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Violences coloniales et stratégies d'aliénation des enfants autochtones

Violences coloniales et stratégies d'aliénation des enfants autochtones

Publié le par Eloïse Bidegorry (Source : Franck Miroux)

Please click the following link https://drive.google.com/drive/folders/1vBO6cRSYutyOBwoNzL5BTfQ-owXAQRi8?usp=drive_link to find a call for papers in English,  Spanish and Portuguese for the conference.

Ce colloque s’inscrit dans la continuité du projet de recherche « Violences éducatives à l’encontre des peuples autochtones », lancé par l’Institut Francophone pour la justice et la démocratie-Louis Joinet (IFJD) en 2023. Ce projet a déjà conduit à la présentation à l’Assemblée nationale d’un rapport sur les homes indiens de Guyane recommandant la mise en place d’une commission de vérité pour enquêter sur les violences perpétrées dans ces institutions. Il réunit un groupe de travail composé de chercheurs (juristes, historiens, anthropologues, civilisationistes). Les membres du groupe effectuent un travail de recensement des aires géographiques où ces violences se manifestèrent et rédigent des fiches analytiques par pays. Ces fiches, qui se veulent les plus exhaustives possible, reprennent les formes que ces violence revêtirent, le contexte dans lequel elles intervinrent, les traumatismes qu’elles engendrèrent et les processus de réparation mis en place ou souhaités. Combinant recherche documentaire et travail de terrain, elles serviront ensuite à la rédaction de chapitres afin de composer un ouvrage dont la publication est prévue fin 2025. Le colloque « Violences coloniales et stratégies d’aliénation des enfants autochtones », coorganisé par l’IFJD et les laboratoires ALTER (UR 7504) IE2IA (UMR 7318) et CLIMAS (EA4196) interviendra donc en aval de la parution de l’ouvrage dont il constituera un prolongement naturel. Il permettra d’enrichir la réflexion déjà amorcée par le groupe de travail en rassemblant d’autres experts qui alimenteront à leur tour les échanges autour de ces thématiques fondamentales.

Les politiques, visant à extraire l’enfant de sa communauté pour le déculturer au prétexte de l’assimiler, revêtirent des formes diverses. La Commission de vérité et réconciliation du Canada (2008-2015) a porté à l’attention de la communauté internationale les stratégies qui visèrent à créer des établissements prétendument destinés à pourvoir à l’éducation des Autochtones. Qu’il s’agisse de pensionnats, d’écoles de mission ou de homes, les objectifs étaient les mêmes : isoler autant que possible les enfants de leur culture d’origine (en ayant souvent recours à un système d’internat) ; les convertir à la religion du colonisateur ; leur imposer la nouvelle langue dominante et les valeurs qu’elle véhicule ; effacer les épistémologies et les pratiques spirituelles traditionnelles. Parfois, il ne s’agissait pas d’enfermer les enfants autochtones dans une institution, mais de les soustraire à leurs parents pour les placer dans des familles d’accueil non-autochtones ou pour les proposer à l’adoption à des couples non-autochtones. 

Lorsqu’on évoque les violences faites aux enfants des communautés autochtones, les pensionnats indiens du Canada et ceux des États-Unis sont souvent cités car ils ont fait l’objet d’une couverture médiatique significative. Toutefois, force est de constater que ces stratégies furent mises en œuvre sur tous les continents :

-          dans les Amériques (au Canada et aux États-Unis, mais aussi au Pérou, au Suriname, au Brésil , en Équateur et en Guyane française par exemple) ;

-          en Afrique (au Botswana et en Sierra Léone entre autres) ;

-           en Océanie (en Australie, en Nouvelle Zélande, en Nouvelle Calédonie et en Papouasie occidentale) ;

-          en Asie (aux Philippines, en Inde, en Malaisie, en Chine, en Turquie et en Sibérie pour ne citer que quelques exemples) ;

-           en Europe (en Suède, en Norvège, en Finlande et en Russie européenne, dans la péninsule de Kola).

