DOPONUM
Art documentaire et politique à l’ère du numérique : pratiques, esthétiques, diffusion
Programme de recherche labellisé par la MSHB – 2018-2020
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Appel à communication pour une journée d’étude
Vendredi 3 avril 2020 – Amphi Robert Castel - MSHB - Rennes
"Du déracinement à la reconstruction : formes documentaires de la migration"
Avec l’avènement des technologies numériques au 21ème siècle, l’art documentaire a subi de profonds bouleversements. Le cinéma et la télévision ne sont désormais plus les seuls lieux de diffusion du registre documentaire. Il est désormais omniprésent dans les espaces les plus divers de la création artistique, décliné sur le web, dans les musées et les galeries ou encore dans les arts de la scène. Le programme DOPONUM tente de mesurer la portée politique de ces changements en prenant en considération aussi bien les pratiques que les techniques légères utilisées, les processus de création que les œuvres qui en résultent, leur circulation que leur impact sur le public. Il s’agit alors de questionner les liens entre cette prolifération d’images documentaires et une ambition artistique qui renouvelle sensiblement les rapports entre arts et politique.
Aussi, cette journée d’étude voudrait questionner la manière dont l’art documentaire (au cinéma, à la télévision, mais aussi dans les arts de la scène ou au musée), loin du traitement médiatique usuel, rend compte d’un fait politique majeur et incontournable de notre époque, celui des migrations de populations de tous âges et de toutes conditions, pour des raisons politiques, économiques et/ou environnementales, à l’échelle de la planète toute entière. La journée se focalisera sur deux phases précises, celles du déracinement et de la reconstruction. En effet, si nombre de documentaires (ou d’images documentaires insérées dans des spectacles vivants) consacrés à différentes migrations contemporaines montrent des migrants en phase de transit, sur le chemin de l’exil ou dans des camps aux statuts divers – et DOPONUM s’en est fait le relais en accueillant un certain nombre de cinéastes qui ont montré cette phase dans leurs films les plus récents (L’Héroïque Lande, la frontière brûle de Nicolas Klotz et Elisabeth Perceval, Des spectres hantent l’Europe de Maria Kourkouta et Niki Giannari, Ta’ang, un peuple en exil entre Chine et Birmanie de Wang Bing) –, plus rares sont ceux qui se focalisent sur les phases du déracinement et/ou de la reconstruction.
La première semble la phase privilégiée pour déterminer les causes de la migration, la seconde celle de ses conséquences ou de sa finalité. Le déracinement est rarement filmé directement, comme dans le film d’Hassen Ferhani Dans ma tête un rond-point (2015), où il ne fait nul doute que les deux jeunes Algérois, personnages centraux, finiront par céder à la tentation de l’ailleurs. C’est que le déracinement fait le plus souvent l’objet de récits au passé, de souvenirs, de réminiscences, ou encore de retours sur les lieux originels de la migration, parfois sous la forme de songes. On sait l’issue dramatique de nombreuses migrations contemporaines, notamment en mer Méditerranée. Parler de reconstruction pourrait dès lors sembler déplacé, d’autant qu’elle apparait le plus souvent comme incertaine ou provisoire. Cependant, des artistes ont pu, sans verser bien sûr dans l’optimisme à tout crin, témoigner de situations où des migrants se reconstruisent en entamant une nouvelle vie par l’insertion sociale : on peut là penser aux ateliers de théâtre dans Entre les frontières Avi Mograbi (2016), à l’accueil de migrants par des associations et des familles normandes dans Le Bel été de Pierre Creton (2019) et Green Boys d’Ariane Doublet (2019), ou encore au portrait de Cliff, le garagiste de Bewegungen eines nahen Bergs de Sebastian Brameshuber (Grand prix du festival Cinéma du Réel 2019).
Un film à la croisée du déracinement et de la reconstruction sera projeté en ouverture de cette journée d’étude, en présence de son réalisateur : A Lua Platz de Jérémy Gravayat (2018). Situé aux marges d’une banlieue parisienne en grande mutation, le cinéaste y filme – selon diverses modalités (témoignages directs, recours à l’archive, récits en voix off…) et différents supports (numérique et super 8, couleur et noir & blanc) – quelques familles roumaines cherchant des lieux où vivre et travailler, cherchant à se reconstruire tout en se remémorant leur pays, leur village d’origine.
Comment représenter l’origine d’un mouvement migratoire ? Comment dire l’arrachement ? L’imaginaire de la résistance ? Comment rendre compte d’une hypothétique reconstruction ? Quelles pratiques et techniques pour cela ? Quelle place pour l’auteur des images ? Quelles sont les modes de diffusion de ce type d’images documentaires ? Quel impact sur la conscience des spectateurs ou visiteurs de ces œuvres ? Telles sont quelques-unes des questions que cette journée d’étude voudrait privilégier.
Les propositions de communication (3 000 signes maximum), accompagnées d’une brève notice bio-bibliographique, doivent parvenir à l’adresse suivante avant le 31 janvier 2020 : antony.fiant@univ-rennes2.fr.
Les réponses seront données le 7 février.
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Comité scientifique :
Françoise Dubosquet (ERIMIT, Rennes 2)
Antony Fiant (APP, Rennes 2)
Miloud Gharrafi (ERIMIT, Rennes 2)
Dominique Maliesky (Sciences Po Rennes)