Colloque international
« Écrire en français langue autre au XXIe siècle »
25-26 avril 2024
Sorbonne Université Abu Dhabi
Dans le sillage des travaux et réflexions séminaux consacrés depuis une trentaine d’années à l’hétérolinguisme, au plurilinguisme, et tout récemment encore à la francophonie translingue littéraire (Ausoni, Anokhina, Allard et De Balsi), ce colloque, qui se tiendra à Sorbonne Université Abu Dhabi, vise à interroger, dans toute sa diversité, sa complexité, et ses enjeux, tant esthétiques que linguistiques et politiques, l’écriture littéraire en français langue autre au XXIe siècle. Outre les communications scientifiques, ce colloque proposera également des rencontres avec des écrivains.
Deux précisions s’imposent d’emblée, l’une terminologique, l’autre périodique.
1. L’appellatif « Français langue autre » est ici à envisager comme une catégorie générique rassemblant pour l’essentiel, mais pas seulement, le Français langue étrangère, le Français langue seconde ou d’enseignement[1]. Cette étiquette peut certes apparaître inexacte – après tout, l’hétérogénéité est constitutive de la langue maternelle pour le scripteur lambda et, a fortiori pour l’écrivain qui forge, inouïe, sa propre langue[2] –, voire fourre-tout, ne serait-ce qu’au regard de toutes les variations diatopiques dont « les » français font l’objet, dans l’Hexagone et dans le monde. Son choix vise d’abord à fédérer dans un même corpus d’étude les écrivains « translingues » faisant littérature dans un français appris en l’absence d’une communauté linguistique d’origine partiellement ou totalement francophone, et les auteurs francophones pour qui le français est langue seconde ou langue de scolarisation, autrement dit une « alterlangue » (Caroline Hervé-Montel, 2012). Plus largement, son choix vise aussi et surtout à n’exclure de l’enquête aucune trajectoire d’écriture en français qui par sa « singularité » bi/plurilinguistique accentuerait la porosité des catégories didactiques et littéraires prédéfinies, défierait leurs limites et, ce faisant, confirmerait l’importance d’une « francophonie individuelle » (Dominique Combe, 1995) qui déjoue les représentations habituelles de la francophonie littéraire. L’épithète « autre » a ainsi la vertu de souligner que le français langue d’écriture s’inscrit toujours ici dans un rapport (dont la nature reste à définir), au moins latent, à une ou plusieurs autres langues – (autre) langue première, (autre) langue de vie ou d’écriture, voire de traduction/d’auto-traduction, qui aiguise par la comparaison la conscience linguistique de l’auteur pour le doter d’une « surconscience linguistique » (Gauvin, 1996) – et, de facto, autres cultures.
À titre d’exemple, on pourra ainsi choisir de se pencher sur l’œuvre : du poète de l’entre-deux Tom Riesen qui, « né entre deux langues », le luxembourgeois et le serbe, a choisi le français pour s’exprimer, la seule langue, « la langue de personne », que son père et sa mère avaient en commun ; du « décalé » Akira Mizubayashi qui se sent toujours « hors de place », étranger en français, comme en japonais, sa langue d’origine, à l’instar de la poétesse Ryoko Sekiguchi qui a écrit en français sur le Liban[3] et dont « l’écriture en français laisse percer l’ombre du japonais qui y passe »[4] et inversement ; de l’exilé Eugène Green, écrivain américain devenu français à 29 ans, qui, arrivé en France à 22 ans n’avait du français que quelques notions scolaires ; du romancier Miguel Bonnefoy, qui a grandi au Venezuela et au Portugal où il a suivi sa scolarité au sein des Lycées français, qui explore dans son œuvre la question de la filiation et de l’héritage, tout comme la romancière Jakuta Alikavazovic qui est née, vit et travaille en France mais qui parle couramment l’anglais et dont le bosnien est la langue maternelle ; de la poétesse Elke de Rijcke qui « dispose de deux langues natales », l’une écrite (le français), l’autre orale (le néerlandais), et dont le « rapport à la langue est devenu hybride, de sorte que les termes de langue natale, maternelle et étrangère le sont devenus tout autant »[5], à l’instar de Rebecca Gisler, qui expérimente une scission croisée au sein de son rapport à la langue natale, partagée entre l’allemand (langue d’écriture première) et le français, langue familiale et orale.
