jadida) 

-       MAJIT Afaf, (Université Hassan II de Casablanca, FLSHAC)

-       NADIFI Rajaa (Université Hassan II de Casablanca, FLSHAC) 

-       ÖZTIN PASSERAT Duygu, (Université Dokuz Eylül, Izmir, Turquie)

-       Paternotte David (Université Libre de Bruxelles)

-       QORCHI Bouchra (Université Hassan II de Casablanca, FLSHAC) 

-       RIAD Zahra (Université Hassan II de Casablanca, ENSET Mohammedia)

-       Roca i Escoda Marta (Université de Lausanne)

-       Sellami Meryem (Université de Tunis El Manar)

-       TAMIM Adil (Université Hassan II de Casablanca, FLSHAC) 

-       YAHYAOUI Fatima (Université Hassan II de Casablanca, FLSHAC).