Histoire de l’enseignement à La Réunion
Civis gallum sum.1
1Maître de conférences à l’INSPE de La Réunion, Pierre‑Éric Fageol propose ici un essai qui articule Identité coloniale et sentiment d’appartenance nationale sur les bancs de l’école à La Réunion (1870‑1946). L’histoire étant son domaine de spécialité, l’auteur choisit un empan explicite — de 1870 à 1946 — pour interroger une partie de l’histoire de l’enseignement à La Réunion selon un double prisme, à savoir celui de l’identité — en contexte colonial — et celui de l’appartenance nationale — par rapport à l’enracinement local. Suivant les pas d’Anne‑Marie Thiesse, Pierre‑Éric Fageol articule la petite patrie que constitue La Réunion avec la grande patrie qu’est la France, voire la plus grande France qu’est l’Empire colonial français. Par conséquent, il s’agit ici pour lui, non plus d’écrire la France, mais d’enseigner la France à La Réunion, en réfléchissant à la place de La Réunion dans l’enseignement français ainsi que d’interroger la francité de La Réunion2. Du point de vue des études littéraires, l’intérêt de cet ouvrage historique est multiple. Il permet d’abord d’interroger la francité d’une île francophone comme La Réunion, francité souvent problématisée dans la production littéraire ; il permet ensuite de comprendre les trajectoires scolaires des écrivains francophones de La Réunion ; il permet en outre d’étoffer le contexte du discours littéraire à l’aune des idéologies en présence. Un tel essai permet enfin de fonder, à la façon d’Alain Viala, une réflexion sur la littérature à partir d’une réflexion sur l’enseignement. Dans cette perspective, l’ouvrage, qui réinterroge la politique de l’assimilation, propose de considérer, non pas une violence symbolique qui annihilerait La Réunion, mais une prise en compte progressive de l’île qui apparaît comme le socle permettant un saut vers la métropole française. Ainsi, pour rendre compte de cet ouvrage, souhaitons‑nous d’abord réinterroger quelques dates fondamentales, avant de reconstruire une partie de la bibliothèque de l’enseignant colonial à La Réunion ce qui nous permettra, en dernier lieu, d’aborder la question du panthéon des grands hommes du lieu.
Au sujet de quelques dates fondamentales dans l’histoire de l’enseignement à La Réunion
Terminus a quo de l’essai : 1870. L’école à La Réunion à la suite de la défaite de la France face à l’Allemagne
2P.‑É. Fageol débute son essai sur l’histoire de l’école à La Réunion en 1870. Cette date est significative puisqu’elle renvoie à une défaite de la France face à l’Allemagne, défaite qui incite notamment la France à se tourner vers son Empire colonial pour trouver un certain réconfort et une image valorisante d’elle‑même :
On perçoit à travers ces propos un nationalisme de défense, hanté par l’image de la décadence et défini avant tout par un rapport à la menace de l’ennemi. Cette ‘crise allemande de la pensée française’ a clairement été mise en évidence par Claude Digeon, lorsqu’il analyse dans ses travaux l’obsession de l’Allemagne et de la ‘chose allemande’ dans la prise de conscience nationale en France au cours de cette période. La revanche est présentée aux élèves comme une situation inévitable, une juste réparation après les ‘douloureux désastres, trop cruels pour pouvoir [être] oubli[és]’. Le devoir n’en est que plus impérieux, ‘c’est‑à‑dire que si, à une heure quelconque et pour sa défense, la Patrie vous demande votre vie, vous devez la lui donner sans hésiter’. (p. 44‑45)
3Il ressort de cette citation qu’après 1870, la réponse à la question nationaliste problématique « qu’est‑ce qu’être français ? » trouve la réponse contextuelle suivante : être l’ennemi des Allemands. Ainsi le patriotisme se confond‑il avec un nationalisme belliqueux dont l’aboutissement ne peut être que le pro patria mori. Et cet endoctrinement fait école si l’on considère rétrospectivement les deux guerres mondiales qui opposeront, successivement et notamment, la France à l’Allemagne. Certains Réunionnais, moins aveugles à l’histoire, s’étonnent de la transformation du rival colonial britannique en allié. Ainsi 1870 apparaît‑elle comme une date pertinente, mais exogène et l’on peut regretter, même si ce n’est pas ainsi que l’auteur définit son sujet, de ne pas avoir plus d’informations sur les origines de l’école à La Réunion : quand la politique coloniale autorise‑t‑elle une politique scolaire et comment l’institution scolaire se met‑elle d’abord en place à Bourbon ?