2. Quoique de prime abord arbitraire – plus encore dans le cas d’auteurs, tels Assia Djebar, An Antane Kapesh, Eduardo Manet, Vassilis Alexakis, Tahar Ben Jelloun, Amin Maalouf, Dany Laferrière dont l’œuvre appartient aussi au XXe siècle –, le choix de l’année 2000 comme terminus a quo de la période étudiée se justifie néanmoins par des phénomènes contrastés apparus parallèlement dans les années 2000. D’un côté, les positions de prestige conquises dans la Francophonie par les auteurs issus des anciennes colonies, la consécration institutionnelle des « écrivains francophones venus d’ailleurs » (Porra, 2011) par les prix littéraires français[6], la contestation de la bipartition « littérature française »/ « littérature francophone » au profit des catégories fédératrices « littératures d’expression française » ou « littératures de langue française », la revendication d’une « littérature-monde » en français par nombre d’écrivains dont Fatou Diome et Alain Mabanckou, la transculturation du champ littéraire français de plus en plus prégnante. De l’autre, la moindre motivation à l’exil vers la France des écrivains latino-américains et centre-européens, la perte de vitesse du français en Afrique au profit de l’anglais voire du chinois[7], la tentative de revalorisation des langues nationales africaines (le wolof), le déclin relatif ou mutation du rayonnement culturel de la France à l’étranger[8], le recul, y compris en territoire francophone, du paradigme monolingue qui ne correspond plus à la réalité d’un nombre croissant de locuteurs urbains, davantage concernés, dans un monde globalisé, par le paradigme multilingue où des agrégats de la langue « maternelle » (familiaux, émotionnels, linguistiques, socio-culturels, identitaires, etc.) se répartissent sur plusieurs langues[9].
De fait, si les écrivains « migrants de langue française » (Mathis-Moser et Metz-Baumgartner, 2012) ou « Conrad français » constellent l’histoire de la littérature de langue française depuis longue date et plus particulièrement depuis les années 1950 – que l’on songe aux exemples fameux de Beckett, Cioran, Ionesco, Arrabal, Panaït Istrati... et, plus près de nous, Milan Kundera, Nancy Huston, François Cheng ou Wei-Wei –, il convient de se demander ce que faire littérature en français langue autre aujourd’hui veut dire. Quelles valeurs poétiques, sociologiques et idéologiques conférer à ce geste commun qui, « à la croisée des langues » (Gauvin, 2009), de l’intime et du collectif, défie les territoires, les nationalités et jusqu’aux frontières de la Francophonie elle-même ? À défaut de dépasser le caractère irréductible des singularités, peut-on trouver, afin d’esquisser une cartographie, des dénominateurs communs voire des constantes transversales, dans les pratiques, les discours et les imaginaires linguistiques qui le fondent ou l’accompagnent ?
Pour répondre à ces questions, trois axes de réflexion principaux pourront être envisagés et croisés, nullement exhaustifs, dans le cadre de contributions théoriques ou d’études de cas qui, usant de méthodologies variées, seront attentives à des considérations formelles et au travail de la langue :
1. Pour/quoi écrire en français langue autre ?
- L’adoption du français est-elle revendiquée (Pia Petersen), subie (Agota Kristof), considérée « par défaut » (Danny Laferrière) ou « lingua franca » (Johansson et Dervin, 2009), présentée comme aléatoire (Pedro Kadivar) ou comme le fruit de requêtes éditoriales (Fabio Scotto) ? S’agit-il dans le cas de la diglossie arabe ou haïtienne d’une « chance mais non pas d’un choix »[10] ?
- Où et comment ce « choix » est-il exprimé ? Dans des textes critiques, théoriques, affirmant une posture et un ethos, ou fait-il l’objet de considérations métalinguistiques ou d’un paratexte ?