Il apparait donc que ces politiques coloniales ciblant l’enfance pour mieux assujettir des communautés entières opérèrent à très grande échelle et dans des contextes politiques divers (colonie, état colonisateur, état décolonisé reproduisant ces violences sur des populations minoritaires). L’ambition de ce colloque est de croiser les regards et les approches sur ces questions essentielles à la reconstruction des sociétés autochtones aujourd’hui. Non seulement la réflexion ne se limitera pas à une aire géographique spécifique, mais les interventions tendront à favoriser les échanges entre acteurs de terrain (militants, travailleurs sociaux, juristes, etc.) et chercheurs issus de disciplines diverses. Cette transversalité et cette mixité des perspectives permettront de dégager des constantes et des divergences dans les mécanismes à l’œuvre pour détruire les peuples autochtones en s’attaquant à leurs générations montantes. Cela permettra également d’adopter une démarche comparatiste quand il s’agira d’étudier les systèmes que les communautés autochtones ayant survécu à ces tentatives d’effacement mettent en œuvre pour se rétablir et se reconstruire.

Les communications pourront porter, sur les aspects suivants, sans que cette liste ne soit exhaustive :

-          formes des violences exercées et mécanismes d’expansion coloniale ;

-          instrumentalisation des structures politiques religieuses et sociales pour permettre à ces violences de s’exercer (traités, recours aux forces de l’ordre, rôle des institutions politiques, appareil législatif légitimant ces violences, rôle du système juridique et des structures sociales d’aide à l’enfance, investissement des groupes religieux dans l'éducation des populations autochtones, etc.) ;

-          processus de déshumanisation et de « désindigénisation » de l’enfant (violences physiques, morales, discursives, symboliques) ;

-          politiques visant à procéder à des expérimentations médicales sur les enfants autochtones ;

-          tensions entre les ambitions politiques affichées et les moyens financiers alloués et leurs conséquences (dénutrition, maltraitances, maladies, accidents, insuffisance des ambitions scolaires, etc.) ;

-          conséquences de ces politiques en termes d’image et d’estime de soi et de sa communauté (sentiment de honte, rejet de son indigénéité, exclusion de sa communauté d’origine, etc.) ;

-          tension entre les objectifs d’assimilation et l’absence d’opportunité de s’insérer dans la société majoritaire ;

-          séquelles intergénérationnelles (nature, mécanismes qui les régissent, répercussions durables, obstacles au rétablissement) ;

-          mobilisation politique (rôle des pensionnats dans l’émergence d’une génération militante, mise en place d’associations et d’organisations œuvrant à la reconnaissance des violences subies et/ou à une transformation structurelle de la société ayant infligé ces violences) ;

-          mise en place de mécanismes de réparation et/ou de système de reconnaissance des violences subies (CVR, commissions d’experts, commissions parlementaires, systèmes de compensation, monuments, cérémonies commémoratives, etc.) ;

-          effets concrets de ces mécanismes de réparation (effets et limites) ;

-          garanties de non répétition des violences (décolonisation des systèmes éducatifs et des structures sociales et politiques) ;

-          rôle des pratiques culturelles et artistiques dans la résurgence des identités tribales et dans la résistance à un discours hégémonique souvent marginalisant ;

-          questions de souveraineté dans le domaine de l’éducation autochtone ;

-          prise en compte de ces violences dans la législation locale (au niveau des États) et/ou prise en compte de la législation internationale et des conventions internationales par les États concernés (UNDRIP, convention de l’OIT, convention de l’UNICEF, etc.). 

Date de l’évènement : 23-24-25 octobre 2026.

Lieu : Paris (lieu à préciser).

Propositions de communications : Les propositions de communication d’environ 300 mots sont à adresser avant le 20 mai 2025 aux trois organisateurs :

Jean-Pierre Massias (jean-pierre.massias@ifjd.org)

Lionel Larré (Lionel.Larre@u-bordeaux-montaigne.fr)

Franck Miroux (franck.miroux@univ-pau.fr).

Elles seront suivies d’une courte bibliographie et d’une courte note biographique. 

Les propositions de panels thématiques seront également les bienvenues.

Langues de communication : français, anglais, espagnol et portugais. Les communications dans une langue autochtone sont les bienvenues à condition de prévoir un abstract détaillé en espagnol, en français ou en anglais.