Terminus ad quem : 1946. La départementalisation de La Réunion
4En revanche, 1946 apparaît comme une date particulièrement endogène pour La Réunion. Il s’agit en effet de l’année où l’île devient un département français en raison notamment de son statut de « vieille colonie » et en récompense du sang versé pour la France. En d’autres termes, 1946 est l’aboutissement de la Seconde Guerre mondiale — 1939/1945 — ; en ce sens, l’assimilation scolaire de La Réunion porte ses fruits et en acceptant de mourir pour la patrie, l’île poursuit le choix de l’intégration au détriment de celui de l’autonomie. On peut néanmoins indiquer que l’histoire de l’enseignement à La Réunion connaît, comme l’histoire française, un détour pétainiste raconté par l’auteur de la façon suivante :
Pourtant, même si les prises de position sont plutôt propices à la sécession, le ralliement au régime de Vichy semble inévitable. Les liens personnels entretenus par Pierre Aubert avec le gouverneur de Madagascar Léon Cayla ont certainement influencé sa décision. Nouvellement nommé à la tête de la Grande île en remplacement de Marcel de Coppet, jugé trop favorable à la poursuite des combats, Cayla se positionne immédiatement en faveur du maréchal Pétain. Pierre Aubert sait désormais qu’il risque de perdre son poste en cas de décision contraire. (p. 196)
5Le choix de la Collaboration est donc inattendu à La Réunion et apparaît comme le résultat d’un concours de circonstances politiques. Marcel de Coppet, gouverneur de Madagascar jugé du côté de la France libre, est évincé au profit de Léon Cayla, pétainiste. Dans cette situation, Pierre Aubert, plus proche de la ligne du prédécesseur, doit réajuster sa position pour conserver son poste. Les conséquences sur la politique scolaire sont les suivantes :
La nouvelle administration de l’État français installée à Vichy le 10 juillet 1940, attachée aux valeurs traditionnelles du retour à la terre, au corporatisme des métiers, à l’ordre et à la hiérarchie, accorde une place essentielle à l’éducation et à la formation professionnelle. Dès les prémices de l’installation du nouveau régime, l’encadrement et l’éducation de la jeunesse sont considérés comme des priorités. (p. 198)
6Le programme politique « Travail‑Famille‑Patrie » s’applique donc aussi à l’école. La dénonciation de l’intellectualisme va de pair avec une revalorisation de l’éducation professionnelle. En outre, un certain nombre des valeurs traditionnelles du pétainisme, au centre desquelles le retour à la terre, rencontre un écho positif dans le contexte local.