- Pour quelles raisons la langue française est-elle librement « épousée » ? Pour ses « vertus propres » (Salah Stétié), « les possibilités vertigineuses de [s]a syntaxe » (Jan Baetens), ou ses vertus fantasmées (« plasticité particulière » selon Pia Petersen) ? Pour le sentiment de « refuge » (Rithy Panh) qu’elle procure ? Pour son rayonnement, pour l’amour des grands auteurs français (Jonathan Littell, Mahmud Nasimi) ou la passion de la culture française ? De quelles valeurs est-elle idéologiquement porteuse et de quelles représentations est-elle le vecteur dans la culture et l’imaginaire personnels de l’auteur, mais aussi dans sa culture et son pays d’origine ?
- En quoi la langue française permet-elle aux écrivains qui l’ont adoptée de trouver leur voie/voix, d’y (re)construire leur identité d’individu et d’auteur genré (Parlement des écrivaines francophones[11]), d’« inventer [s]on existence » (Carlo Iansiti), de se soustraire aux « connotations » (Flora Bonfanti) ou aux rigidités de sa langue d’origine (Anna Moï) ?
- Ou bien le français n’est-il qu’un moyen d’expérimentation au même titre que d’autres langues, le but ultime étant pour l’auteur dont la seule véritable patrie est l’écriture de forger sa langue, « sa poésie natale » (Souad Labbize), « la langue des anges » (Nimrod) ?
- Le passage au français est-il exclusif et définitif (Eugène Green) ? Le français est-il au contraire une langue d’accueil que l’on finit par quitter (Radu Bata), secondaire (Fabio Scotto) ou encore, à la faveur d’un nomadisme interlinguistique, d’une langue d’écriture parmi d’autres (Maria Raluca Hanea) ?
2. Le(s) français au miroir des langues et cultures autres
Quels que soient les postures et les contextes, l’écriture en français – et quelle que soit la variation diatopique de ce français – ne peut s’envisager qu’en rapport, en creux ou en relief, à l’autre langue ou aux autres langues d’écriture possibles.
- Si persiste/ insiste toujours dans la langue étrangère une part irréductible de langue maternelle, ou « co-maternelle » dans une perspective post-monolingue, quelles sont les traces et empreintes laissées par ce que Monique de Mattia-Vivies (2018) nomme la « langue mat-rangère[12] » ? Ces traces sont-elles patentes dans la syntaxe, le lexique, ou sont-elles gommées, seulement visibles dans les avant-textes pour le chercheur en génétique textuelle ?
- En quoi les autres langues servent-elles de crible critique à la langue française, ses règles, son « conservatisme » et la « vigilance permanente autour du français […] très intimidante pour un étranger » (Jody Pou)? Comment celles et ceux qui écrivent en français langue autre poussent-ils « jusqu’à ses limites » (Yasmina Khadra) cette langue qui « par certains aspects […] est comme un État dans l’État » (Eugène Green) ?
- Sur quel mode formel la langue et la culture premières informent-elles le français : le métissage (Raphaël Confiant) ? l’hybridation ? la transmutation « de l’hérédité de sang dans la langue d’accueil » (Assia Djebar) ? l’archaïsation ? la transduction ? Par quels détours et truchements étrangéisent-elles et « transculturent »-elles le français langue d’écriture? Comment l’« intranquillisent »-elles[13] en y faisant émerger quantité d’autres langues ?
- Inversement, comment le français, devenu langue « quasi-maternelle », altère-t-il en retour la pratique de l’autre ou des autres langues d’écriture, dans le cas de l’autotraduction notamment ? À moins que l’influence du français ne soit ancienne dans l’écriture d’un auteur, avant même qu’elle ne l’adopte – on pourra ainsi songer à l’exemple d’Atiq Rahimi[14].
- La présence diffuse ou omniprésente des langues et cultures autres interroge la réception : quel est le lecteur idéal des œuvres écrites en français langue autre qui sollicitent des compétences linguistiques plurielles, culturelles et historiques que le lecteur occurrent ne possède que rarement ? Lire une de ces œuvres sans connaître la langue maternelle de l’auteur, n’est-ce pas comme lire une œuvre en traduction, sans accès direct à la langue originale ?
