Coulisses et marges de la protestation
Si la dimension langagière des mouvements sociaux a fait l’objet de recherches dès les années 1960, les travaux existants privilégient dans leur majorité des corpus de paroles ou de textes publics. Les productions langagières protestataires qui se situent en amont et en périphérie de leurs processus de publicisation ont été bien moins étudiées. Les investiguer implique un travail d’enquête archivistique ou ethnographique, accompagné d’une réflexivité éthique et méthodologique, afin de pouvoir transformer en corpus ce qui se dit et s’écrit dans les coulisses et les marges des mobilisations. Une livraison de la revue Langage & Société, désormais accessible en ligne via Cairn nous fait entrer dans les "Coulisses et marges de la protestation" : partant d’un dialogue entre analyse de discours, sociolinguistique, sociologie des mobilisations et théories des (contre-)publics, ce dossier explore les propositions de James Scott pour analyser le "texte caché" des groupes dominés, l’usage d’archives écrites pour saisir le travail de protestation au XIXe siècle depuis ses marges ; il s’intéresse à l’ethnographie des échanges langagiers en terrain militant pour investiguer la constitution ou le délitement des stratégies d’alliance entre des groupes et l’élaboration collective d’un discours pour défendre une cause émergente. Il se clôt par un entretien collectif sur les enjeux méthodologiques, épistémologiques et éthiques des enquêtes sur les coulisses militantes.