1910 : « origine » de la prise en compte de La Réunion dans l’enseignement français
7Le lieu commun « nos ancêtres les Gaulois » nourrit une vision mythique de l’éducation coloniale comme éducation française réduite à l’évocation de la métropole, même dans des territoires situés à plusieurs milliers de kilomètres de l’Hexagone, et souvent dans un hémisphère différent. L’étude du cas réunionnais démontre qu’il en va autrement. Il est clair que le but de l’enseignement français est l’acculturation. La volonté de fabriquer des Français à partir des Réunionnais qui ignorent qu’ils le sont incite à adopter la stratégie imbriquée de la double patrie. En d’autres termes, en apprenant au Réunionnais comment il est Réunionnais, c’est‑à‑dire son appartenance à une petite patrie, il sera ensuite plus facile de lui apprendre comment il est Français et appartient à une plus grande patrie. Si la question de la langue apparaît souvent clivante, le français tendant à discréditer le créole selon le principe de la diglossie, il n’en va pas de même si l’on interroge les sujets des examens de recrutement des enseignants à La Réunion. Dès 1910, un sujet questionne — et par là même suggère — l’utilisation de l’histoire locale :
Comment comprenez‑vous cet enseignement de l’histoire locale ? Montrez quel parti vous pouvez tirer de cette histoire particulière pour éclairer l’enseignement général de l’histoire de la France, quel appui vous devez chercher dans l’histoire la petite Patrie pour faire comprendre et aimer la grande. (p. 140)
8Même si l’on voit ici que l’histoire de La Réunion est nettement inféodée à l’histoire nationale, il n’en est pas moins vrai qu’elle est prise en compte et qu’on trouve des échos détaillés dans des brochures didactiques3. D’autres sujets d’examens invitent à problématiser la part, non plus de l’histoire, mais de la langue locale, dans l’enseignement français :
Vous êtes chargés d’enseigner le français dans un pays où l’usage d’un patois est plus répandu que celui de notre bonne langue maternelle. Quelle attitude prendriez‑vous en face de ce patois ? Pensez‑vous que l’usage ou l’intelligence de cette langue populaire puisse être utile pour la formation intellectuelle et morale de vos élèves ? Croyez‑vous qu’il soit possible de chercher quelquefois dans le patois un auxiliaire pour votre enseignement et particulièrement pour celui du français ? Traiter ce sujet avec des exemples précis empruntés à votre connaissance de patois créole en usage autour de vous. (p. 88‑89)
9Le sujet prend la forme d’une affirmation et de trois questions. L’affirmation est réaliste : faut‑il enseigner en français dans un lieu où il n’est pas la langue la plus pratiquée ? Néanmoins, nous pensons que le sujet, même s’il invite à un éloge attendu de « notre bonne langue maternelle », incite également à réfléchir sur la langue d’enseignement en fonction du contenu de l’enseignement : faut‑il enseigner toutes les matières ou non en français ? La succession des questions indique avec insistance qu’il faut prendre en compte ce patois qu’est le créole sans lui donner un quelconque primat. Ainsi la date de 1910 nous apparaît‑elle, en contexte colonial, non comme une date exogène d’assimilation, mais comme une date endogène octroyant une place au fait réunionnais dans l’enseignement français.
Petite bibliothèque de l’enseignant colonial à La Réunion
Bibliothèque religieuse
10Dans son enquête historique sur l’histoire de l’enseignement à La Réunion, P.‑É. Fageol mentionne, dans l’état actuel de ses recherches, le texte princeps. Il s’agit d’un ouvrage religieux :
Le premier manuel de 1856, à l’usage des Frères des écoles Chrétiennes est complété en 1863 par une édition plus complète des réalités locales qui sont abordées sous la forme de questions et de réponses, selon la méthode employée dans les catéchismes du XIXe siècle. La connaissance du pays natal a une finalité civique et religieuse : la beauté de l’île n’est que le reflet de la providence divine et le sentiment d’appartenance nationale accrédite une intégration pleine et entière du sol français. (p. 114)
11L’ouvrage en question s’intitule Notions historiques et topographiques sur l’île Bourbon ou La Réunion présentant l’état de cette colonie française au 1er janvier 1856. Ce n’est donc pas un ouvrage essentiellement pédagogique et il est cité de seconde main, à partir des « Notes sur l’enseignement de l’histoire de La Réunion » de Pierre Portet. Ainsi l’origine de l’école française à La Réunion est‑elle liée aux missionnaires chrétiens, selon un alpha auquel on pouvait s’attendre. La méthode n’est pas non plus insolite. La prise en compte d’une île jugée paradisiaque et nommée, pour cette raison, Eden, est d’autant plus importante que l’intuition de la beauté du monde doit mener à l’adoration de son Créateur. Cette méthode prend ensuite la forme d’un catéchisme composé de questions et de réponses, selon une méthode reprise ensuite dans l’enseignement colonial afin de verrouiller idéologiquement l’esprit des élèves.