3. Des genres et des formes : que fait le changement de langue à la création littéraire ?
- En quoi le passage au français comme langue d’écriture est-il source et catalyseur de créativité et donne-t-il naissance à des formes et des styles plus expérimentaux ? On pourra questionner la nature hybride du roman graphique, tel qu’il est produit par Zineb Benjelloun, qui tisse l’arabe au français, ou encore par Zeina Abirached qui écrit en français mais « pense [s]es histoires dans toutes [s]es langues, le français, l’arabe et le dessin »[15].
- Selon quelles configurations les œuvres plurilingues où le français s’articule ou se mêle à d’autres langues relèvent-elles d’une innovation formelle ? « Les œuvres écrites entre les langues ne se contentent pas de mélanger ou d’alterner des langues, par la tension de l’entre-deux, elles figurent à la fois la présence et le manque, la proximité et la divergence » (Cros et Godard, 2022). Comment, dès lors, s’incarne dans la chair des textes ce qui apparaît comme une poétique des contraires ou du tiraillement ?
- Pourquoi, dans certains cas, l’écriture en français est-elle spécialisée, réservée à certains genres ? On mentionnera ainsi le cas de Simonetta Greggio, de Fouad Laroui et de Mercedes Deambrosis qui usent du français pour leurs romans, mais respectivement de l’italien, du néerlandais et de l’espagnol pour leur poésie.
- Comment le déplacement linguistique, presque toujours corollaire d’un déplacement physique[16], se traduit-il sur le plan de l’écriture ? Favorise-t-il la création de personnages cosmopolites ainsi que la thématisation du bi/plurilinguisme et de la double/multiple appartenance culturelle ?
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Modalités de participation
Assorties d’une courte biobibliographie, les propositions de communication (400 mots environ et avec un titre provisoire) sont à envoyer jusqu’au 16 février 2024 à : karine.germoni@sorbonne.ae
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Calendrier
Jusqu’au 16 février 2024 : réception des propositions
23 février 2024 : envoi des notifications d’acceptation
25 et 26 avril 2024 : tenue du colloque
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Comité scientifique
Karl Akiki (Université Saint Joseph/Académie Internationale de la Francophonie Scientifique -AUF)
Olga Anokhina (CNRS-ITEM)
Alain Ausoni (Université de Lausanne)
Lourdes Carriedo (Universidad Complutense de Madrid)
Sara De Balsi (Université de Cergy-Pontoise)
Romuald Fonkoua (Sorbonne Université)
Lise Gauvin (Université de Montréal)
Karine Germoni (Sorbonne Université/Sorbonne Université Abu Dhabi)
Anne Godard (Sorbonne Nouvelle)
Angeliki Kordoni (Sorbonne Université Abu Dhabi)
Álvaro Luna-Dubois (New York University Abu Dhabi)
Véronique Porra (Johannes Gutenberg-Universität)
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Comité d’organisation
Alexis Collet (Sorbonne Université Abu Dhabi)
Karine Germoni (Sorbonne Université/Sorbonne Université Abu Dhabi)
Álvaro Luna-Dubois (New York University Abu Dhabi)
Célia Ouali (Sorbonne Université Abu Dhabi)
Leila Sammou (Sorbonne Université Abu Dhabi)
Mona Wehbe (Sorbonne Université Abu Dhabi)
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Format de l’événement
Événement comodal (sur site et en ligne)
Informations utiles
Il n’y a pas de frais d’inscription. Le transport et l’hébergement sont à la charge des participants. Les déjeuners seront pris en charge par les universités organisatrices Sorbonne Université, Sorbonne Université Abu Dhabi et New York University Abu Dhabi.
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Bibliographie indicative
Allard, Cécilia et De Balsi, Sara, Le choix d’écrire en français. Études sur la francophonie translingue, Amiens, Encrage, 2016.
Anokhina, Olga et Sciarrino, Emilio, Entre les langues. Genesis, 46 (18), Paris, PUPS, 2018.
Anokhina, Olga, Multilinguisme et créativité littéraire, Louvain-La-Neuve, L’Harmattan/Academia, « Au cœur des textes », n°20, 2012.
Anokhina, Olga, Ausoni, Alain (dir.), Vivre entre les langues, écrire en français, Paris, EAC, 2019.
