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Appels à contributions
Environment, Science, Memory

Environment, Science, Memory" (revue Variations)

Publié le par Faculté des lettres - Université de Lausanne (Source : Matteo Kobza)

Variations. Revue littéraire de l'université de Zurich 

Call for Papers :

Variations 28 : Environment, Science, Memory 

The balsam fir tree also remembers. If caterpillars or moose browse its needles, the nibbling assault lodges itself in the chemical makeup of the tree, in a manner analogous to the changes in a chickadee’s nerve cells after a near miss with a predator. The tree’s subsequent growth is more heavily defended by unpalatable resins, like a bird turned jumpy by its bad experience with a hawk. The fir also remembers air temperatures dating back nearly a year, a memory that helps the tree to know when to winterize its cells. [...] Roots and twigs have memories of light, gravity, heat, and minerals. (Haskell 2017: 37) 

La mémoire et l’environnement sont depuis longtemps perçus comme étant intimement liés. Plus récemment, avec l’émergence de notions comme la « mémoire planétaire » (planetary memory) (cf. Bond et al. 2018), cette interconnexion entre environnement et memoire a suscité un intérêt renouvelé (Gülüm et al. 2024). Comme le formulent Gülüm et al. dans « Memory and Environment », les cadres de perception modifiés liés à l’épistémologie, aux catégories et aux échelles « invite us to understand memory and environment as embedded, co-constitutive, and co-constructed » (2024 : 4). Dans cette perspective, la science joue un rôle fondamental dans la manière dont nous comprenons la construction de la mémoire à travers divers contextes environnementaux, qu'ils soient naturels ou culturels. Elizabeth DeLoughrey et George Handley, dans Postcolonial Ecologies, considèrent l’environnement comme en témoin de l’histoire humaine (2011 : 4), dont le résultat est un paysage modifié de manière observable. Les traces du passé s'inscrivent dans la culture, la mythologie et les matières naturelles, perpétuées par ceux qui en détiennent le savoir. De son côté, Donna Haraway affirme dans When Species Meet que le corps humain est lui-même partie prenante d'une longue histoire d'interactions avec d'autres êtres vivants (2008 : 5), une histoire que nous pouvons appréhender grâce aux sciences humaines aussi bien qu'aux sciences naturelles. 

Mémoire et environnement sont liés non seulement parce qu’ils peuvent être considérés comme « embedded, co-constitutive, and co-constructed », mais aussi parce que tous deux occupent une position similaire et hautement productive dans le discours académique. Plus précisément, l'étude de ces thématiques dans les domaines littéraires et culturels se situe souvent à la croisée des sciences humaines et des sciences naturelles. La pensée écocritique, par exemple, ne saurait exister sans mobiliser les connaissances issues des sciences naturelles. Comme le notent Eva Horn et Hannes Bergthaller dans The Anthropocene: Key Issues for the Humanities, « [we] start from the assumption that the insights of the natural sciences form an indispensable basis for an adequate understanding of the Anthropocene » (2020 : 5). De même, Susan Nalbantian souligne dans Memory in Literature: From Proust to Neuroscience que son étude « opens up links between the literary and the scientific in a time in which integrative approaches between the disciplines are at the cutting edge of knowledge » (2003 : 2). La mémoire et l'environnement apparaissent ainsi comme des objets d’étude interconnectés non seulement intrinsèquement, mais aussi par leur propension distinctive à susciter des pratiques de recherche qui négocient les frontières entre les sciences humaines et les sciences naturelles. 

Dans cette optique, le 28e numéro de Variations propose d’examiner comment les savoirs scientifiques contribuent et façonnent notre compréhension de la mémoire et de l’environnement, et comment la littérature et la culture, à leur tour, s’approprient ces négociations scientifiques. Nous sollicitions contributions explorant les intersections entre environnement, science et mémoire, à travers des questions telles que : 

Comment les discours scientifiques informent et (re)configurent-ils conceptions de la mémoire et de l’environnement, y compris les notions d'environnements « naturels », « artificiels » ou façonnés par la technologie ?
De quelle manière les sciences humaines proposent-elles des concepts subjectifs d'environnements et d’entourages qui intègrent l’interprétation, la perception et l’expérience – dimensions qui, à leur tour, deviennent pertinentes pour la recherche scientifique ? 
Comment la littérature, la culture et l’art construisent-ils narrativement et sensoriellement les environnements, et en quoi les environnements (ou leur construction) sont-ils liés à la mémoire ? 
Dans quelle mesure la mémoire et la science jouent-elles un rôle dans le contexte de la conservation ? 
Quel rôle jouent la science du climat et la modélisation écologique dans la formation de la mémoire culturelle ?
 Quelles sont les dimensions coloniales et postcoloniales de la mémoire environnementale et de la transformation des paysages et, en particulier, quel rôle le discours scientifique joue-t-il dans la légitimation de l’exploitation et de la transformation des environnements coloniaux ? 
De quelle manière les agents et réseaux non-humains façonnent-ils la mémoire biologique et écologique et, en particulier, les représentations littéraires et culturelles de cette interaction ? 
En quoi les notions du traumatisme, du déplacement et de la mémoire sont-elles pertinentes dans le contexte du changement climatique et de l’effondrement écologique ? 
Les contributions pourront porter sur des textes littéraires, la culture visuelle, la philosophie, les humanités environnementales, les études des sciences et des techniques, ainsi que les études de la mémoire. Nous accueillons aussi bien les réflexions théoriques et méthodologiques que les études de cas et les analyses comparatives. 

Les personnes intéressées sont priées de faire parvenir une proposition d’article (300–400 mots) accompagnée d’une brève bio jusqu’au 15 juin 2025 à l’adresse suivante : variations@rom.uzh.ch. L

es contributions (32’000 signes au maximum, notes et espaces compris) peuvent être rédigées en français, en allemand ou en anglais. Le délai de remise des textes est fixé au 1er décembre 2025 (après l’accord de principe de la rédaction, qui interviendra en juillet 2025). 


Bibliographie 

DeLoughrey, Elizabeth M., and George B. Handley, eds. 2011. Postcolonial Ecologies: Literatures of the Environment. Oxford University Press. 
Gülüm, Erol, Paul Leworthy, Justyna Tabaszewska, and Hanna Teichler. 2024. “Memory and Environment.” Memory Studies Review 1 (1): 3–15. https://doi.org/10.1163/29498902-20240007.
Haraway, Donna. 2008. When Species Meet. University of Minnesota Press.
Haskell, David George. 2017. The Songs of Trees: Stories from Nature’s Great Connectors. Penguin Random House.
Horn, Eva, and Hannes Bergthaller. 2020. The Anthropocene: Key Issues for the Humanities. Key Issues in Environment and Sustainability. Routledge.
Nalbantian, Suzanne. 2003. Memory in Literature: From Rousseau to Neuroscience. Palgrave Macmillan.