Laïcisation de la bibliothèque de l’enseignant
12La laïcisation de l’enseignement français à La Réunion passe notamment par une plume locale, celle de Paul Hermann, présenté de la façon suivante par P.‑É. Fageol dans une note infra‑paginale :
Né le 25 juillet 1878 à Saint‑Pierre, Paul Hermann a été instituteur dans de nombreuses communes de l’île après ses études à l’École normale. Reconnu par ses pairs, il reçoit les Palmes académiques et la Médaille d’argent des instituteurs. Ses publications s’inscrivent dans l’application des nouveaux programmes (1903 et 1923) qui prennent en compte la dimension locale de l’enseignement. Grâce au soutien du gouverneur Camille Guy, agrégé en Histoire, ses publications vont connaître un vif succès. (p. 151)
13Paul Hermann apparaît comme une autorité légitime sur l’histoire de La Réunion. Réunionnais lui‑même et instituteur, il produit, pour ses collègues, des ouvrages didactiques reconnus par ses pairs qui le consacrent. C’est chez Delagrave, à Paris, que paraît, en 1909, une Histoire et géographie de l’île de La Réunion cours moyen dont le retentissement est le suivant :
Le premier ouvrage véritablement conçu pour le primaire par un pédagogue reconnu ne date finalement que de 1909. Rédigé par Paul Hermann, il est destiné à des élèves des Cours moyen et supérieur de l’enseignement primaire. Le chef de service de l’Instruction Publique — Adrien Berget — s’empresse de le recommander aux instituteurs de l’île car ‘il vient combler une lacune importante’ pour respecter les programmes coloniaux qui ‘comportent des interrogations aux divers examens sur l’histoire et la géographie locales’. (p. 151)
14Ainsi Paul Hermann a‑t‑il de nombreux thuriféraires officiels qui permettent à ces ouvrages, en sus de leurs qualités intrinsèques, de recevoir un large écho.
Panthéon scolaire & rôle de l’exemple : aux grands hommes la petite patrie reconnaissante…
Constitution scolaire d’un panthéon réunionnais
15Conformément à une approche traditionnelle de l’histoire comme histoire faite par des grands hommes, les manuels de l’époque contribuent à la constitution d’un panthéon réunionnais :
Au‑delà de ce premier constat, il semble également qu’il existe un panthéon dans le panthéon. Les grands hommes les plus en vus dans les manuels sont avant tout issus du monde littéraire. Citons pêle‑mêle les poètes Charles Leconte de Lisle, Léon Dierx, Eugène Dayot, Auguste Lacaussade, Évariste de Parny et Antoine de Bertin. Suivent les journalistes Édouard Hervé et Louis Brunet. Les historiens sont également représentés comme Joseph Bédier, Émile Trouette, Élie Pajot, Georges Azéma ou Albert Lougnon. Enfin, les romanciers et critiques d’art Marius et Ary Leblond, le polymathe Jules Hermann ou l’essayiste Raphaël Barquissau font l’objet d’une attention particulière. (p. 175)
16Ce panthéon apparaît donc comme un panthéon littéraire qui reconduit les hiérarchies habituelles. On trouve d’abord les écrivains, en l’occurrence des poètes selon un lieu commun qui fait de La Réunion une île de poètes, puis les journalistes, enfin les essayistes et les critiques. À ce panthéon littéraire principale s’ajoute un panthéon scientifique jugé secondaire. P.‑É. Fageol reconstitue les trajectoires de chacun de ces personnages historiques afin de montrer comment leur « réunionnité » est ou non un mythe fabriqué de façon ultérieure pour récupérer et revendiquer une figure éminente.