Ausoni, Alain, Mémoires d’outre-langue. L’écriture translingue de soi, Slatkine Érudition, 2018.
Ausoni, Alain (dir.), La Francophonie translingue, Interfrancophonies, n°9, 2018.
Ben Saad, Nizar, « Écrire dans la langue de l’Autre : risques et enjeux », Revue de littérature comparée 2008/3 (n°327), p.289-298.
Cassin, Barbara, Plus d’une langue, Paris, Bayard, 2012.
Bruera, Franca (dir.), Écrivains en transit. Translinguisme littéraire et identités culturelles. Scrittori in transito. Translinguismo letterario e identità culturali, CosMo, 2017, n°11.
Chirila, Ileana Daniela, La République réinventée : les littératures transculturelles dans la France contemporaine, thèse de Doctorat, Duke University, 2012,
Combe, Dominique, Poétiques francophones, Paris, Hachette, 1995.
Combe Dominique, Littératures francophones. Questions, débats et polémiques, Paris, PUF, 2019 [2010].
Cros, Isabelle et Godard, Anne (dir.) (2022), Écrire entre les langues. Littérature, traduction, enseignement, Éditions des archives contemporaines. France. https://doi.org/10.17184/eac.9782813004642
De Balsi, Sara, Agota Kristof : écrivaine translingue, Paris, Presses Universitaires de Vincennes, 2019.
De Balsi, Sara, La francophonie translingue. Éléments pour une poétique, Rennes, PUR, 2024 (à paraître).
De Mattia-Viviès, Monique, « Entrer dans la langue ou dans les langues : de la langue maternelle à la langue “mat-rangère” », E-rea [En ligne], 16.1 | 2018, mis en ligne le 15 décembre 2018. https://doi.org/10.4000/erea.6502
Delbart, Anne Rosine, Les Exilés du langage : un siècle d’écrivains français venus d’ailleurs (1919-2000), Limoges, Pulim, « Francophonies », 2005.
De Rijcke, Elke, « Mes langues natales : écrire entre deux langues », Poezibao, Disputaison « Quitter sa langue, écrire en français », série B, n°17, https://www.poesibao.fr/quitter-sa-langue-natale-ecrire-en-francais-17-elke-de-rijcke-2/ (25 janvier 2023).
Derrida, Jacques, Le monolinguisme de l’autre ou la prothèse d’origine, Paris, Galilée, 1996.
Duhan, Alice, « L’Écriture en langue étrangère comme pratique et comme poétique : le cas de deux écrivains « francographes », Nancy Huston et Andreï Makine », Nottingham French Studies, Volume 56 Issue 2, p. 212-226.
Fonkoua, Romuald et Pierre Halen, Pierre (dir.), Les Champs littéraires africains, Paris, Karthala, 2001.
Gauvin, Lise, « Glissements de langues et poétiques romanesques : Poulin, Ducharme, Chamoiseau », dans Gauvin, Lise (dir.), L’Écrivain et ses langues, 1996, n°101, p. 5-24.
Gauvin, Lise, Les Langues du roman : du plurilinguisme comme stratégie textuelle, Montréal, Presses de l’Université de Montréal, 1999.
Gauvin, Lise (dir.), L’écrivain francophone à la croisée des langues. Entretiens. Paris, Karthala,
« Lettres du Sud », 2009.
Gauvin, Lise, Des littératures de l’intranquillité, Paris, Karthala, « Lettres du Sud », 2023.
Hervé-Montel, Caroline, Renaissance littéraire et conscience nationale. Les premiers romans en francais au Liban et en Egypte (1908-1933), Paris, Geuthner, 2012.
Godard, Anne, La Littérature dans l’enseignement du FLE, Paris, Didier, 2015.
Ivantcheva-Merjanska, Irene, Écrire dans la langue de l’autre : Assia Djebar et Julia Kristeva, 2015.
Johansson, Marjut et Dervin, Fred, « Cercles francophones et français lingua franca : pour une francophonie liquide » International Journal of Francophone Studies, n° 2/3, 2009, p. 385-404.
Jouanny, Robert, Singularités francophones ou choisir d’écrire en français, Paris, PUF, « Écritures francophones », 2000.
