À un moment où la transmission des savoirs et la formation des enseignants sont en pleine redéfinition, où les humanités connaissent une crise de légitimité, nous voulons nous interroger sur la place des lettres médiévales dans le paysage éducatif et académique mais aussi culturel en France et à l’étranger. Quelle pertinence et quelle utilité y a-t-il à cultiver les lettres médiévales aujourd’hui ? Quels enjeux y a-t-il à les soigner, les faire croître et embellir ? Quels fruits le monde contemporain peut-il récolter de la culture des lettres médiévales ?
Le numéro 36 de Perspectives Médiévales réfléchira aux voies de transmission et de médiation de la langue et de la littérature du Moyen Âge dans l’enseignement, la société et la cité. Cette réflexion pourra emprunter plusieurs pistes :
Transmettre les lettres médiévales par l’enseignement. On pourra s’interroger sur la légitimité et les enjeux d’un enseignement des lettres médiévales à l’école, à l’université et dans la formation initiale et continue des enseignants du secondaire. Lors du passage du savoir scientifique, produit par la recherche, à la salle de cours, que transmet-on, comment et à qui ? Comment envisager l’enseignement des lettres médiévales en fonction des niveaux ou des publics visés, depuis l’élève de primaire jusqu’au doctorant spécialisé en langue et littérature médiévales, en passant par l’étudiant non-spécialiste ? Quel type de savoir convient-il de transmettre à chacun de ces publics, par quelles méthodes et pour quels objectifs, aussi bien scolaires et didactiques que culturels ou même civiques ? Quelles contraintes et censures implicites, mais aussi quelles possibilités offrent les cadres institutionnels de l’enseignement ?
Les lettres médiévales dans le champ disciplinaire. En France, l’enseignement des lettres médiévales est marqué par des cloisonnements académiques qui, par exemple, séparent l’étude de la langue de celle de la littérature, la littérature médio-latine de la littérature française. Quelles sont les origines historiques de ces cloisonnements ? Quelles en sont les causes actuelles ? Dans quelle mesure ce cloisonnement est-il dommageable ? Par ailleurs, dans le champ de la littérature française, le Moyen Âge est souvent isolé dans une périodisation qui empêche de penser le fait littéraire dans sa continuité : l’enseignement des lettres médiévales est coupé de celui des périodes moderne et contemporaine. Quel est le préjudice subi pour l’enseignement des lettres en général ? Quelles nouvelles approches pourraient permettre le décloisonnement du fait littéraire médiéval, et pour quel gain en terme de transmission et d’enseignement ?
Les lettres médiévales dans la culture du Moyen Âge. Les textes et la langue du Moyen Âge sont trop peu enseignés dans une perspective interdisciplinaire. Comment articuler une étude ciblée des textes médiévaux et une ouverture culturelle plus large sur la période médiévale ? D’un point de vue didactique, comment le manuscrit peut-il être exploité comme un objet au carrefour des disciplines de la médiévistique ? De même, comment la connaissance du fait littéraire médiéval peut-elle s’enrichir de la confrontation avec les récritures textuelles, filmiques, musicales du Moyen Âge ?
Les lettres médiévales et la production culturelle contemporaine. Les lettres médiévales ont une vie dans la cité et sont proposées au « grand public » sous la forme de performances (lectures, mises en scène) et d’expositions réalisées par des professionnels des milieux artistiques et culturels. Or cette vie publique, qui offre une excellente médiatisation aux lettres médiévales, a généralement une existence autonome. Entre établissements d’enseignement et établissements culturels, quels types de partenariats peut-on concevoir et imaginer ? Comment les enseignants peuvent-ils s’approprier et mettre à profit les ressources proposées par les institutions culturelles ? Quels peuvent être les apports respectifs de chaque partenaire dans l’enseignement et la diffusion des lettres médiévales ? Par ailleurs, quelles images et quelle conception des lettres médiévales véhiculent ces performances et création artistiques ? Le passage culturel se fait-il au prix de l’anachronisme ou du malentendu ?
Ces questions portent sur les lettres médiévales telles qu’elles sont, pourraient ou devraient être enseignées et cultivées en France aussi bien que dans d’autres pays, francophones ou non. Les articles pourront prendre la forme de bilans, d’expériences ou de réflexions théoriques.
Coordination du numéro par :
Sébastien Douchet, rédacteur en chef, université d’Aix-Marseille,
Sophie Albert, université Paris IV-Sorbonne,
Patricia Victorin, université Montpellier III-Paul Valéry.
Calendrier :
15 juin 2014 : soumission d’un avant-projet d’une page avec bibliographie au comité éditorial.
15 juillet 2014 : avis du comité éditorial.
15 octobre 2014 : en cas d’avis favorable, remise de l’article au comité scientifique pour correction.
1er janvier 2015 : publication du numéro en ligne.
Merci d’envoyer vos avant-projets aux trois contacts suivants :
sebastien.douchet@gmail.com, sophie.albert@paris-sorbonne.fr, patricia.victorin@univ-montp3.fr