Roland Garros, le grand homme réunionnais par excellence
17Paradoxalement, la figure réunionnaise la plus convoquée dans les discours scolaires n’est pas littéraire, mais sportive et tragique. Il s’agit de Roland Garros :
Ce déterminisme géographique définit des qualités spécifiques mises à profit par Roland Garros au service de la grande Patrie. Qu’importe que le jeune Garros ait quitté l’île de La Réunion pour s’installer en Cochinchine dès l’âge de quatre ans, il doit son vaillant caractère à ses origines bourbonnaises. La fierté créole est donc à l’honneur chaque discours. (p. 187‑188)
18L’auteur revient sur la fabrique d’un héros réunionnais qui donne lieu à des envolées lyriques qui se fondent sur la pédagogie par l’exemple, Roland Garros incarnant la virilité, l’esprit d’aventure et aussi celui de sacrifice. On peut songer au discours de Ruben de Couderc, président du comité Garros, à l’occasion de l’inauguration du monument à lui dédié le 27 avril 1926. Il y est notamment question de « l’apothéose de sa mort » (p. 188)
19P.‑É. Fageol indique son double féminin, certes plus discret mais décidément présent : Juliette Dodu. Voici comment Paul Hermann ressuscite sa mémoire :
La Réunion souffrit des malheurs de la France en 1870 et 1871. Ceux de ses enfants qui en eurent les moyens volèrent comme dans toutes les guerres à son secours […] Juliette Dodu était née à Saint‑Denis. Employée des télégraphes à Pithiviers, elle fut [illisible]. En 1871, chassée de son bureau par les Allemands ; mais la nuit, elle interceptait les dépêches ennemies et avisait le général français. Elle fut surprise et condamnée à être fusillée. L’armistice la délivra. ‘Si tous les Français avaient votre cœur, lui dit le général prussien, les Allemands ne seraient pas en France !’ (p. 179)
20Ainsi retrouve‑t‑on les lieux communs du discours patriotique. Né à Saint‑Denis, Juliette Dodu est implicitement réunionnaise, mais elle émigre en France pour travailler à Pithiviers et se trouve prise dans une guerre qui la transforme en héroïne. Son patriotisme est d’autant plus éclatant qu’il est reconnu par le camp adverse, celui des Allemands, qui fait d’elle une Française suprême. L’un des autres moyens de suivre cette mémoire des personnages importants est de prêter attention à la statuaire et à l’odonymie, lieux de mémoire qui donnent aujourd’hui souvent lieu à une critique postcoloniale voire à des actes véhéments.
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21Nous avons commencé par interroger les dates endogènes et exogènes qui ouvrent, ponctuent et ferment cet essai sur l’histoire de l’éducation française à La Réunion. Nous avons ensuite restitué une petite partie de la bibliothèque scolaire liée à cette période avant de nous intéresser à l’une des rhétoriques de l’époque, à savoir la mise en scène des grands hommes. Ainsi cette histoire de l’éducation est‑elle assurément une histoire de l’éducation patriotique et du patriotisme, jusque dans ses errements. C’est aussi une histoire de l’éducation coloniale qui ne fait pas ici l’objet d’une diabolisation. Fort d’une connaissance intellectuelle de son sujet — qu’il documente de façon originale par les images d’archives qui émaillent son essai —, Pierre‑Éric Fageol nous éclaire considérablement sur l’histoire de l’éducation française à La Réunion de la défaite de 1870 à la départementalisation de l’une des vieilles colonies. Nous ouvrirons enfin le propos en esquissant une comparaison avec l’histoire de l’enseignement français dans l’archipel des Comores. Dans ce lieu également indianocéan, l’école française a fort à faire pour tenter de supplanter, à tout le moins de concurrencer, l’école coranique qui la précède et est devenue endogène. De façon ironique, c’est en construisant le lycée Saïd Mohamed Cheikh à Moroni pour scolariser et acculturer les élèves les plus méritants de la Grande‑Comore, d’Anjouan, de Mayotte et de Mohéli, que la France crée involontairement un lieu qui devient le creuset, non pas du patriotisme français, mais du nationalisme comorien au point qu’y apparaissent des graffiti qui réclament le départ du colon.