Kellman, Steven G., The Translingual Imagination, Londres, University of Nebraska Press, 2000.
Emmanuel Khérad, « Écrire dans une autre langue ; Entretien avec Simonetta Greggio, Pedro Kadivar, Fouad Laroui ». https://www.sgdl.org/sgdl-accueil/presse/presse-acte-des-forums/lalangue-francaise-pour-territoire/3105-ecrire-dans-une-autre-langue
Laroui, Fouad, Le Drame linguistique marocain, Zellige Éditions, 2011.
Marchand, Aline, et Pascale Roux (dir.), « Entre deux langues : l’écrivain-traducteur et le bilinguisme aux XXe et XXIe siècles », Recherches & travaux, 2019, n°95.
Mathis-Moser, Ursula et Mertz-Baumgartner, Birgit (dir.). Passages et ancrages. Dictionnaire des écrivains migrants de langue française, Paris, Champion, 2012.
Porra, Véronique, Langue française, langue d’adoption. Une littérature « invitée » entre création, stratégies et contraintes (1946-2000), Hildesheim, Georg Olms Verlag, 2011.
Solon, Pascale, « “Quand j’écris en arabe, je sens comme un poids sur ma main”. L’écriture d’Amin Maalouf entre l’arabe et le français », dans Robert Dion, Hans-Jürgen Lüsebrink et János Riesz (dir.), Écrire en langue étrangère. Interférences de langues et de cultures dans le monde francophone, Québec/Francfort, Nota bene/IKO-Verlag, 2002, p. 65-86.
Stétié, Salah, Le français, l’autre langue, Arles, Actes Sud, « L’impensé », 2001.
Suchet, Myriam, L’Imaginaire hétérolingue, Paris, Classiques Garnier, 2014.
Wismann, Heinz, Penser entre les langues, Paris, Albin Michel, 2012.
Yildiz, Yasedin, Beyond the Mother Tongue : The Postmonolingual Condition, New York, Fordham University Press, 2012.
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1La notion de « langue seconde » fait référence à une langue généralement reconnue officiellement et utilisée dans une zone géographique particulière, notamment dans les domaines de l’administration, du commerce et de l’enseignement (supérieur), tandis que « langue étrangère » renvoie à une langue qui n'est pas couramment utilisée dans cette zone spécifique. La notion de « français langue de scolarisation » (FLSco) s’est développée, depuis la fin des années 1980, tant pour les enfants migrant en France que pour les écoles françaises de l’étranger et pour l’enseignement des disciplines dites « non linguistiques ».
[2] « L’“Autre” par excellence, c’est d’abord la langue elle-même », dit justement Ryoko Sekiguchi. On connaît encore cette fameuse citation de Proust : « Écrire, c’est toujours écrire dans une langue étrangère », ou celle de Sartre : « On parle une langue, on en écrit une autre ».
[3] 961 heures à Beyrouth (et 321 plats qui les accompagnent), Paris, P.O.L, 2011.
[4] Ryoko Sekiguchi, « Écrire double » https://remue.net/Ecrire-double-Ryoko-Sekiguchi
[5] Elke de Rijcke, « Mes langues natales : écrire entre deux langues », Poezibao, Disputaison « Quitter sa langue, écrire en français », série B, n°17, https://www.poesibao.fr/quitter-sa-langue-natale-ecrire-en-francais-17-elke-de-rijcke-2/ (25 janvier 2023).
[6] François Cheng est membre de l’Académie française depuis 2002. En 2008, le Goncourt est attribué à l’afghan Atiq Rahimi, tandis que le Renaudot va au guinéen Tierno Monembo (originaire de Guinée) et le prix Théophile Gautier de l’Académie française est remis à Seymus Dagtekin (né dans la partie turque du Kurdistan). 2008 est l’année où Tahar Ben Jelloun entre à l’Académie Goncourt.
[7] L’exemple du Rwanda et du Burkina Faso est à ce titre édifiant.
[8] « Culture française. Déclin ou mutation ? », Le Monde, 21 décembre 2007 ; Donald Morrison et Antoine Compagnon, Que reste-t-il de la culture française ? suivi de Le Souci de la grandeur, Paris, Denoël, 2008.
