éditoriaux

Nouveaux regards sur la lecture

Nouveaux regards sur la lecture

« Est-ce que l’on peut lire un texte sans s’interroger sur ce que c’est que de lire ? ». La question posée par Pierre Bourdieu continue de hanter les sciences humaines. La décennie écoulée a vu paraître une importante série d’essais sur la lecture qui en examinaient les enjeux éthiques et existentiels, et la veine ne tarit pas. Objet transdisciplinaire débordant toujours largement le seul territoire de la théorie littéraire, la lecture passionne notamment dans ses usages empiriques – sa matérialité, les émotions qu’elle déclenche, ses effets thérapeutiques, jusqu’à sa possible fétichisation. Les dix recensions réunies dans le nouveau dossier critique d'Acta fabula  « Nouveaux regards sur la lecture » dirigé par Léo Mesguich, Capucine Zgraja et Marion Moll offrent un large panorama sur un champ de recherche toujours aussi prolifique.

(Illustr. : Livre, mon ami : lectures enfantines, 1914-1954, par Annie Renonciat, catalogue de l'exposition présentée à la Bibliothèque Forney à l'automne 1991, ©Gallica)

Le bonheur dans le pré parisien

Le bonheur dans le pré parisien

Médiévalismes et orientalismes

Médiévalismes et orientalismes

Comment le patrimoine littéraire vient au public

Comment le patrimoine littéraire vient au public

Le pas suspendu de Jean Echenoz

Le pas suspendu de Jean Echenoz

En 1979, Jean Echenoz envoie son premier roman par la poste à nombre d’éditeurs sans résultat, jusqu’au moment où, en désespoir de cause, il le dépose au secrétariat des éditions de Minuit. Ce premier livre n’est pourtant pas un succès et, malgré le prix Fénéon, ne se vend qu’à 500 exemplaires. Après deux ans et demi de latence, il remet un nouveau manuscrit rue de Palissy. Lindon cette fois réagit favorablement, l’invitant dès le lendemain au Sybarite. La presse s’emballe, le livre est sur la liste du Médicis de 1983 et, alors que Lindon dit à son auteur qu’il n’a aucune chance, il décroche le prix pour Cherokee, qui se vend à 30 000 exemplaires. Quinze ans plus tard, Je m'en vais, couronné par le prix Goncourt, s'écoule à 400 000 exemplaires. Dans Jean Echenoz. Le temps suspendu (Hermann), François Dosse se penche sur la façon dont l’écrivain des éditions de Minuit déploie devant son lecteur le mécano qui lui a permis de construire sa fiction. Fabula donne à lire sur l'Introduction de l'ouvrage : "Du nouveau roman au roman nouveau"… Fabula avait déjà salué le récent Cahier de L’Herne supervisé par Johan Faerber, ainsi que les les actes du colloque Jean Echenoz : la fiction, la langue (Champion).

(Photo : Jean Echenoz en 2019, chez lui à Paris. ©Eric Garault/Pasco)

Derrida fait la bête

Derrida fait la bête

Qui aurait pu croire de son vivant qu'on verrait un jour ses livres paraître sous pavillon Gallimard ? Celui qui avait dû créer sa propre maison d'édition, les regrettées éditions Galilée, pour pouvoir publier en France des livres qui se vendaient par milliers partout dans le monde, aurait été sans doute étonné de découvrir lequel de ses titres serait le premier accueilli dans la collection Folio Essais : L’animal que donc je suis, où le philosophe se penchait sur le gouffre creusé par la tradition philosophique entre l'animal raisonnable et l'animal-machine. Derrida y propose à ses lecteurs une expérience de pensée, qui est d’abord le récit d’une expérience vécue par le philosophe lui-même : celle de sa nudité devant le regard d’un animal – en l’occurrence un chat domestique dans une salle de bain – et surtout celle de la gêne, voire de la honte, qu’il a ressentie. Tenter de se voir à travers les yeux de l’animal est alors un moyen de reposer à nouveaux frais la question du propre de l’homme. Fabula reviendra en temps voulu sur la prochaine parution aux éditions du Seuil d'un volume Psychanalyse et critique littéraire. 1969-1970.

Deuxième époque

Deuxième époque

Les éditions Deuxième époque accueillent le nouvel essai d'Émeline Jouve consacré au théâtre étatsunien sous le titre Un siècle d'avant-garde : alors que la culture américaine est omniprésente, il n’est pas aisé de s’informer sur le théâtre propre à cette culture. L’ouvrage a été pensé pour combler ce vide et permettre à un large public de découvrir l’histoire de la scène théâtrale aux USA et certains de ses plus grands représentants. Il vient mettre au jour trois générations avant-gardistes : la première vague correspondant à la naissance d’un théâtre natif s’étend de 1910 à 1940 ; la deuxième vague est un phénomène post-Seconde Guerre qui dure jusqu’aux années soixante-dix ; la troisième vague fait suite à la précédente et court jusqu’à aujourd’hui. C’est l’évolution du positionnement des artistes rebelles vis-à-vis de l’institution dont Broadway est l’incarnation qui permet de dégager trois tendances dans l’histoire de l’avant-garde étatsunienne.

Paraissent sous les mêmes presses le premier tome de la somme de Roger Assaf, Le Théâtre dans l'histoire consacré aux Théâtres antiques, la scène entre les hommes et les dieux, et l'essai de Jean-François Ballay, Le Théâtre de la disparition de l'homme, qui réfléchit au statut d'un théâtre sans acteurs à partir de trois œuvres marquantes qui ont fait sensation au début du XXIe siècle : Les Aveugles de Denis Marleau, Stifters Dinge de Heiner Goebbels et Re : Walden de Jean-François Peyret. On peut également précommander une nouvelle édition revue et augmentée des Écrits sur le théâtre de Vsevolod Meyerhold, établis par Béatrice Picon-Vallin.

Lire aussi les éditos de la rubrique Questions de société…

Et les éditos de la rubrique Web littéraire…

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