[9] Voir Yasedin Yildiz, Beyond the Mother Tongue : The Postmonolingual Condition (2012), paraphrasé par l’écrivaine bruxelloise Elke de Rijcke, art. cité.
[10] Le Drame linguistique marocain de Fouad Laroui (Zellige, 2011) concerne en réalité l’ensemble du Maghreb : « [G]énéralement on écrit dans sa langue maternelle, ce qui est le cas de 99% des auteurs. Mais les Maghrébins ne peuvent pas écrire dans leur langue maternelle car c’est une langue qui ne s’écrit pas. Personne n’écrit en dialecte. Alors vient le choix : est-ce qu’ils vont écrire en arable classique ? Très belle langue, certes, mais impossible à manier. […] Quelle est la solution ? C’est le français, pour ceux qui sont allés à l’école française, ceux pour qui le français est quasiment une langue maternelle. […] Cette analyse concerne la diglossie arabe. Techniquement la diglossie existe aussi en Haïti. […] Pour l’amour de dieu, si j’ose dire, n’utilisons plus jamais le mot « choisir » en ce qui concerne les écrivains du Maghreb qui s’expriment en français. Le français, je ne dirais pas que c’est un pis-aller, c’est une chance pour eux parce qu’ils peuvent s’exprimer avec le français mais ça n’a jamais été un choix et ce n’est pas un choix. » C’est une difficulté du même ordre que vivent les écrivains libanais, tels qu’Amin Maalouf, ainsi que le rappelle Pascale Solon (2002).
[11]Ce collectif de 130 écrivaines venant des quatre coins du monde, a pour objectif, depuis 2018, de rendre visible l’apport des femmes en littérature, de constituer une force et un espace de parole au féminin, en français, cette « langue en partage, que nous métissons », commente Faouzia Zouari la présidente du collectif, « avec nos souffles singuliers mais qui reste notre véhicule de valeurs, de rêves et de combats », « “Les femmes qui écrivent sont-elles dangereuses ?” se demandera le Parlement des écrivaines francophones à Beyrouth ». Entretien avec Faouzia Zouari. Propos recueillis par Georgia Makhlouf, le 20 octobre 2022. https://www.lorientlejour.com/article/1315121/-35.html.
[12] « Pourquoi ne pas parler une langue mat-rangère, tout à la fois in/hors matrie, sans pour autant dénaturer la langue étrangère mais en laissant s’y déposer un résidu, qui garde la trace de son rapport à lalangue, permettant ainsi, pour un locuteur donné, l’investissement corporel de la langue étrangère, qui aurait ainsi plus de chance de sonner juste ? »
[13]En référence au titre de l’ouvrage récent de Lise Gauvin, Des littératures de l’intranquillité, Paris, Karthala, « Lettres du Sud », 2023, dont la thèse est qu’en situation de minorité face au français de France, les littératures francophones font émerger quantité d’autres langues en elles – créole, malinké ou encore l’anglais.
[14] « [M]ême quand j’écrivais en persan, mon écriture dérangeait mes compatriotes. Non seulement sur le plan thématique contre la société phallocrate, les dogmes religieux, la frustration sexuelle… mais aussi sur le plan stylistique : j’appliquais dans ma langue maternelle la rhétorique de la langue française. Ensuite, quand je me suis mis à écrire en français, c’était l’inverse, j’appliquais et j’applique toujours la rhétorique de ma langue maternelle dans cette belle langue d’adoption. Cela donne, il me semble, une troisième langue, une langue presque étrangère. », « Rencontre avec Atiq Rahimi », mise en écrit par Carole Leymarie, Kristèle Nonnet-Pavois, Champ lacanien, 2019/2, n°23, p.141-147.
[15] Baptiste Roger-Lacan, « Beyrouth nous reconnaîtra-t-elle ? Une conversation avec Zeina Abirached », Le Grand Continent, 29 novembre 2020. https://legrandcontinent.eu/fr/2020/11/29/zeina-abirached/
[16] Dans les faits, la France et le Québec demeurent les deux pôles du monde francophone qui attirent le plus les « migrations littéraires ».